« Qui a tué mon père », d’après Edouard Louis, m.e.s. Stanislas Nordey

Samedi 14 Septembre 2019 à 20 h Tropiques-Atrium

Dans Qui a tué mon père, Édouard Louis décrypte les mécanismes de domination qui broient les êtres et leurs relations.

Stanislas Nordey met en scène et interprète la parole et le regard d’un fils sur son père, depuis les premiers souvenirs d’enfance jusqu’à sa « mort sociale ».

Qui sont les gens qu’on appelle « les classes populaires » et dont les femmes et hommes politiques ne cessent de parler comme étant des « fainéants » ou des « exclus » ? Avec ce texte, Édouard Louis s’engage dans ce qu’il nomme une « littérature de la confrontation ».

Édouard Louis est écrivain. Il a publié aux éditions du Seuil En finir avec Eddy Bellegueule en 2014 et Histoire de la violence en 2016 – roman dont des extraits ont été lus au TNS par Stanislas Nordey en février 2016 dans le cadre de L’autre saison. En 2013, il a dirigé l’ouvrage Pierre Bourdieu : l’insoumission en héritage, paru aux Presses universitaires de France – où il crée et dirige la collection « Des Mots ». Il a écrit Qui a tué mon père à l’invitation de Stanislas Nordey ; le texte est paru en mai 2018 aux éditions du Seuil.

Dans la lignée de Marguerite Duras, Simone de Beauvoir, Annie Ernaux ou Didier Eribon, l’écriture d’Edouard Louis se déploie à partir de son existence. Après avoir marqué nombre de ses lecteurs avec ses deux premiers romans aux allures biographiques, il répond à l’invitation du metteur en scène et interprète Stanislas Nordey, un texte à dire, à lire, une œuvre pour le théâtre.

Ce nouveau récit se présente sous la forme d’un monologue. Un homme se rend dans l’appartement de son père et découvre, sur une chaise, un corps abîmé, celui d’une certaine classe ouvrière d’une région défavorisée de la France d’aujourd’hui. Il prend la parole et se remémore des épisodes de son enfance dans la tentative d’expliquer comment le corps de son père en est arrivé, encore jeune, à un tel délabrement. Dans une volte-face littéraire, le politique rejoint l’intime et raconte le corps des hommes.

Extrait :

1999 – je compte sur mes doigts : une, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit. Je me prépare à avoir huit ans. Tu m’as demandé ce que je voulais pour mon anniversaire, et je t’ai répondu : Titanic. La version VHS du film venait de sortir, on voyait la pub passer plusieurs fois par jour à la télévision, en boucle. Je ne sais pas ce qui m’attirait autant dans ce film, je ne saurais pas dire, l’amour, le rêve partagé de Leonardo DiCaprio et de Kate Winslet […], je ne sais pas, mais j’étais obsédé par ce film que je n’avais pas encore vu, et je te l’ai demandé. Tu m’as répondu que c’était un film pour les filles et que je ne devais pas vouloir ça. Ou plutôt, je parle trop vite, d’abord tu m’as supplié de vouloir autre chose, Tu ne veux pas plutôt une voiture télécommandée ou un costume de super-héros, réfléchis bien, mais moi je répondais Non, non, c’est Titanic que je veux, et c’est après mon insistance, après ton échec, que tu as changé de ton. Tu m’as dit que puisque c’était comme ça je n’aurais rien, pas de cadeau. Je ne me rappelle plus si j’ai pleuré.
Les jours ont passé. Le matin de mon anniversaire, j’ai trouvé au pied du lit un grand coffret blanc, avec écrit dessus en lettres d’or : Titanic. À l’intérieur il y avait la cassette, mais aussi un album photo sur le film, peut-être une figurine du paquebot. C’était un coffret de collection, sûrement trop cher pour toi, et donc pour nous, mais tu l’avais acheté et déposé près de mon lit, enveloppé dans une feuille de papier. Je t’ai embrassé sur la joue et tu n’as rien dit, tu m’as laissé regarder ce film près d’une dizaine de fois par semaine pendant plus d’un an.
Édouard Louis
Qui a tué mon père
éditions du Seuil, 2018

Samedi 14 Septembre
20h – salle Aimé Césaire

Tarif D 25€ 20€ 8€

Texte : Edouard Louis
D’après le livre d’Édouard Louis.
Qui a tué mon père © 2018 publié aux éditions du Seuil

Mise en scène et interprétation : Stanislas Nordey
Collaboration artistique : Claire Ingrid Cottanceau
Lumière : Stéphanie Daniel
Scénographie : Emmanuel Clolus
Composition musicale : Olivier Mellano
Création sonore : Grégoire Leymarie
Clarinettes : Jon Handelsman
Sculptures : Anne Leray et Marie-Cécile Kolly
Avec la participation amicale de Wajdi Mouawad
Régie générale : Antoine Guilloux
Réalisation décor et costumes : Ateliers du Théâtre National de Strasbourg

Production : Théâtre National de Strasbourg

Coproduction : La Colline – théâtre national

 

******