Pour comprendre la crise sociopolitique haïtienne(1)

 — Par Renel Exentus2

Introduction

La décennie  010-2021 a été riche en événements marquants pour la société haïtienne. Le séisme du 12 janvier 2010, avec son cortège de victimes, fut l’événement le plus visible et le plus médiatisé3. Il s’en est suivi une forte mobilisation internationale en soutien aux victimes. Cette décennie ne fut pas seulement marquée par une catastrophe humanitaire. Elle fut aussi l’occasion d’un nouvel ajustement de l’ordre néocolonial de l’État haïtien4. Ce nouvel ajustement se caractérise par une plus grande mainmise des puissances impérialistes dans la gestion du pays, au point que les termes de « domination » et de « dépendance » ne suffisent peut-être plus à expliquer la situation de la deuxième république du Nouveau Monde.

Traditionnellement, la catégorie de « pays dominé » renvoie à un pays dans lequel la bourgeoisie et l’État sont en grande partie subordonnés aux intérêts des puissances impérialistes. Les pays qui se trouvent dans cette situation de vassalisation sont nombreux et diversifiés. Toutefois, plusieurs d’entre eux ont un certain niveau d’autonomie institutionnelle et de développement des forces productives relativement autocentrées. C’est le cas de plusieurs ex-colonies en Afrique, en Amérique latine, en Asie et ailleurs. Dans le cas d’Haïti, la subordination a pris une proportion telle que la catégorie « pays dominé » ne permet pas de comprendre la véritable nature des liens qu’entretiennent les puissances impérialistes avec elle. Cet assujettissement s’inscrit dans une logique de délitement de l’ossature institutionnelle du pays.

Il est devenu anodin, en Haïti, que les ambassades des puissances impérialistes, dont les États-Unis, l’Union européenne et le Canada, s’arrogent le droit de changer les résultats électoraux et de légitimer des dirigeants non élus. Ces puissances constituent ouvertement, et sur tous les plans, des « gouvernements parallèles » même si cela outrepasse manifestement les lois et les institutions du pays5. En Haïti, la parole des émissaires occidentaux est dotée d’un pouvoir qu’elle ne détient nulle part ailleurs6. Cette domination est visible au quotidien à travers la coopération technique dans presque tous les ministères et dans la mise en œuvre des activités de développement dans les quartiers. Des institutions régulatrices de l’État, comme la police, sont formées et financées directement par des puissances étrangères. Cette domination s’étend même aux choix du calendrier électoral, du ministre des Finances et du directeur de la Police nationale.

Bref historique de la subordination de l’État d’Haïti

Après la victoire héroïque des esclaves de Saint-Domingue contre l’armée de Napoléon, le 18 novembre 1803, le nouvel État fait face à l’hostilité des puissances capitalistes de l’époque dont l’économie repose essentiellement sur l’esclavage. En dépit de leurs rivalités, les puissances voient dans la création de l’État d’Haïti l’émergence d’un ennemi commun. Les États-Unis aussi bien que les puissances européennes ne reconnaissent pas le nouvel État. Conformément à leurs intérêts fondés sur le système esclavagiste, ils s’entendent pour imposer un blocus à Haïti.

Pour sortir de l’isolement international, les classes dominantes haïtiennes se plient, en 1825, à l’injonction de la France qui les oblige à payer une indemnité aux colons esclavagistes7. À peine deux décennies après l’indépendance, le pays retombe dans le piège de la subordination. La jeune nation est alors asservie financièrement au point qu’une majeure partie de son économie sera siphonnée par la bourgeoisie financière française pendant tout le XIXe siècle8. Cette subordination financière, qui enferme la jeune nation dans le labyrinthe du sous-développement, se poursuit au XXe siècle sous l’occupation étatsunienne9. En plus du contrôle militaire et politique, les États-Unis, à leur tour, prennent le contrôle des finances du pays pour spolier et piller les maigres ressources économiques du peuple haïtien10.

Même si la dette néocoloniale a été payée à la fin des années 1940, les classes dirigeantes continuent d’accepter le carcan de l’endettement, notamment pendant le long règne des Duvalier11. Après plus d’un siècle d’asservissement, elles ne semblent à l’aise que dans la subordination à l’égard de l’impérialisme. Soulignons que cette subordination se fait au prix de la sauvage répression des masses populaires urbaines et rurales qui aspirent à la construction d’un modèle de société alternative au système (néo)colonial. En fait, l’endettement a non seulement freiné tout progrès économique et social des classes populaires urbaines et paysannes, mais il a aussi coincé le pays dans une spirale d’arriération et de sous-développement12. Cela peut expliquer l’effondrement de l’État et l’asservissement d’Haïti aux organisations de coopérants ainsi qu’aux organismes financiers internationaux tels que la Banque mondiale (BM) et le Fonds monétaire international (FMI).

En 1986, les révoltes populaires font chuter la dictature, mais la machine de l’État néocolonial demeure intacte. Les orientations de gouvernance néolibérale, amorcées depuis les années 1970, sont renforcées par le retour de Jean-Bertrand Aristide, en 1994, sous la surveillance des forces d’occupation étatsuniennes et de l’ONU. L’aspiration populaire à la démocratie est alors neutralisée par la coalition de la bourgeoisie compradore haïtienne et les puissances impérialistes. Dans les faits, la population n’a droit qu’à « une démocratie sans participation du demos13 », une démocratie fantoche !

La spoliation se poursuit avec l’application de nouvelles mesures économiques comme la privatisation des industries étatiques, le retrait de l’État de l’économie, le partenariat public-privé et la consécration de la loi suprême du marché. De 1980 à 2010, un cycle de 30 ans de purge économique néolibérale fait suite à deux siècles de saccage et de rançonnage financier. Le séisme de 2010 n’a fait que mettre à nu la catastrophe sociale et humanitaire orchestrée durant cette longue histoire de pillage éhonté.

Décennie 2010 : vers l’invention d’un nouveau modèle de société post-néocolonial

La décennie 2010-2020 est marquée par une importante contestation populaire contre le nouvel ajustement de l’ordre néocolonial. La première manche est enclenchée à la fin du mandat du néo-duvaliériste Michel Martelly. Après avoir dirigé le pays comme un autocrate complètement asservi aux grandes ambassades occidentales et aux agences internationales, Martelly se bute à une grande résistance populaire lorsqu’il essaie, en 2016, de passer le pouvoir à un membre de son parti par le truchement d’élections truquées. Mais l’important appui international et local lui permet de garder le pouvoir en faisant élire son dauphin, Jovenel Moïse, avec moins de 20 % de l’électorat. Pendant ce temps, la gestion calamiteuse des fonds PetroCaribe et la reconstruction post-séisme ont exacerbé le pillage et la spoliation des biens publics. De surcroît, les politiques néolibérales renforcées par les diktats du FMI et de la Banque mondiale ont jeté les masses urbaines et rurales dans une situation de désespoir14.

Une deuxième manche de mobilisation est enclenchée les 6 et 7 juillet 2018 après l’annonce de l’augmentation du prix de l’essence par le gouvernement de Jovenel Moïse. Cette fois-ci, la lutte porte sur des revendications sociales et sur la gouvernance de l’État. Le retrait des mesures sur l’augmentation de l’essence ne suffit pas à calmer l’ardeur des masses qui exigent désormais que l’État rende des comptes sur la gestion des fonds de la reconstruction. La population tend alors à se radicaliser au point de revendiquer un changement de système social et politique. Le rejet du modèle d’État néocolonial apparaît sans équivoque lorsque près d’un million de Haïtiennes et Haïtiens décident de marcher quotidiennement à la grandeur du pays. Cette lutte ouvre la perspective de construction d’un ordre social nouveau qui se démarque de la longue tradition capitaliste coloniale et néocoloniale. Mais cette utopie achoppe à cause de l’entêtement des forces conservatrices du statu quo, tant à l’échelle locale qu’internationale.

Réponse politique du régime à la contestation populaire

La mobilisation populaire n’a pas seulement mis à mal le régime du Parti haïtien Tèt Kale (PHTK), mais elle a également ébranlé les mécanismes d’ajustement et de réajustement de la domination néocoloniale de l’État. L’implication directe des grandes ambassades et des agences transnationales dans le façonnement des institutions haïtiennes a été mise à nu. C’est pourquoi, en dépit de la nature purement démocratique des revendications populaires, les grands médias occidentaux, qui font habituellement l’apologie de la démocratie bourgeoise et du respect des droits de l’homme dans certains pays, ont très peu couvert ces événements en Haïti15.

Avec l’appui des ambassades et des grandes agences internationales comme l’ONU, le gouvernement PHTK a fait le choix de privilégier la terreur pour sortir de l’impasse politique. Englué dans le pillage et la spoliation des biens publics, il s’est révélé incapable de faire preuve d’un minimum de justice et de reddition de comptes16. Face à l’incapacité de la police à exercer la répression, le pouvoir a amorcé un nouveau cycle de répression et d’oppression par l’intermédiaire de « seigneurs de la guerre » ou gangs. En effet, la mobilisation populaire a été progressivement écrasée par la remobilisation d’anciens chefs de gang et par la création de nouveaux gangs en soutien au régime.

Le plan gouvernemental pour casser la mobilisation populaire s’est fait de deux manières. La première, par une stratégie qui a consisté à prendre le contrôle, par le truchement de gangs armés, de territoires et de quartiers populeux dans la région de Port-au-Prince et dans les villes de province. En assiégeant ces lieux, le pouvoir a cherché à empêcher la participation des habitants au mouvement de contestation sociale et politique. La seconde, par une tactique qui a consisté à instaurer la peur, aussi bien dans l’opinion publique que dans les quartiers contrôlés par les sbires du régime. En fait, il s’agissait de discipliner le corps social par l’instauration d’un climat permanent de terreur devenu nécessaire à la survie du régime. C’est pour cette raison que les gangs se sont lancés dans des actes d’horreur spectaculaires à grande échelle. Ils ont mené des raids sanglants dans les quartiers populaires de l’aire métropolitaine, raids qui se sont soldés par plus d’une douzaine de massacres. Les rapports des organismes de droits humains et des agences internationales ont établi que certaines opérations des gangs ont bénéficié de l’active collaboration de hauts cadres du gouvernement et de certaines unités de la Police nationale17. Dans le cas, par exemple, du massacre de La Saline, les rapports de l’ONU et des organismes des droits humains ont documenté la présence de hauts cadres du ministère de l’Intérieur et d’équipements de la police sur le théâtre des opérations, en soutien aux gangs.

Le pouvoir a renforcé également le pouvoir des gangs en leur fournissant beaucoup d’argent ainsi que des munitions. En novembre 2019, le Palais national a envoyé l’émissaire Fritz Jean Louis, ancien secrétaire d’État, auprès des principaux chefs de gangs de la banlieue sud de Port-au-Prince dans le but d’orienter leurs actions, moyennant de fortes sommes d’argent18. Il a aussi rencontré et acheté les services de différents gangs tels que Krisla, Izo et Tilapli.

La logique de consolidation des gangs a atteint son paroxysme lorsque le gouvernement PHTK et ses alliés ont procédé à leur fédération sous le label de « G9, familles et alliés ». Dans son rapport du mois d’octobre 2020, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a salué l’initiative de la fédération des gangs comme un moyen de résoudre le problème de l’insécurité19. De son côté, la Banque interaméricaine de développement a pris l’initiative de développer des projets communautaires dans les quartiers contrôlés par les gangs. Cela sous-entend que la gouvernance par la terreur des gangs n’est pas seulement un choix de l’État haïtien, mais qu’il s’inscrit également dans le programme de l’ONU et des principales agences internationales œuvrant dans le pays.

Le 7 juillet 2021, à la suite de conflits de clans au sein du parti PHTK, le président Jovenel Moïse fut mystérieusement assassiné dans sa résidence par un commando lourdement armé. Certes, cet événement s’est ajouté à la crise politique du pays. Mais l’intervention des puissances internationales, dont les États-Unis, a permis au régime du PHTK et à ses alliés de garder le pouvoir grâce à la gouvernance par la terreur.

Pourtant, le dossier de l’assassinat de Jovenel Moïse fut, paradoxalement, considéré comme une question de sécurité nationale par l’État américain20. La justice étatsunienne s’empara de l’affaire, bien qu’il fut formellement interdit de faire toute la lumière sur les réseaux criminels transnationaux possiblement responsables de cet acte crapuleux. La gestion de l’assassinat et du remplacement de Jovenel Moïse dans l’appareil d’État haïtien ressemblait plus à l’effacement d’un parrain qu’à une enquête sur la mort d’un président de la République. C’est le sens possible de l’imposition d’Ariel Henry au poste de premier ministre par les ambassades occidentales et l’ONU, en dépit de son implication présumée dans le mystérieux assassinat de Jovenel Moïse. Pendant ce temps, les initiatives citoyennes de dialogue pour mener la transition politique ont été tenues en respect au profit des caïds du PHTK et des grandes familles de la bourgeoisie compradore haïtienne.

L’appui inconditionnel de puissances et d’organisations internationales aux dirigeants illégitimes et corrompus au sommet de l’État se poursuit en dépit du fait que des membres du cabinet du premier ministre de facto, Ariel Henry, aient exigé la libération de présumés membres de gangs arrêtés par la police21. Plusieurs membres du gouvernement ont aussi été probablement impliqués dans des actes de kidnapping et de trafic de drogues, dont le ministre de la Justice et le ministre de l’Intérieur22. C’est au prix d’un climat de terreur que l’État néocolonial haïtien se maintient.

Conclusion

En somme, la crise haïtienne a pris l’allure d’une crise de l’État néocolonial haïtien. Les mécanismes régaliens ne sont plus à même de maintenir l’État en selle. L’armée et la police se délitent au point de partager les tâches de gestion et de contrôle du territoire avec des « seigneurs de la guerre » dont le rôle est quasi institutionnalisé. La fédération des gangs, G9, familles et alliés, est devenue le moyen par lequel les pouvoirs publics résistent aux forces populaires contestataires de l’État néocolonial en déclin. Ce plan bénéficie de l’appui des principales ambassades occidentales et des agences internationales. Celles-ci cherchent à légitimer le régime par la multiplication d’appels au dialogue et par la recherche d’un consensus entre les acteurs de la scène haïtienne. Pendant ce temps, les masses urbaines et rurales paient le prix d’un climat de terreur pour avoir revendiqué la fin du règne de l’État néocolonial en Haïti. La violence de la guerre qui oppose les classes dominantes aux classes populaires et rurales se traduit par les centaines de milliers de personnes kidnappées et assassinées. En continuant de soutenir le statu quo, les puissances occidentales, comme les États-Unis et le Canada, ne font que perpétuer une situation déplorable. Elles semblent avoir choisi leur camp.

1 Cet article a été publié dans le numéro 28 de la revue : Nouveaux cahiers du socialisme (NCS) en automne 2022 au Québec. Pour plus de précision, voir le lien suivant : https://www.cahiersdusocialisme.org/ecosocialisme-une-strategie-pour-notre-temps/

2 Doctorant en études urbaines à l’Institut national de la recherche scientifique

3 Selon l’estimation officielle, le tremblement de terre aurait fait plus 220 000 morts et 300 000 blessé·e·s.

4 Plusieurs spécialistes de la société haïtienne soutiennent la thèse selon laquelle une nouvelle phase a été franchie dans le processus de subordination de l’État haïtien aux forces impérialistes. C’est le cas de Darbouze (2022) dans son entrevue dans le no 27 des Nouveaux Cahiers du Socialisme; Lamour (2022) dans l’article suivant : https://www.enquetaction.com/articles/sabine-lamour-les-acquis-du-mouvement-feministe-haitien-hypotheques-par-la-dynamique-politique-de-ces-10-dernieres-annees. Nous avons interprété ce changement comme étant un nième « ajustement de l’État néocolonial haïtien ». Voir aussi : Renel Exentus, « Palestine – Haïti : du terrorisme colonial à la domination néocoloniale », AlterPresse, 17 mai 2022, <https://www.alterpresse.org/spip.php?article28310>.

5 L’imposition de Ariel Henry au poste de premier ministre fait partie de cette longue tradition d’ingérence des puissances occidentales dans les affaires internes d’Haïti. Pour plus de détails, voir Robenson Geffrard, « Sous la pression internationale, Haïti changera de gouvernement », Le Devoir, 20 juillet 2021 et Ginette Chérubin, Le ventre pourri de la bête immonde, Port-au-Prince, Université d’État d’Haïti, 2014.

6 La dénonciation de cet état de fait par la démission, à la fin du mois de septembre 2021, de l’envoyé spécial pour Haïti vient du cœur même de l’empire étatsunien. « Mais, par-dessus tout, ce que nos amis haïtiens veulent vraiment, et ce dont ils ont besoin, c’est l’opportunité de tracer leur propre voie, sans marionnettes internationales et sans candidats privilégiés mais avec un véritable soutien pour cette voie. Je ne crois pas qu’Haïti puisse jouir de la stabilité tant que ses citoyens n’auront pas la dignité de vraiment choisir leurs propres dirigeants de manière juste et acceptable. » Voir : « La lettre de démission de Daniel Foote au Secrétaire d’État américain Anthony Blinken », Le Projet d’information Canada-Haïti, septembre-octobre 2021, <https://canada-haiti.ca/fr/content/la-lettre-de-demission-de-daniel-foote-au-secretaire-detat-americain-anthony-blinken>.

7 Il est important de souligner aussi que ces classes dominantes ont été acculées, à l’interne, par les revendications des nouveaux « libres » dans le but de casser définitivement le système plantationnaire. En acceptant de payer l’indemnité, ces classes dominantes ont utilisé l’appui des puissances pour mieux mater les nouveaux libres. Ils ont accepté de partager avec la bourgeoisie française la plus-value extorquée du travail des cultivateurs.

8 Plusieurs travaux de recherche, en Haïti et ailleurs, ont porté sur cette question de la dette de l’indépendance, mais la presse occidentale ne l’a presque pas abordée. Au cours du mois de mai 2022, le New York Times a publié plusieurs articles sur le sujet. On a eu l’impression que la presse américaine venait de découvrir la barbarie typique de la domination occidentale. Voir : Eric Nagourney, « 6 infos à retenir sur les réparations versées par Haïti à la France », New York Times, 20 mai 2022, <www.nytimes.com/fr/2022/05/20/world/haiti-france-reparations-aristide.html> ; Gusti-Klara Gaillard, « Haïti : Il y a 196 ans, la dette de l’indépendance », CADTM international, 27 août 2021, <www.cadtm.org/Haiti-Il-y-a-196-ans-la-dette-de-l-independance>.

9 Frantz-Voltaire, Pouvoir noir en Haïti, Montréal, Éditions CIDIHCA, 1988.

10 Suzy Castor, L’occupation américaine, Port-au-Prince, CRESFED, 1988.

11 Le desserrement de l’étau de la dette a été de très courte durée. Après le coup d’État de Magloire contre le gouvernement d’Estimé, en 1950, l’État reprend progressivement le chemin de l’endettement. Pour plus de détails, voir Gérard Pierre-Charles, L’économie haïtienne et sa voie de développement, Port-au-Prince, Éd. Henri Deschamps, 1993.

12 Les rapports de la Banque mondiale présentent ordinairement le développement social et économique d’Haïti à travers des catégories macroéconomiques. En 2021, la BM souligne que « le pays a un PIB par habitant de 1 815 dollars US, le plus bas en Amérique latine et aux Caraïbes, alors que moins d’un cinquième de la moyenne des pays de la région a un PIB de 15 092 dollars US. Selon l’indice de développement humain de l’ONU, en 2020, Haïti a été classé 170e sur 189 pays., <www.banquemondiale.org/fr/country/haiti/overview>. De notre point de vue, le niveau de sous-développement peut également s’expliquer par le fait que le pays dépend largement de l’extérieur pour combler ses besoins de de base. Il ne produit même pas les principaux outils rudimentaires pour son économie de subsistance. Cela ne peut être compris que si l’on prend en compte la longue histoire de pillage et de rançonnage du pays.

13 Nous nous sommes inspiré de l’expression « démocratie néolibérale assistée » de Franklin Midi, « Transition démocratique en Haïti ! – mais démocratie dans quel état ? », Chemins critiques, vol. 6, n° 1, 2017.

14 Au cours de la décennie 2010, plus d’un million d’Haïtiens et d’Haïtiennes ont fui leur pays. Accablés par le désespoir, ils se sont rendus dans plusieurs pays d’Amérique latine comme le Brésil, le Chili, etc. Voir Alain Saint-Victor et Renel Exentus, « Haïti : migration et surexploitation, Nouveaux Cahiers du socialisme, n° 27, hiver 2022.

15 À la même période, la grande presse a diffusé l’information sur la mobilisation dite prodémocratie à Hong Kong, alors que les événements en Haïti furent complètement ignorés.

16 Un mouvement de contestation sociale contre la corruption a eu lieu à la même période en République dominicaine. En dépit de sa domination, l’État dominicain a donné une réponse différente aux revendications populaires. Il a mis en œuvre des procès de certains dignitaires impliqués dans la corruption. Cette parodie de justice a permis de créer l’illusion que les institutions démocratiques bourgeoises fonctionnaient bien.

17 Rapports du Réseau National de Défense des Droits Humains – RNDDH, 2018, 2019, 2022 à travers le site du RNDDH : <https://web.rnddh.org/> ; La Saline : justice pour les victimes. L’État a l’obligation de protéger tous les citoyens, Rapport 2019 de la MINUJUSTH et du HCDH, Port-au-Prince, <https://minujusth.unmissions.org/sites/default/files/minujusth_hcdh_rapport_la_saline_1.pdf>.

18 Au cours de la campagne de distribution d’argent, Fritz Jean Louis, émissaire du Palais national, a été blessé par le chef de gang Tipli pour avoir financé des gangs ennemis. « Haïti/Activités gangs : Fritz Jean-Louis, émissaire du Palais, blessé par balles lors de négociations avec “Ti Lapli” », Gazette Haïti, 24 novembre 2019. Pour plus de détails, <https://www.gazettehaiti.com/node/761>.

19 Regroupement des Haïtiens de Montréal contre l’occupation d’Haïti (REHMONCO), « Haïti : les dessous de la fédération des gangs armées », Presse-toi à gauche, 1er septembre 2020.

20 « Haiti-Meurtre de Jovenel Moïse : l’enquête criminelle américaine transformée en une affaire de sécurité nationale, révèle le journal Miami Herald », AlterPresse, 28 avril 2022, <www.alterpresse.org/spip.php?article28245>.

21 « Haïti-Justice : le RNDHH a documenté la présence de proches d’Ariel Henry dans la libération de membres du gang 400 Mawoso arrêtés par la police », AlterPresse, 21 mars 2022, <www.alterpresse.org/spip.php?article28106>.

22 Maria Abi Habib, « Le président haïtien dressait une liste de narco-trafiquants. Ses tueurs l’ont saisie », The New Yok Times, 12 décembre 2021, <www.nytimes.com/fr/2021/12/12/world/americas/haiti-jovenel-trafic-drogue.html> ; « Kidnapping : le ministre de l’Intérieur Liszt Quitel a ordonné le kidnapping du pasteur Jean Ferret Michel, selon le RNDDH », Gazette Haïti, 21 octobre 2020, <www.gazettehaiti.com/index.php/node/5164>.