Le Sisal, une plante d’avenir pour le développement agricole et industriel de la Guadeloupe ?

— Par Jean-Marie Nol, économiste —

Aujourd’hui, les Guadeloupéens ne sont pas sans savoir que le secteur agricole rencontre actuellement des grosses difficultés exacerbées aujourd’hui par la crise inflationniste. Beaucoup de producteurs guadeloupéens et martiniquais connaissent ainsi une forte progression de leurs coûts de production qui met en difficulté les exploitations du fait de l’augmentation des prix des matières premières et de l’énergie. L’avenir apparaît sombre à beaucoup d’égards pour le secteur agricole en 2023. Les différentes filières agricoles se portent mal, et ce d’autant plus que le processus de la diversification de la production agricole n’a pas encore connu le succès escompté par les autorités en raison surtout de maladies qui ont décimé plusieurs productions en Guadeloupe, dont la filière horticole, les plantations d’avocatiers, et celle de la production des agrumes. Vu cette situation grandissante de multiples aléas avec la spirale inflationniste actuelle, il me paraît opportun de vous faire part de mes recherches et réflexions sur une nouvelle filière d’avenir pour le développement agricole et industriel de la Guadeloupe à partir d’une plante originaire du Mexique qu’on appelle le sisal dont le nom scientifique est «l’Agave sisalana.» Cette plante, originaire du Mexique, pousse toute l’année dans des climats chauds et arides, impropres aux autres cultures. Les premières traces de son utilisation remontent à l’ancienne civilisation maya.

De nos jours, elle demeure une ressource renouvelable qui pourrait aider à relever le défi du changement climatique, puisque tout au long de son cycle de vie, elle absorbe plus de CO2 qu’elle ne produit. Elle stoppe également l’érosion du sol. Très résistante, la fibre, pouvant être extraite quatre fois par an, sert à la fabrication de cordages, de tapis, de nattes et de divers produits artisanaux. Son rendement moyen en fibres séchées s’établit à plus d’une tonne par hectare. Ce n’est pas tout. Elle peut être également utilisée pour la fabrication de l’alcool chirurgical. Une vraie aubaine pour le pays Guadeloupe dans ce contexte de crise sanitaire. On utilise aussi la fibre de sisal pour fabriquer du papier noble au vu de ses qualités d’absorption et de sa résistance au pliage. La fibre de l’Agave sisalana est également utilisée pour la fabrication des textiles. Sa fibre peut être aussi utilisée en complément de la fibre de verre employée pour renforcer le plastique dans les automobiles, les bateaux, les meubles, les tuyaux et les réservoirs d’eau. On fabrique aussi, avec sa fibre très solide des disques de polissage. Figurez-vous que rien n’est à jeter de la plante: le jus de la plante, les particules de tissus broyés et les fragments de feuilles et de fibres, peuvent être utilisés comme engrais ou aliments pour animaux du bétail. Jusque-là méconnue, la plante de sisal est en attente de valorisation.

Voilà pourquoi, déjà plus de 20 ans que j’étudie le processus de développement du sisal et sa possible adaptation au terroir de la Guadeloupe à partir de plants que j’ai ramené chez moi à l’occasion d’un voyage en Californie du Sud à proximité du Mexique d’où le sisal est endémique . J’ai enfin trouvé comment mettre en valeur pour la Guadeloupe cette plante aux propriétés magiques et révolutionnaires.

A titre d’information, J’ai planté à titre d’essais de recherche, plusieurs plants de sisal chez moi sur la grande terre, et suis pratiquement en mesure d’affirmer que le sisal peut être exploité partout en Guadeloupe, car c’est une plante facile d’entretien et dont la reproduction est sans aucun problème particulier, et en plus elle pousse très bien en Guadeloupe chez moi sans aucune maladie. Pas besoin d’arrosage et pas de traitement phytosanitaire à effectuer, elle ne nécessite pas d’engrais et surtout les mauvaises herbes ne poussent pas à proximité de la plante.

Je rappelle à toute fins utiles que le sisal peut avoir des usages multiples en matière agricole et industrielle à savoir que :
– le sisal est de plus en plus souvent utilisé dans les matériaux composites pour l’industrie automobile, l’ameublement et la construction. On le retrouve également dans les plastiques et dans les produits de papier.

– production de la bioénergie et fabrication des aliments pour animaux, des engrais et des logements écologiques;

Fabrication de pâtes et papiers à base de sisal –

– Production de Textiles.
– Le sisal peut être utilisé en substitut ou en complément de la fibre de verre employée pour renforcer le plastique dans les automobiles, les bateaux, les meubles, les tuyaux et les réservoirs d’eau. Le sisal peut aussi renforcer les mélanges de ciment pour la construction de logements à bas coût et remplacer l’amiante dans les toitures et les plaquettes de frein. Il s’agit également d’un isolant et il peut se substituer au bois dans les panneaux de fibres.

– Composites à base de plastique et de caoutchouc – Du fait de sa faible densité et de ses bonnes propriétés de soudage, le sisal recèle un intéressant potentiel pour le renforcement des composites polymères (thermoplastiques, thermodurcissables et caoutchoucs).

– Déchets du sisal – Les sous-produits de l’extraction du sisal peuvent être utilisés pour fabriquer du biogaz, des ingrédients pharmaceutiques et du matériel de construction.

– Les déchets issus du décorticage − jus de sisal, particules des tissus parenchymateux broyés et fragments de feuilles et de fibres − peuvent être utilisés comme engrais ou aliments pour animaux. – Enfin, le jus de la plante entre dans la composition de produits pharmaceutiques tels que l’hécogénine et l’inuline.

Compte tenu de ces différentes propriétés, je pense sincèrement que les responsables politiques et économiques de la Guadeloupe pourraient s’emparer du sujet pour créer une nouvelle filière de développement agricole et industrielle à partir de trois usages de cette plante que j’ai déjà sélectionné pour une possible exploitation en Guadeloupe à savoir une usine de production de biomasse, une unité industrielle d’ aliments pour animaux de ferme, et enfin une usine pharmaceutique.
J’espère que cette présentation du Sisal pourrait intéresser plus d’un créateur d’entreprise guadeloupéen, et pour conclure j’ajouterais à l’attention de l’ensemble des guadeloupéens que « L’homme responsable, c’est celui qui voit plus loin que l’émotion ».

Jean-Marie Nol, économiste