Le Biguine Jazz Festival : une 3ème étape en mode mineur.

— Par Roland Sabra —

Était-ce une bonne idée ? La salle est plus habituée à recevoir des séminaires, des cocktails, des repas de mariages, des anniversaires que des concerts de jazz. Maquillée de deux douzaines de tables pour faire club de jazz, elle laissait transparaître son usage habituel, impersonnel à souhait pour accueillir les manifestations diverses auxquelles elle est dédiée. Le billet donnait droit le s’asseoir et de commander boissons et nourritures. Ce qu’a fait la toute petite centaine de commensaux qui avaient réservé, sous le regard de celles et ceux qui n’avaient pas ce privilège et qui du coup durent attendre plus d’une heure la fin des agapes pour que la prestation de Yusan commence. Depuis 2016, année de sa formation, le groupe avance, creuse, approfondit ses compositions qui paraissent aujourd’hui beaucoup plus élaborées avec cette particularité si présente dans un autre domaine de la logique associative, celle de la conjugalité antillaise, pour ne pas la nommer, en ce qu’elle promeut, et systématise parfois : un ensemble/séparément. Les échanges entre les instrumentistes sont intenses et manifestent de fortes personnalités qui donnent dans certains morceaux, pas dans tous, l’impression de prévaloir sur le groupe. C’est bien évidemment dans la poursuite de cette dialectique, en intégrant davantage la place de la voix et celle qui la porte le plus souvent qu’il faut espérer voir poursuivre Yusan. La deuxième partie de leur prestation, après un pause pour permettre aux spectateurs de consommer un peu plus, à semblé plus homogène et plus enlevée.

La soirée ne s’est vraiment animée qu’avec la Biguine Jam Session, qui à elle seule, a permis de dépasser le coté «  club de jazz » factice de l’évènement. La salle tout à coup a rajeunie. Une génération de trentenaire s’est substituée à celles des « assis » qui peu à peu s’éclipsaient. Erik Pédurant, présent dans la salle est monté sur scène, à renoué avec une partie de son ancien backing band le temps de faire le bœuf deux ou trois fois, et puis d’y inviter la jeune prodige Luan Pommier qui ne s’est pas faite prier pour un set un peu chaotique mais tellement sympathique, joyeux et vivant que la soirée en était illuminée.

Le Biguine Jazz est un festival aux nombreuses facettes. D’une soirée d’ouverture qui réunissait plus de huit cents personnes à un club faussement intimiste de dix fois moins de participants en passant par un après-midi de découverte d’un étiage intermédiaire il fait montre d’une richesse, et d’une diversité reflets de la culture au sein de laquelle il baigne.

Fort-de-France, le 14/08/19

R.S.

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