Nos responsabilités face à ces monstres chimiques de nos pays devenus

— Par Jacky Dahomay —

Nous profitons de ce premier mai 2013 pour rédiger cette réflexion que nous livrons au débat.  Le grave problème que nous posons est celui-ci : comment nous, Antillais, avons-nous pu laisser ainsi se produire une telle catastrophe écologique et sanitaire sur des territoires légués par nos aïeux ? Les pratiques culturales à base de pesticides, notamment dans la banane, mais pas  seulement, ont donné la  situation dramatique d’aujourd’hui. Qui en est responsable ?

Les pêcheurs accusent l’Etat, et ils ont raison. L’Etat  savait que la chlordécone  était  un produit dangereux qui se mélangeait à d’autres produits nocifs déjà utilisés auparavant. Comment expliquer qu’il ait pu autoriser l’usage de ce produit  alors qu’il l’avait interdit, même tardivement,  sur le territoire français ? Il est clair que cela présuppose de la part de l’Etat une vision des peuples d’Outre-mer. Ceux-ci sont malgré toutes les formulations de principes  républicains, posés comme étant quelque part « extérieurs » au  « peuple »français. Ceci peut sembler paradoxal car depuis  1848, le  droit de  vote est accordé aux anciens esclaves (hommes) et la loi de départementalisation de 1946 accomplit une assimilation juridique et administrative. Si donc paradoxe il y a, il faut le  chercher dans le mode d’abolition de 1848. A cette date, la république se présente, dans sa générosité, comme celle  qui « octroie » des droits. Or, en France, la république s’est instaurée, selon le principe du contrat social, à partir du postulat que chaque citoyen possède des droits intrinsèques, inscrits dans la personne  humaine. La problématique des droits « octroyés » est donc déjà, dès l’origine, une mutilation dans la subjectivité même des Noirs car c’est comme si ce qui pouvait les constituer comme sujets, la propriété de droits intrinsèques constitutifs de leur humanité, leur était venu de l’extérieur. A cela il faut ajouter que les planteurs, anciens maîtres d’esclaves, ont été indemnisés ce qui affaiblit leur responsabilité morale dans la pratique inhumaine de la domination esclavagiste. De surcroit, après l’abolition de l’esclavage s’intensifie une idéologie dominante profondément aliénante fondée sur une  hiérarchie des couleurs, les corps, dans leur présentation phénotypique, disant l’infériorité sociale ou son contraire ce qui engendre des modes constants d’objectivation de l’autre. L’aliénation et les crises de l’identité que cela peut provoquer dans les élaborations subjectives ont maintes fois été soulignées. Mais on n’insiste pas assez sur ce cela peut donner comme difficultés dans la construction subjective eu égard notamment à la responsabilité.

La responsabilité de  l’Etat s’établit ainsi mais il faut ajouter le fait que dès l’époque de l’esclavage, les pratiques administratives dans nos  îles ont toujours été, jusqu’à aujourd’hui, dans la ruse avec le droit, ce que Jean-François Niort a bien démontré dans sa  conférence « Du Code noir au chlordécone ». Jusqu’à aujourd’hui, parce que l’an dernier encore, la Daaf n’a guère contrôlé les planteurs, les  laissant disséminer en toute impunité du banol pur sur les plantations alors  que cela est tout à faire contraire à la règle ! Toutes ces pratiques héritées de l’époque coloniale ont engendré ce qu’on peut appeler une « colonialité » du pouvoir, malgré les principes républicains affichés. Elles sont productives d’un mode particulier de subjectivité. Nous voulons dire par là qu’il y a inévitablement des défaillances dans la construction de l’identité subjective, aussi bien au plan individuel qu’au  plan collectif. S’il  faut ajouter à cela comme  le fait remarquer notre amie anthropologue Stéphanie Mulot, que la dominance dans la structure familiale matrifocale de la mère phallique, engendre une difficulté pour les  fils à assumer leur identité d’homme et de père, nous serions véritablement entravés. Il y a sans doute un lien à faire entre ces données psychologiques et notre situation collective car la famille est à la  base  de notre société. Ainsi, la structure familiale dominante avec comme figure majeure la mère phallique, entraîne incontestablement une difficulté à intégrer l’instance propre  de la loi, une difficulté surtout pour les  fils à se détacher de la mère et à se construire comme sujets responsables. Cela a nécessairement des conséquences collectives même s’il faut se méfier du passage de considérations psychanalytiques aux problèmes collectifs.

Mais quel rapport demandera-t-on, à juste titre,  avec l’usage dramatique des pesticides dans l’agriculture aux Antilles et notre responsabilité à cet égard ? Aujourd’hui, notamment après les travaux de Michel Foucault, on peut admettre que les modes de subjectivation sont souvent un produit social et historique. Il faudrait donc interroger plus profondément comment la conscience collective s’est formée après ces siècles d’esclavage et de colonisation. Non que notre passé soit notre code et que nous serions à tout jamais déterminés à être de telle ou telle manière. La liberté est le pouvoir de s’arracher aux déterminismes historiques. Mais de même  qu’un sujet individuel peut-être entravé dans sa liberté par des déterminismes  psychiques inconscients, un sujet ou une conscience  collective doit appréhender ce qui du passé peut affaiblir son action présente. Nous formulons l’hypothèse (ceci est matière à débat) que ces travers créés aussi bien dans la conscience collective que dans les subjectivités individuelles entraînent des formes d’irresponsabilité quant à la projection dans le temps et dans l’espace. Dans le temps cela donne une difficulté à se projeter dans le futur, à maîtriser le processus historique. Dans l’espace, cela produit  un rapport spécifique au territoire. Au fond, les vrais  habitants durant toute la période de l’esclavage, sont les colons. Seuls eux maîtrisent l’espace. Ils dominent totalement l’espace de l’habitation. La  vie  elle-même y est réglée selon la loi  du colon. Le maître est celui qui domine des corps et la vie des esclaves. On pourrait même se demander s’il n’y avait pas là une  forme  de  biopolitique car le pouvoir doit gérer la vie ou plutôt la survie des esclaves. L’espace que travaille l’esclave  ne  lui appartient pas, il  n’en est pas responsable. La dialectique du maître et de l’esclave selon le schéma hégélien a du mal à opérer  ici car l’esclave est victime  d’une triple aliénation : il ne jouit pas des produits de son travail, bien sûr, mais de surcroit il n’a aucune maîtrise sur l’espace, l’environnement « plantationnaire », ni sur l’ensemble des conditions qui déterminent sa vie. Celle-ci ne lui appartient pas.

On pourrait dire que c’est peut-être un moule dont nous sommes sortis   mais que l’esclavage étant aboli depuis 1848, nous avons fait bien du chemin depuis car nous ne pouvons pas être esclave de l’esclavage. C’est vrai car la  vie n’est pas  que répétition  du passé mais aussi création de nouveauté. Toutefois, les constitutions culturelles ou anthropologiques  évoluent très lentement. On le voit par exemple avec la problématique de la structure familiale issue de cette tradition qui taraude gravement, encore aujourd’hui, les  rapports hommes/femmes, parents/enfants. Mais ce qui nous semble important, c’est que la sortie de l’esclavage n’est pas la fin  de ce que nous appelons le  « système plantationnaire ». Même l’accès à la petite propriété reste tributaire de l’économie de la plantation. Celle-ci, dès l’origine, est de nature productiviste et va donc s’ouvrir résolument à partir du XX° siècle à l’usage intensif de  produits chimiques. On pourrait même dire que l’agriculture capitaliste s’est développée d’abord dans les  colonies d’Amérique exploitées par l’Europe. Le salariat n’étant pas encore développé au XVII°   siècle, à l’heure du capitalisme mercantile, et le servage ne correspondant pas une agriculture intensive destinée à l’exportation, la solution qui a été trouvée comme mode d’exploitation dans le travail a été l’esclavage. Cela en dit long sur la capacité du capitalisme à s’adapter à des  formes d’exploitations diverses. Le néolibéralisme futur le prouvera.

Les planteurs et  les usiniers  (quoiqu’il y ait ici une différence entre Guadeloupe et Martinique, cette dernière n’ayant pas connu l’abolition de 1794) dominent  la vie économique des îles, mais  aussi exercent  une  domination  politique en alliance avec l’Etat. Au total, ces pratiques  étatiques et cette domination des gros planteurs sur l’ensemble de la vie des habitants, jointes à ces formes  culturelles et anthropologiques que nous avons mentionnées, ont engendré des modes de  subjectivation présentant de graves faiblesses  quant à la responsabilité collective y compris donc face à tout  ce qui a  trait à l’environnement. En conséquence, le drame de la chlordécone et l’usage d’autres produits toxiques qui font de nos pays des « monstres chimiques » pour reprendre l’expression d’un article paru récemment dans le journal  Le Monde, est souvent perçu comme une catastrophe naturelle, comme les cyclones ou les tremblements de terre et non comme une calamité produite par la pratique même des  hommes, pratique dont ils seraient responsables. Il est remarquable de constater comment les protestations contre l’usage  de la chlordécone ont été faibles entre les  années 1980-1990 et même après et ceux qui dénonçaient de tels dangers étaient très isolés (certains universitaires, quelques médecins, quelques associations de l’agriculture etc..) mais ni la majorité des politiques (fussent-ils de gauche ou d’extrême gauche) ni l’ensemble de la société civile, n’ont opposé une protestation conséquente contre la  tragédie chimique qui se tramait. Comment expliquer la chose ? Car il y a bien là ce qui relève d’une responsabilité collective !

Nous voudrions ici formuler quelques hypothèses, notre pensée modestement essayant de frayer quelques chemins, comme les traces que font nos paysans dans les forêts étant entendu que nous prenons malheureusement le risque que de tels chemins soient ce que Heidegger nomme Holzwege, des « chemins qui ne mènent nulle part ». Deux ordres de raisons peuvent expliquer la chose : des raisons historiques d’une part, des problématiques contemporaines d’autre part.

-Concernant le premier point. Que retenir des luttes sociales et politiques qui se développent dès les lendemains de l’abolition de l’esclavage jusqu’au milieu du XX° siècle ? Les choses sont très complexes et sont l’objet d’étude des historiens. Nous essayons de voir s’il n’y a pas quelques tendances permettant du  justifier nos propos prenant le  risque que cette schématisation soit une simplification. Concernant les luttes sociales, elles s’intègrent surtout dans le système de la plantation et de son mode de production (luttes concernant les salaires, les conditions de travail, le prix de la tonne  de canne). Les luttes plus « sociétales » visent l’égalité des droits avec la métropole. Luttes intégrationnistes qui aboutissent à la loi de départementalisation de 1946. Toutes légitimes que soient ces combats menés, ils concernent rarement  le territoire, sa gestion, ni la sortie du système plantationnaire. Il est significatif de noter qu’en Guadeloupe, les leaders historiques  du nouveau mouvement  syndical qui va naître dans les années 1970 avec la création de l’UTA, ont d’abord cherché à s’implanter dans une paysannerie qui leur paraissait hors système plantationnaire, celle  de la Côte-sous-le-vent. Mais ils ont été très vite été ramenés aux conditions sociales désastreuses des  ouvriers agricoles de Sainte-Rose dépendant de l’usine Bonne-Mère, et  ainsi est née l’UTA et ensuite l’UPG. Mais quelle que soient la légitimité de toutes ces  luttes, elles ont toujours eu du mal à s’articuler avec la constitution d’une subjectivité collective conséquente, malgré  les postulats affichés. L’évolution de l’UGTG, créée dans  la lignée de l’UTA et de l’UPG est significative. On a l’impression que plus l’UGTG se développait et montait  en puissance, plus elle s’éloignait  de l’intérêt collectif et la brouille produite l’an dernier entre l’UPG et l’UGTG est significative car l’UPG semble vouloir penser une agriculture hors du système plantationnaire et  est, à notre connaissance, la seule organisation syndicale à avoir intenté un procès contre l’Etat concernant la chlordécone, procès qui devrait se dérouler dans les mois à venir. Le problème est le suivant : pratiquement tous ces syndicats affichent une volonté de défense de l’intérêt collectif. Mais les  pratiques réelles ou quotidiennes des luttes contredisent souvent ces principes. Il se pourrait que la raison soit à chercher, à leur décharge, dans toutes les insuffisances que nous avons mentionnées quant à la constitution d’une subjectivité, individuelle aussi bien que collective,   chez les travailleurs comme dans le reste de la population. On en vient même à se demander si les tendances autoritaristes et les méthodes musclées propres à certains dirigeants politiques et syndicalistes n’ont pas partie liée avec la défaillance des pères dans leur propre constitution subjective.

Concernant la classe politique : elle naît essentiellement après 1848. Elle se divise en gros en deux camps, les défenseurs des gros planteurs et des usiniers d’un côté, les défenseurs de la « masse » de l’autre. Mais cette « masse » a  du mal à se constituer en société civile malgré quelques tentatives surtout mutualistes. En conséquence, les pratiques de ceux qui se réclament du « socialisme » consistent à s’appuyer sur les luttes sociales pour avoir une crédibilité et de l’autre à se poser comme interlocuteurs du pouvoir central. Les pratiques politiques sont essentiellement intégrationnistes, administratives et clientélistes. Clientélistes parce que la  sortie de l’esclavage crée un lien social à partir de la famille, ce qui est tout à fait explicable car les esclaves étaient exclus de la société civile. En 1848, date d’instauration de la II° République, il y a une différence très grande entre la société française et nos sociétés antillaises. L’évolution politique de la France de la révolution de 1789 à 1848 est très étroitement liée aux transformations de la société civile, d’où les théorisations diverses du Tiers-état. C’est à partir de la société civile que s’élaborent les diverses théories du pouvoir et de l’Etat. Les théories libérales (surtout anglo-écossaises), puis celles de Hegel et celles de Marx ensuite, sont incompréhensibles sans de telles références à ces débats théoriques qui travaillent l’Europe.  Or, la société civile est rigoureusement distincte de la  famille, elle n’est pas un ensemble de familles. Elle postule l’existence d’individus, sujets citoyens distincts de la communauté familiale. Lorsque donc intervient l’abolition de 1848, il n’existe pas à proprement parler de société civile antillaise comprenant l’ensemble  de la population. C’est donc à partir de la famille que les anciens esclaves vont chercher à constituer le lien social. Les Noirs sont propulsés du statut d’esclaves à celui de  citoyens. Cette première façon d’habiter la  citoyenneté va déterminer les luttes politiques à venir. Les leaders (Légitimus par exemple), ont affaire à « la masse » et non à des classes sociales distribuées en une société civile. Cela dit, contrairement à ce  que l’on pourrait penser, il y a bien eu une société civile dans les colonies d’Amérique. Mais elle était essentiellement celle des planteurs colons. Ceci est très important car les premières élaborations de théories de la société civile viennent de gens liés ou issus de cette catégorie sociale, et les théories libérales élaborées notamment en Angleterre sont explicables  aussi à partir de ce fait. Un philosophe politique comme Locke (un des fondateurs de la philosophie politique moderne) est étroitement lié aux pratiques coloniales. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre leur opposition au pouvoir  absolutiste royal, contre ce  qu’ils appellent le « despotisme ministériel ». Leur opposition au Code noir est celle de leurs revendications contre un pouvoir royal, fondé sur une conception absolutiste du pouvoir centralisé, gérant l’économie selon la théorie mercantile, alors que nous sommes  déjà dans les colonies dans un type d’économie et des préoccupations de gestion de la société déjà en avance par rapport à cette théorie mercantile. C’est déjà, avant la lettre, du biopouvoir caractéristique du néolibéralisme à venir. Nous y reviendrons. (On pourrait aussi se demander si le Code Noir n’est pas le premier texte juridique biopolitique dans l’histoire du pouvoir en Occident). Pour revenir à nos politiques, enfermés qu’ils sont dans des logiques administratives et clientélistes (le clan c’est la  famille élargie et c’est en fonction de cela que l’on va voter) il est rare que pour eux la politique puisse se hisser à la  hauteur d’un destin collectif. Le PCG est un cas à part et nous n’avons pas le temps d’en discuter ici.  Il se pourrait  que les  militants d’extrême gauche de notre génération aient commis une injustice historique dans leur critique du Parti Communiste Guadeloupéen, quelles que soient bien sûr les critiques justifiées que l’on peut adresser à ce  parti.

-Concernant maintenant la situation actuelle, elle est plus que dramatique : nos pays sont devenus des « monstres  chimiques », nos poissons sont empoisonnés, on interdit la pêche aux langoustes, aux ouassous et même, dans certaines régions, aux crabes de terre. Nos nappes phréatiques sont hyper polluées. Les hôpitaux sont des usines à opérer du cancer de la prostate. Tomates, concombres,  racines et  autres produits de la terre, sont non consommables. La Martinique doit importer ses racines. Et malgré  tout, les Préfets ont le culot d’autoriser la reprise de l’épandage aérien pour un an dans nos deux pays, sous prétexte des intérêts économiques. Ceci contredit les directives européennes car la pratique de l’épandage aérien est  interdite sauf dérogations spéciales, limitées dans le  temps. Or les Préfets de nos îles contredisent la loi car nous avons désormais affaire à des dérogations permanentes, renouvelables tous les ans. C’est un véritable scandale car l’esprit de la loi est totalement nié, obéissant ainsi à  des pratiques datant du Code Noir! Face à cela, la classe politique dans son ensemble n’élève aucune protestation forte. Les groupes politiques d’extrême gauche ou nationalistes condamnent mais n’entreprennent aucune action déterminante laissant nos collectifs, en Guadeloupe et en Martinique, se débrouiller tout seuls, comme si nous défendions des intérêts particuliers. Tous se focalisent sur la  question de l’évolution institutionnelle, alors que la population s’en moque royalement. Jamais divorce entre le peuple et ses élus n’a été aussi prononcé. Dans le même temps, nous assistons à une sorte de délitement du lien social. La violence se développe, chez les jeunes c’est vrai, mais aussi dans les familles, dans les rapports hommes/femmes. Parents et enseignants ont perdu toute autorité. Avec la crise qui s’aggrave, l’avenir s’avère lourd de dangers et l’angoisse taraude les individus. Nous sommes entrés dans une ère de dépression, de désespérance. Face à cela, que faisons-nous ?

Question mal posée. Disons plutôt : qu’est-ce qui nous bloque dans notre action ? Question très difficile mais il faut bien essayer de tracer quelques voies. Nous avançons qu’il nous faut chercher dans deux ordres de raisons :1- une connaissance insuffisante de ce que le passé nous lègue comme héritage anthropologique et politique et 2- une déroute face au nouveau mode du capitalisme, le néolibéralisme, lequel rend les théories traditionnelles de la libération quelque peu obsolètes ou du moins insuffisantes.

1-Concernant le premier point, nous avons déjà proposé quelques tentatives d’explications, insuffisantes bien sûr, mais ici la recherche doit être collective. Nous ne doutons pas  que les études que poursuivent historiens, sociologues, anthropologues, psychanalystes, puissent nous éclairer. L’important –du moins nous semble-t-il- est que nous modifions notre rapport au passé. Car ce qui domine pour l’instant est un rapport victimaire au passé. On entretient ainsi la souffrance comme identité. Le passé esclavagiste est repris sans cesse comme  aliment de cette souffrance identitaire. Nous sommes d’éternels « victimes » et nous croyons être heureux ainsi surtout chez des gens de la classe moyenne dont les conditions de vie sont tout de même aisées. Cela nous dédouane, nous infantilise et nous pouvons continuer en toute innocence, dans la classe moyenne, à organiser des concours de consommation de champagne. La culture se réduit à nos mès et labitid an nou comme  si nos « moeurs et habitudes » étaient le tout de notre identité et constituaient intrinsèquement un idéal. Cela n’a rien de libérateur et ne peut qu’entretenir les défaillances de la construction subjective dont nous avons parlé auparavant. On  a du mal à comprendre que l’identité est singularité. Une sorte de pulsion égalitaire négative nous fait détester toute singularité. Tout individu qui se singularise d’une manière ou d’une autre est perçu comme traitre à la  communauté. Une société pourtant est riche lorsqu’elle est mise en relations de singularités affirmées. Surtout, on oublie que la culture est travail sur soi, émancipation. Cet oubli donne des productions culturelles et artistiques d’une médiocrité désarmante, à part bien sûr quelques exceptions. Et nous avons des enseignants qui refusent d’être de véritables maîtres chargés d’instruire. On confond informer et instruire. On rêve d’être remplacés par des ordinateurs –en continuant de toucher nos salaires bien sûr. On prend des attitudes autoritaristes pour de l’autorité. Ici, un chef d’établissement fait appel à la justice parce qu’un élève porte une insigne d’un groupe (Rebelles). Là un inspecteur pense que son rôle est d’obliger des enseignants à appliquer des règles pédagogiques sans cesse  changeantes et contestables, comme si l’enseignant n’était pas responsable de sa propre pédagogie. Un véritable maître a de l’autorité parce qu’il n’est que le représentant dans la classe d’un savoir ou des principes de justice  qui le transcendent. Mais le  petit chef croit que toute l’autorité vient de sa propre personne ! Bref, alors que nos sociétés antillaises pourraient connaître, compte-tenu de la particularité de leur situation, un véritable  espace pour de nouvelles Lumières, nous nous perdons dans l’obscurité de dérives identitaires ne nous permettant pas d’être véritablement responsables   de notre destinée. Seule la connaissance réelle  du passé peut nous permettre  de nous en libérer.

2-Si nous avons fait retour sur le passé pour mieux comprendre ce qui détermine ce qu’on pourrait appeler notre  constitution anthropologique et culturelle expliquant certaines défaillances dans la formation de la subjectivité tant individuelle que collective, produisant des formes d’irresponsabilité   quant à nos territoires et à leur devenir, on ne peut en rester là. Notre passé n’étant pas notre code, l’action est là pour produire du nouveau. Qu’est-ce donc qui peut bloquer aujourd’hui cette action collective ? Cela peut paraître paradoxal car la Guadeloupe, par exemple, se caractérise par des luttes sociales intenses. S’il y a quelque chose que nous maîtrisons assez bien, c’est l’art de la grève. Il se pourrait même que nous battions le record mondial. Or, depuis le XIX° siècle,  les luttes sociales, si elles ont permis une amélioration des salaires et des conditions de travail des travailleurs, elles ont rarement eu des conséquences notables sur l’ensemble de la société, c’est-à-dire que le passage des luttes sociales aux  luttes politiques a toujours été un saut décevant. Le dernier grand mouvement social mené par le LKP en est un exemple flagrant.

Mais laissons le passé pour le présent. Qu’est-ce qui entrave aujourd’hui l’action collective ? Nous formulons l’hypothèse que ce qui bloque c’est que les dirigeants des organisations syndicales et politiques (motrices du mouvement  social) sont encore mus par des  idéologiques politiques datant de la première moitié du XX° siècle, et que le  passage du capitalisme libéral classique au néolibéralisme a été mal  appréhendé. Expliquons-nous !

Il  est  clair qu’il y a une  évolution  du capitalisme, de la  théorie mercantile du XVII° siècle, de la théorie des physiocrates du XVIII° au libéralisme classique des XIX° et XX° siècles. Mais la fin  du XX° donne naissance au néolibéralisme. Selon Michel Foucault (cf. Naissance de la  biopolitique. Seuil) à partir du XIX° deux voies s’ouvrent en Europe : 1- Ce qu’il appelle « la voie  révolutionnaire » Selon cette conception, les limites de l’Etat doivent être cherchées dans le Droits de l’homme. La loi est l’expression de la volonté générale. 2- L’autre voie qui ne parle  plus de droit mais de stratégie gouvernementale. On s’appuie essentiellement sur l’économie nouvelle et la loi est  conçue comme l’effet d’une transaction. La liberté n’est plus pensée à partir de la possession de droits mais à partir de l’indépendance des gouvernés. C’est le libéralisme européen. C’est l’échange et le marché, donc l’intérêt, qui sont le moteur de la société. L’Europe va donc  procéder à une juridification du monde à partir de la logique des intérêts. La limitation du pouvoir de l’Etat doit venir du marché et la logique des intérêts est conçue comme une loi de  la nature.

Après la seconde guerre mondiale naît en Allemagne une nouvelle théorie, l’ordolibéralisme qui modifie complètement le libéralisme  classique. La liberté du marché n’est pas simplement ce qui donne une limite à l’Etat. Au contraire, il  doit  être le principe organisateur de l’Etat. C’est l’Etat qui devient sous surveillance du marché plutôt qu’un marché sous surveillance de l’Etat. Un tel principe pose le  marché comme organisateur de toute la vie sociale et politique. Le néolibéralisme qui suit affirme que l’essentiel du marché n’est pas dans l’échange, il est dans la  concurrence. Il faut donc abandonner la théorie du « laissez-faire » du libéralisme classique trop proche encore d’une théorie  naturaliste. La concurrence est un objectif à atteindre, ce n’est pas une donnée naturelle cela doit donc entraîner une politique totalement active. Il faut gouverner pour le marché. En agriculture par  exemple, on va s’occuper de choses comme la population, les techniques, l’apprentissage et l’éducation, le régime juridique, la disponibilité des sols, le climat, autant de choses qui ne relevaient pas de l’économie. Les néolibéraux veulent une « politique de société » et développe une politique sociale individuelle opposée à a politique sociale socialiste. Si l’individu est au chômage, c’est une transition dont il est responsable. Le principe organisateur de la société est donc la concurrence et il s’agit de faire de l’individu « l’homme de l’entreprise ». L’entreprise devient la puissance informatrice de toute la société. Si nous admettons ces analyses de Michel Foucault, c’est comme si avec le néolibéralisme, on assistait à une forme de biopouvoir, prétendant régir l’ensemble de la  vie humaine. Les techniques évoluant sans cesse deviennent le moteur de  la concurrence et de la vie humaine. En gros, il s’agit de produire un autre type de subjectivité faisant de l’individu essentiellement un consommateur. Jean-Claude Liaudet dans son livre L’impasse narcissique du libéralisme, analyse ces changements dans la  subjectivité. Ce que nous retenons de tout ceci c’est  que la concurrence et le développement technoscientifique deviennent le fondement de la vie, de la vie  de l’homme comme sujet. Un sujet qui ne peut maîtriser la concurrence car celle-ci est entachée d’ « invisibilité ». La théorie de la « main invisible » d’Adam Smith ne renvoie pas à une puissance supérieure ou transcendante obscure. L’invisibilité ici signifie que l’ensemble de l’activité économique échappe à la maîtrise d’un savoir, tant cela renvoie à une contingence et une complexité infinie. L’homme devient un sujet qui n’est plus maître des nouvelles technologies  qui évoluent à un rythme incroyable en modifiant sans cesse la subjectivité qui y devient dépendante. Cette invisibilité  dit Foucault entraîne que le bien collectif ne peut être poursuivi. Il ne doit pas être visé, selon les néolibéraux, car il ne peut être calculé à l’intérieur d’une rationalité économique. L’homme économique (homo oeconomicus) est celui qui accepte la réalité. C’est le  ministre Lurel par exemple affirmant que nos conditions naturelles ou géographiques imposent un type  d’agriculture nécessitant l’usage de pesticides. Mais n’est-ce pas l’ensemble des ministres socialistes qui sont devenus des « hommes  économiques » ? Une telle conception disqualifie totalement le souverain politique et son unité totalisante en vue du bien collectif. On s’est gravement éloigné des théories socialistes. Le premier parti socialiste d’Europe à s’être rangé sous la bannière du néolibéralisme a été le SPD allemand.

Autre chose, le néolibéralisme transforme l’analyse classique du travail. Alors que depuis Adam Smith, le travail était analysé en termes quantitatifs, en temps de travail, ce à partir de quoi Marx a tiré son analyse de l’exploitation, aujourd’hui, le néolibéralisme pense le travail en termes qualitatifs. Le travail ne peut être séparé de l’individu qui le porte. Le travail étant posé comme entreprise de sa propre vie, l’individu en est donc totalement responsable. On peut donc le  traiter en termes  de capital humain. Il y a donc des éléments innés et des éléments acquis. Concernant le premier point, on va  donc faire appel à a  génétique. Et là les  choses graves commencent car on va chercher comment améliorer le capital génétique humain. Ce pouvoir biopolitique qui désormais s’affirme est lourd de dangers. Les tests d’ADN rentrent dans cette logique et le rêve des lobbies des laboratoires pharmaceutique est de disposer de l’ensemble de l’ADN de la population. Tout est prétexte donc pour procéder à des tests ADN.  Le refus des syndicalistes guadeloupéens de se laisser faire de tels  tests est tout  à fait légitime d’autant plus  qu’on profite pour criminaliser des militants syndicaux. Allons donc plus loin. Les conflits opposant partisans et adversaires du « mariage pour tous », toute légitime que soit la revendication des droits des homosexuels, cachent en même temps autre chose : la volonté de développer la procréation médicalement assistée. Là il y a un marché juteux à exploiter. Il y a donc un lien à faire, dans la domination néolibérale actuelle comme biopouvoir, entre les formes actuelles de la domination des travailleurs et la nouvelle gestion de l’agriculture, de l’élevage, et de la nourriture mondiale, sous domination de Monsanto par exemple. Il s’agit de faire en sorte que l’ensemble  de la vie humaine, dans tous ses aspects y compris dans la structure familiale, soit régie sous le mode de l’entreprise.

Ces analyses sont rapides et il  ne peut en être autrement dans les limites de  ce texte que nous vous  communiquons. Reste à savoir maintenant en quoi ces modifications introduites par le néolibéralisme jouent un rôle dans les  luttes sociales et politiques. Précisons tout de même  que cela concerne l’ensemble de la planète et pas seulement les petits pays que nous sommes. Les impasses actuelles du mouvement ouvrier sont mondiales.    Les changements dans les modalités du pouvoir d’Etat et des institutions, de l’exploitation du prolétariat, de la domination générale du système néolibéral sur les populations, de la domination idéologique qui est maintenant bio-idéologique, rendent obsolètes bien des formes traditionnelles de luttes pour la libération. Plus grave : des combats qui eussent pu passer pour émancipateurs sont facilement intégrés dans la logique néolibérale. Pensons au  mot d’ordre « il est interdit d’interdire, jouissons sans entraves » que nous crions allégrement en 1968, qui n’est rien d’autre, avec un tel déni de la loi, qu’une invitation à une perversion narcissique allant dans le sens de la fabrication d’une subjectivité néolibérale. C’est toute l’idéologie du « progrès » qui devient, à bien des égards, suspecte.

Mais quel est l’impact sur nos sociétés antillaises ? Il faudrait analyser le type de convergence que peut produire la rencontre entre, d’une part, une subjectivité, individuelle ou collective, issue au plan anthropologique de notre histoire, avec les faiblesses que cela comporte notamment dans le rapport à la  loi, et, d’autre part, les nouvelles formes de production de subjectivité du néolibéralisme actuel. Il y a sans doute là une convergence produisant un effet délétère ne serait-ce qu’en affaiblissant la dimension transcendantale nécessaire à la constitution d’un sujet libre et responsable. A l’évidence, c’est la  jeunesse qui semble la plus touchée par ce phénomène. D’un autre côté, les groupes politiques, marxistes-léninistes et nationalistes, ne demeurent-ils pas dans des schémas de lutte de libération devenus difficilement opérants dans la situation actuelle ? On a  glissé d’un pouvoir fondé sur le droit (les droits de l’homme » et sur la  volonté générale à une gouvernementabilité  polymorphe, multiforme. La  forme même  « parti » s’essouffle. On balance entre la lutte contre l’usage de pesticides dans les bananeraies et la défense d’un système productif donnant du travail aux ouvriers agricoles. On est tenté de défendre un mythe du progrès fondé sur l’évolution des forces productives fidèles en cela à la  vision progressiste du XIX° présente chez Marx  et surtout chez Engels. On a donc  du mal à saisir comment le progrès peut avoir noué un pacte avec la barbarie. Au plan de la culture et de l’éducation, c’est la catastrophe ! Des syndicats de l’éducation qui pourtant se veulent « nationalistes » ou progressistes, défendent des idées néolibérales telles que « penser l’école comme une  entreprise, développer le management à cet effet» et un type de technologie dans les méthodes éducatives allant totalement dans le sens de la fabrication néolibérale de la subjectivité. La défense de la  culture devient celle de « nos  mœurs et habitudes » avec un éloge immodéré du passé, l’entretien d’un sentiment victimaire, au lieu d’être le lieu d’une véritable  créativité permettant au sujet de se dépasser et de mieux positionner sa liberté en se projetant de façon positive dans le futur. Toute grande création artistique ou littéraire n’est-elle pas précisément une critique des « mœurs et  habitudes », lesquelles  nous empêchent de saisir bien des aspects du réel ?  Dans le domaine médical, chose surprenante, la majorité de nos médecins semblent indifférents à cette catastrophe sanitaire due à l’usage de pesticides et quand nous en parlons à certains, ils en parlent comme Lurel, comme des homo oeconomicus ! Quant à nos élus, ils sont incapables de  se prononcer clairement sur le problème grave de l’épandage aérien ni sur celui de l’avenir de notre agriculture alors que sa reconversion est à l’ordre du jour depuis des années. On laisse faire les choses. Jamais une telle  irresponsabilité n’avait été ainsi exposée au grand jour ! Il  faut reconnaître que nous sommes quelque peu mal « barrés ».Que faire alors ?

Nous n’avons pas la prétention ici de produire une quelconque thèse, du genre de Marx ou d’Avril. C’est en réalité ce schéma léniniste de la prise du pouvoir qui devrait être abandonné. Il se pourrait d’ailleurs que nos réflexions ne soient que ces chemins qui ne mènent nulle part dont nous parlions au début de nos propos. Tel est le risque de toute pensée. On pourrait dire aussi que l’urgence qui nous commande serait celle du grand âge qui vient, « sur les pas précipités du soir », pour parler comme Saint-John Perse. Toutefois, une chose est sûre : c’est de pratiques sociales nouvelles que peuvent surgir des théories de la libération plus pertinentes.

C’est cette nouveauté que nous essayons modestement de penser. Il nous semble –et ce sera en guise de conclusion- que compte-tenu de tout ce que nous avons dit sur l’Etat, la classe politique, la domination  de l’homme économique, l’invisibilité infinie de la domination économique, que le seul recours que nous ayons soit à chercher dans la société civile. Pourquoi ? Parce que d’une part, la société civile ne peut se réduire totalement à la logique des intérêts. Ce fut l’erreur aussi bien de Hegel que de Marx. Ce qui unit les hommes dans la société civile, c’est aussi autre chose. La  « sociabilité » ne peut se réduire uniquement à la logique des intérêts. Des sentiments de générosité, de solidarité, de lutte contre l’injustice, de quête du bien commun peuvent trouver dans la société civile le lieu de leur éclosion quand l’Etat, sous domination du marché, de la concurrence et de la logique des intérêts perd de vue ces éléments d’humanité. D’autre part, les luttes pour le bien commun ne peuvent pas être essentiellement celles d’une humanité globale. L’humanité se divise en société civiles diverses, déterminées historiquement. Ainsi, notre appartenance à la république française ne peut empêcher que notre société civile soit distincte de la société civile métropolitaine. Ce qui n’empêche pas que l’une peut influencer positivement l’autre.

L’important nous semble-t-il est de tout faire pour que s’élabore une véritable subjectivité collective, responsable réellement d’elle-même, de son territoire et de son devenir et tournant le  dos à toutes les aliénations dont nous avons parlé. Telle peut être la tache de l’heure. Ici, luttes sociales et luttes sociétales doivent trouver une nouvelle manière d’articulation. La question du changement institutionnel doit donc être pour l’instant être mise entre parenthèses car elle n’est pas suffisamment indépendante des luttes  de pouvoir encore incluses dans le système dominant. On ne peut demander à un peuple, dans l’état où  il  se trouve, de voter pour des articles (73, 74). C’est profondément indécent. L’urgence est de changer son état et celui-ci nous paraît très délité ce que cache la capacité de consommation dont il sait faire preuve. Que pouvons-nous faire alors aujourd’hui, pour créer une véritable  subjectivité collective, digne de ce nom ? Tel est le problème. Ne faudrait-il pas abandonner les obsessions pour le pouvoir, le combat des petits chefs –ce qui a miné le LKP-, chercher en un premier temps à faire la révolution sans prendre le pouvoir (titre d’un livre de Jonh Holloway, théoricien du Chiapias) afin de permettre l’intensification de luttes diverses permettant une consolidation de la conscience et de la responsabilité collectives et une meilleure détermination du bien commun ? Les sociétés civiles antillaises peuvent choisir aussi bien, plutôt que l’indépendance, le maintien dans le cadre républicain français quitte avec des spécificités statutaires, sans  que cela soit une tare. On ne peut pas dire « donnez-nous l’indépendance ou l’autonomie et vous verrez comment les choses vont changer ». Commençons d’abord à changer. L’important est la responsabilité du choix. Dans tous les  cas c’est à partir de luttes sociales et sociétales concernant tous les domaines dont nous avons parlé que se pourra construire une volonté subjective digne de ce nom, définissant un bien commun. Ce n’est pas à l’institutionnel –surtout en régime de domination néolibérale biopolitique- d’élaborer un projet de société c’est, au contraire, l’élaboration par la société civile d’un projet de société qui pourra penser ensuite des adaptations institutionnelles. Concernant la monstruosité chimique que sont nos pays devenus, si sur cette question, nous acceptons l’inacceptable, si nous n’engageons pas un combat pour d’autres pratiques culturales dans nos pays –et telle est notre profonde responsabilité- tout le reste s’en ira au gouffre. En ce sens, l’attitude méprisante de certains militants qui nous traitent d’ « écologiques » et qui se font, sans le savoir, des homo oeconomicus tout comme le ministre Lurel, est parfaitement inadmissible.

 

Jacky Dahomay