Étiquette : Aristide Tarnagda

Fantômes et dramaturgie du monologue dans l’œuvre d’Aristide Tarnagda

— Par Aurore Desgranges —

Dramaturge engagé dans la vie publique de son pays, le Burkina Faso, Aristide Tarnagda commence une carrière de comédien dans la troupe du théâtre de la Fraternité (1), créée en 1975 par Jean-Pierre Guingané (2). Lors du festival les Récréâtrales (3) de 2004, l’originalité de son écriture est révélée notamment grâce au soutien de Koffi Kwahulé. Sa production d’œuvres théâtrales dans les années qui suivent confirme sa vocation de dramaturge et de metteur en scène. J’expliciterai dans cet article un de ses dispositifs dramaturgiques de prédilection, commun à trois œuvres Et si je les tuais tous madame ? ; Les Larmes du ciel d’août et Façons d’aimer : le monologue. En effet, ce type de discours structure de manière originale une dramaturgie des laissés-pour-compte, êtres en situation de déréliction à qui il ne reste plus que le verbe, ultime chance de revisiter leur passé. La forme dialogale (4) de l’écriture s’avère un leurre. Comme pour compenser les injustices subies, ces déshérités s’emparent du discours et déséquilibrent la situation d’énonciation en ne laissant jamais à leurs interlocuteurs la possibilité de s’exprimer.

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Entretien : « La plus secrète mémoire des hommes », m.e.s. Aristide Tarnagda

Mardi 15 novembre  2022 19h 30 Tropiques-Atrium

Parlez-nous de la genèse de ce projet et des défis entourant l’adaptation du volumineux roman de Mohamed Mbougar Sarr au théâtre.

Aristide Tarnagda : L’écriture de Sarr convoque de la complexité et c’est ce que j’aime beaucoup. Elle habite les hommes et les femmes de son continent par sa beauté et sa justesse. Elle est à la fois incisive et crue, profonde et ancrée dans les problématiques africaines et mondiales. En cela, elle nous restitue notre humanité en nous replaçant dans l’universel.

En 2020, j’ai adapté au théâtre le premier roman de l’auteur, Terre ceinte. Je voulais initialement proposer au FTA (Festival TransAmériques) une traversée de son œuvre par le biais des figures féminines de ses romans, qui me touchent beaucoup. Mais nous avons finalement choisi de partir d’un texte ancré dans l’actualité.

Dans un entretien accordé à France Culture, les griots et hommes de cinéma Dani et Sotigui Kouyaté affirmaient que « L’Afrique ne sait plus écouter ses vieux ». Que pensez-vous de cette déclaration et qu’y a-t-il à ce sujet dans La plus secrète mémoire des hommes ?

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« La plus secrète mémoire des hommes », de Mohamed Mbougar Sarr, m.e.s. Aristide Tarnagda

Mardi 15 novembre 19h30 – Salle La Terrasse

Création

Texte: Mohamed Mbougar Sarr
Adaptation, mise en scène: Aristide Tarnagda
Avec: Odile Sankara, Aristide Tarnagda
Musique: Antoine Berthiaume
Lumières: Daniel Zoungrana

Production : Théâtre Acclamations
Coproductions : Festival TransAmériques et Association Récréâtrales (Burkina Faso)

Suivre les mots à la piste

Aristide Tarnagda et Odile Sankara, deux voix immenses du théâtre burkinabè contemporain, signent une lecture théâtrale du roman de Mohamed Mbougar Sarr, La plus secrète mémoire des hommes (Goncourt 2021). Véritable odyssée bâtie autour d’un enchâssement de récits, ce livre haletant court sur un siècle et trois continents. Du Sénégal à la France en passant par l’Argentine, l’auteur pose avec un humour mordant la question de l’authenticité et du pouvoir de la littérature.

Par sa complexité, son énergie narrative et sa manière d’interroger la transmission des savoirs dans un contexte mondial, le roman de Sarr, profondément humain, déjoue le face-à-face traditionnel entre Afrique et Occident…

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Sankara : seul contre tous ?

À propos de « Sank, ou la patience des morts » d’Aristide Tarnagda

— Par Roland Sabra —

Il va mourir, assassiné probablement, et il le sait. Mais la mort ne lui fait pas peur. C’est par elle qu’il vivra, ou plus exactement c’est l’idée de la révolution dont il est porteur qui vivra. Du moins le croit-il. A tort. Comme après toute mort d’un personnage porteur d’espoir, fauché à la fleur de l’âge se construit un mythe. La révélation n’ayant pu s’accomplir totalement, un vide est à remplir. La littérature, le cinéma, les arts en général mais aussi la politique foisonnent de ces vies trop vite abrégées et qui donnent matière à imaginer, à rêver. La mort prématurée du héros est la condition de construction du mythe et c’est même une des caractéristiques essentielles du héros que de manifester un courage qui s’exprime par le mépris pour la mort. Le Christ est mort à 33 ans. Thomas Sankara a été emporté à 37 ans par le coup d’État organisé par Blaise Caompaoré. « Iconographié » à l’égal d’un Patrice Lumumba ou d’un Che Guévara africain son souvenir demeure vivace dans la mémoire d’une jeunesse en mal de vivre au cœur un continent surexploité par les puissances coloniales d’hier et d’aujourd’hui.

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« Sank ou la patience des morts », d’Aristide Tarnagda

23 & 24 mai 2019 à 20h Tropiques-Atrium

Mise en scène : Aristide Tarnagda & Pierre Lambotte

Lire : Sankara seul contre tous? par Roland Sabra

Quand l’Homme est venu, son pays était une « synthèse douloureuse de toutes les souffrances de l’humanité ». L’Homme voulut faire de son pays une terre de dignité et de liberté. Alors courageusement, il sut redéfinir la somme du possible et du pensable par laquelle le développement d’un pays comptant parmi les plus démunis du monde pouvait être envisagé. L’Homme s’engagea dans un processus de transformation sociale progressiste et progressif, en se préoccupant des besoins prioritaires de son pays. En quelques années, l’Homme fit faire à son pays un bond qualitatif. Mais il restait conscient que les questions essentielles de son peuple étaient celles de tout un continent et de tous les peuples exploités et opprimés. Panafricaniste et antimondialiste, il a su devenir la voix des sans voix.
Par un après- midi, l’Homme fut fauché par des balles assassines. L’Homme est tombé, trahi par celui qu’il considérait comme son frère, mais il avait eu le temps de semer la graine et de l’arroser de son sang.

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