Lire Aimé Césaire, sous tous les cieux

« The Complete Poetry of Aimé Césaire », version bilingue anglais-français

En février 2020, l’universitaire américain Albert James Arnold publie en français, « La Littérature antillaise entre histoire et mémoire, 1935-1995 », une étude dense consacrée entre autres au concept de nation et aux discours identitaires aux Antilles. L’ouvrage évoque également les questions de la négritude, de l’antillanité, du créole, analysant des œuvres d’auteurs comme Maryse Condé, Patrick Chamoiseau, Raphaël Confiant, Simone Schwarz-Bart ou Gisèle Pineau. À la question de savoir ce qui a présidé au choix spécifique de cette période, Albert James Arnold répond que « la première date est celle où Aimé Césaire commence à écrire sur le dilemme de l’étudiant noir devant la montée des fascismes. Il entrait à l’École Normale Supérieure de la rue d’Ulm et publiait ses premiers articles sur la négritude  dans « l’Étudiant noir ». La seconde date est celle où une maison d’édition antillaise – Ibis Rouge – s’implante en Guyane avec des antennes en Guadeloupe et en Martinique. Entre ces deux dates, tout ce qui s’écrit aux Antilles ayant une certaine importance se publie en métropole et en relation avec l’institution littéraire française ».

Source : La1ere.fr. Philippe Triay. Publié le 11 février 2020

Pour lire l’intégralité de cet article :

https://la1ere.francetvinfo.fr/universitaire-americain-albert-james-arnold-publie-histoire-critique-litterature-antillaise-1935-1995-799251.html

Occasion nous est donnée de rappeler ici qu’en 2017, Albert James Arnold avait déjà réalisé une traduction intégrale de l’œuvre poétique d’Aimé Césaire, « The Complete Poetry of Aimé Césaire ».(…)

Publiée par Wesleyan University Press, un éditeur rattaché à l’université du même nom à Middletown dans le Connecticut, aux États-Unis, l’édition bilingue a été établie par A.James Arnold, professeur émérite de français à l’université de Virginie, et Clayton Eshleman, poète prolifique et traducteur en anglais de Césaire et d’Antonin Artaud, entre autres (…) Dans l’édition bilingue « The Complete Poetry of Aimé Césaire », James Arnold, outre la co-traduction, a réalisé une introduction et une chronologie très précise des étapes de la vie de Césaire, suivis d’un ensemble de notes, d’un glossaire, d’un index et d’une bibliographie particulièrement utiles pour comprendre et décrypter les rouages intellectuels du poète.

La1ere.fr: Il n’est pas toujours facile, même pour un locuteur français, de lire la poésie d’Aimé Césaire. Quelles sont les principales difficultés que vous avez rencontrées à traduire cet écrivain en anglais ?

A. James Arnold : Avec Clayton Eshleman, j’ai résolu de faire passer Aimé Césaire dans les milieux littéraires américains en tant que poète. Jusqu’ici son œuvre a souffert d’une interprétation excessivement politique. L’édition de son œuvre littéraire que j’ai préparée au CNRS pour le Centenaire de Césaire —  « Poésie, Théâtre, Essais et Discours », en 2014 » — a présenté les premiers textes de ses recueils. Notre édition bilingue de la poésie complète est basée sur celle, génétique, de Paris. Elle permettra au lecteur, néophyte ou familier de longue date, de saisir dans le texte du « Cahier d’un retour au pays natal » la structure de la métamorphose spirituelle du « je ». Depuis l’édition de Présence Africaine en 1956, les ajouts tardifs avaient donné l’impression d’un poème politique axé sur l’Afrique. Or, le texte de 1939 est antillais et ses références, essentiellement mythiques.

Le travail de traduction nous a amené à trouver, dans la poésie américaine et anglophone  moderne, des analogies au verset de Claudel et Péguy que Césaire avait adapté au processus de désaliénation qui motive le Cahier. Les recueils des années 1940, « Les Armes miraculeuses » et «Soleil cou coupé » surtout, ont présenté des défis considérables. Nous avons parfois fait une dizaine d’essais de traduction des textes bâtis sur la métaphore surréaliste avant de nous arrêter sur ce que nous avons édité. Il fallait nous résoudre à traduire, non des mots, mais un processus de découverte où la métaphore est censée révéler un sens profond et caché. L’essai de Césaire sur « Poésie et connaissance » a été pour nous un guide précieux.

La1ere.fr : Quelle place tient Aimé Césaire dans les cursus universitaires aux États-Unis actuellement ?

A.J.A : La création d’un volet “francophone” dans le cursus des 2e et 3e cycles de Lettres Modernes depuis les années 1970 a eu l’effet indésirable de rattacher Césaire aux Indépendances africaines des années 1960. Les lectures politiques du Cahier d’un retour au pays natal ont renforcé cette tendance. Au moment de son décès le “chantre de la négritude”  pouvait par conséquent paraître un poète de la “Françafrique”. Il faut le sortir de ce ghetto (…)

La1ere.fr : Vous travaillez sur l’œuvre de Césaire depuis les années soixante-dix. Selon vous, que peut-on retenir de l’œuvre de Césaire aujourd’hui ?

A.J.A : J’ai fait la connaissance d’Aimé Césaire chez lui, un dimanche pluvieux de juillet 1970. Nous avons causé pendant deux heures de son œuvre poétique que je découvrais encore à cette époque. Je ne sais pas s’il y a un autre spécialiste de sa poésie qui y soit arrivé par le biais du surréalisme. Dans le climat de contre-culture de 1968, le surréalisme de ce poète martiniquais m’était une évidence. Les thuriféraires de Césaire, alors comme aujourd’hui, ne l’entendaient pas de cette oreille. Par conséquent, le premier livre que j’ai consacré à son œuvre, sous le titre « Modernism and Negritude », devait faire son chemin lentement et à contre-courant (…)

« The Complete Poetry of Aimé Césaire », édition bilingue, traduction par A. James Arnold et Clayton Eshleman – Wesleyan University Press (Connecticut, Etats-Unis), 962 pages, 2017.

Pour lire l’intégralité de cet article :

https://la1ere.francetvinfo.fr/editeur-americain-publie-poesie-complete-aime-cesaire-version-bilingue-502093.html

Source : La1ere.fr. Philippe Triay • Publié le 16 août 2017