« Le marchand de Venise » : Personne n’est juste grâce à la loi

T.A.C. les 23, 24, 25 et 26 mars 2016 à19h 30

le_marchand_de_venise-1— Par Christian Antourel & Ysa de Saint-Auret. —

Le petit Théâtre Aimé Césaire ( T.A.C.) est l’écrin privilégié pour donner à cette mise en scène toute la mesure de son expression, en grâce et retenue, voulue par Pascal Faber .Sa dimension réduite force à l’épure, et l’intimité qu’il instaure entre la scène, les comédiens et les spectateurs, renforce encore la densité du propos, fait de drame et comédie à la fois.

Antonio le marchand, emprunte trois mille ducats à l’usurier juif Shylock, afin d’aider son ami qui veut conquérir la belle et riche Portia. Antonio ne pouvant rembourser la somme, Shylock exige que soit prélevé une livre de chair sur le corps de son débiteur… Une dette garantie par une livre de chair, un marché tout ordinaire pour du Shakespeare élémentaire. Si cette pièce est moins connue du public que d’autres, « Le Marchand de Venise » reste une œuvre très controversée du répertoire de Shakespeare, par les thèmes brûlants qu’elle aborde et qui posent problème aujourd’hui encore. La judéité et la question juive, les désaccords religieux et leurs corollaires communautaires, les conflits d’intérêts liés aux avoir financiers, plus ou moins bien acquis. (Commerce usure, etc.…) Le tout, macérant sur fond de jalousie, de vengeance et de haine. Passions qui toutes humaines qu’elles soient, chères au théâtre de Shakespeare, n’en réduisent pas moins l’homme à l’état de bête cruelle et malfaisante, si rien de plus ne le tire vers le haut, en l’occurrence l’amour.

Une langue immédiatement intelligible

Fruit de l’antisémitisme institutionnel ambiant de l’époque, Shylock l’usurier est au cœur du drame et incarne à lui seul toute cette problématique résolument contemporaine. Il est certain que la mise en scène aurait pu, pour plus de solennité de grandiose, surement redondant, s’émanciper hors des chemins battus avec force démonstrations et appuis réflexes d’un théâtre actuel. Pascal Faber au contraire, opte pour un théâtre plus épuré et un jeu des acteurs juste et généreux. Une interprétation qui répond parfaitement aux exigences de la mise en scène, pour que le spectacle demeure dans son jus, dans un passé fantasmé que l’œuvre de Shakespeare ne s’empêche d’emmener avec elle. Un balcon, des masques, des costumes évocateurs suffisent à nous faire voyager dans le temps et dans l’espace. Par des changements de lieux bien amenés, ont passe rondement de Belmont à Venise. Le metteur en scène répond à sa manière avec le langage fidèle et sérieux de la réflexion une langue immédiatement intelligible qui exprime l’essence de l’intime de toute vie, toute existence Le langage de la raison simple, et non la langue naïve, réactive, quasi infantile de l’intuition. Répondre en ce sens, c’est-à-dire par la pensée, c’est apporter une solution fiable, durable, sans pour autant être à contre courant des nouveaux rythmes du mouvement artistique.
C’est l’enfance de l’art !

Pratique :
Une pièce de: William Shakespeare
Au Théâtre Aimé Césaire les 23, 24,
25 et 26 mars 2016. A19h30
Mise en scène : Pascal Faber
Traduction : Florence Le Corre-Person
Adaptation : Florence Le Corre-Peson
et Pascal Faber

Distribution :
Michel Papinischi
Philippe Blondelle
Séverine Cojannot
Frédéric Jeannot
Régis Vlachos
Charlotte Zotto.

Production :
Compagnie 13.
Réservation : 05. 96. 59. 43. 29.

Christian Antourel
& Ysa de Saint-Auret.

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