Précarité : 9 millions de Français en situation de privation matérielle et sociale en 2022, un record!

— Par Victor Tribot Laspière (France Bleu)

Selon une étude de l’Insee publiée jeudi, 9 millions de personnes étaient en situation de privation matérielle et sociale en 2022, un niveau jamais atteint jusqu’à présent.

En France métropolitaine, 9 millions de personnes étaient en situation de privation matérielle et sociale en 2022, selon une étude de l’Insee publiée ce jeudi. Cela représente 14% des personnes vivants en logement ordinaire et c’est le « plus haut niveau depuis 2013, première année où elle a été mesurée« . L’Insee précise que « cet indicateur repère les personnes ne pouvant pas couvrir les dépenses liées à au moins cinq éléments de la vie courante parmi treize critères« . Parmi ces critères, on retrouve notamment le fait de ne pas avoir les moyens de maintenir son logement à bonne température ou de partir en vacances pendant une semaine durant l’année.

L’Insee constate que cette augmentation du taux de privation matérielle et sociale intervient alors qu’en 2021, « l’indicateur atteignait un niveau historiquement bas en raison de la crise sanitaire« . Selon l’institut, cela peut s’expliquer par une « reprise des habitudes de vie antérieures à la crise sanitaire » et à « l’inflation [qui] est venue éroder le pouvoir d’achat des ménages« .

Une personne sur dix n’a pas les moyens de se chauffer correctement

En 2022, une personne sur dix vivait dans un ménage qui n’a pas les moyens financiers de chauffer correctement son logement. Entre 2014 et 2021, ce taux oscillait entre 5 et 7%. Cette augmentation peut être attribuée, d’après l’Insee, « à la hausse des prix de l’énergie de l’hiver 2021-2022, et en particulier à celle du fioul domestique, combustible de chauffage que les ménages vulnérables utilisent davantage que les autres« . Cette hausse des prix énergétiques touche plus durement les habitants des zones rurales, dont les dépenses en chauffage et en carburants sont plus élevées.

Les ménages sont également plus nombreux qu’avant la crise sanitaire à ne pas pouvoir se payer une semaine de vacances (24,4% en 2022 contre 22,3% en 2019). Pourtant, cette proportion « baissait tendanciellement depuis une dizaine d’années« , observe l’Insee.

Les 13 critères mesurant la privation matérielle et sociale ne sont pas tous concernés par l’augmentation des difficultés rencontrées par les ménages depuis le début de la crise sanitaire. En effet, selon l’Insee en 2022, 4,1% des personnes vivant en logement ordinaire ne pouvaient pas posséder deux paires de chaussures pour des raisons financières, contre 5,7% en 2019. La proportion de ménages déclarant ne pas pouvoir s’acheter des vêtements neufs a également baissé (10,1% en 2022 contre 9,8% en 2019).

Les privations plus importantes en milieu rural

Le risque de privation varie selon le niveau de vie, la catégorie socioprofessionnelle, le niveau de diplôme, l’âge, le type de ménage ou encore le lieu de résidence. Il augmente ainsi fortement dans le milieu rural. « Début 2022, la fréquence des situations de privation matérielle et sociale augmente nettement par rapport à 2020 dans les communes rurales (+2 points), et dans une moindre mesure dans les communes urbaines de densité intermédiaire (+1,6 points) » tandis qu’elle « recule dans les grands centres urbains« , explique l’Insee.

Les familles monoparentales et les familles nombreuses sont également plus exposées au risque de privation : l’an dernier, « 3 personnes sur 10 vivant dans des familles monoparentales étaient en situation de privation matérielle et sociale, et 2 personnes sur 10 au sein des couples avec trois enfants ou plus« .

L’Insee attire l’attention sur le fait que la situation de privation matérielle et sociale semble favoriser un certain sentiment d’exclusion, de solitude et d’isolement. « 25% des adultes en situation de privation matérielle et sociale déclarent ne pas avoir de famille, d’amis ou de voisins à qui ils peuvent demander de l’aide morale, matérielle ou financière » et 27% « se sentent exclus de la société« , contre seulement 7% des adultes n’étant pas dans cette situation

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