Jean-Marie Straub, cinéaste anticonformiste, est mort

L’œuvre de Jean-Marie Straub, réalisée avec son ancienne compagne Danièle Huillet, disparue en 2006, a remis en cause les schémas narratifs et esthétiques traditionnels. Le cinéaste, né à Metz, le 8 janvier 1933, est décédé ce dimanche matin à son domicile de Rolle, en Suisse.

Biographie
Jeune homme, Jean-Marie Straub anime des ciné-clubs à Metz. Il fait une hypokhâgne au lycée Fustel-de-Coulanges de Strasbourg puis obtient une licence à l’université de Nancy. En 1954, il retrouve à Paris plusieurs futurs auteurs de la Nouvelle Vague, comme Jean-Luc Godard, Jacques Rivette, François Truffaut4 et Claude Chabrol.

Il rencontre Danièle Huillet au lycée Voltaire ; élève en classe préparatoire à l’Institut des hautes études cinématographiques, il en est renvoyé après trois semaines. Ensemble, ils préparent plusieurs projets. En 1954, ils proposent le scénario de Chronique d’Anna Magdalena Bach à Robert Bresson, qui leur répond : « Mes amis, c’est votre sujet, c’est vous qui devez faire le film. » En 1956, Straub travaille comme assistant de Jacques Rivette sur le court métrage Le Coup du berger.

Appelé à se battre en Algérie, Jean-Marie Straub déserte en 1958 par solidarité avec les indépendantistes algériens et quitte la France. Danièle Huillet le rejoint bientôt en Allemagne de l’Ouest pour préparer Chronique d’Anna Magdalena Bach, qu’ils tourneront en 1967. En attendant, ils réalisent Machorka-Muff et Non réconciliés, deux films d’après Heinrich Böll qui les rattachent malgré eux au nouveau cinéma allemand.

Après Le Fiancé, la Comédienne et le Maquereau en 1968, film d’« adieux » à l’Allemagne, ils partent en Italie – où ils s’installeront définitivement – pour réaliser Les yeux ne veulent pas en tout temps se fermer ou Peut-être qu’un jour Rome se permettra de choisir à son tour, d’après la pièce Othon de Pierre Corneille, ce qui leur vaut l’hostilité d’une partie de la critique française.

Par la suite, assistés de collaborateurs fidèles comme Louis Hochet au son ou Renato Berta et William Lubtchansky à l’image, ils auto-produisent et réalisent des films très divers, de durée variable, en couleurs ou en noir et blanc, en Italie, en Allemagne et en France, et jusqu’en Égypte (Trop tôt, trop tard).

En septembre 2006, le jury de la 63e Mostra de Venise, où ils présentent Ces rencontres avec eux (Quei loro incontri), leur décerne un prix spécial pour l’ensemble de leur œuvre, saluant son « innovation dans le langage cinématographique ».

Après le décès de Danièle Huillet en octobre 2006, Jean-Marie Straub a continué à réaliser de nombreux films, assisté entre autres par le réalisateur Christophe Clavert et les producteurs Barbara Ulrich et Arnaud Dommerc. Il meurt en novembre 2022.

Esthétique et politique

Cette section ne cite pas suffisamment ses sources (novembre 2022).
Tous les films de Jean-Marie Straub et Danièle Huillet sont des « adaptations » de textes littéraires ou d’œuvres musicales.
Les deux cinéastes se qualifient d’« artisans » du cinéma, par opposition et/ou résistance à l’industrie cinématographique7, récusant régulièrement le qualificatif de « minoritaire »8 souvent employé pour évoquer leur cinéma ; ils ont au contraire toujours insisté sur le fait qu’ils n’étaient « pas des oiseaux rares ».
Straub et Huillet n’utilisent que le son direct des prises. Ils opposent à ce qu’ils appellent le « gaspillage » dans le cinéma dominant, un cinéma de la modestie mais du luxe où l’on prendrait le temps de regarder et d’écouter, en particulier la nature qu’ils ont filmée avec de plus en plus d’insistance. La plupart de leurs acteurs sont des non-professionnels.,
Ils ont tôt reconnu leur dette envers Bertolt Brecht qu’ils ont adapté à plusieurs reprises (Leçons d’histoire, Introduction à la « Musique d’accompagnement pour une scène de film » d’Arnold Schoenberg, Antigone, Corneille-Brecht) et à qui ils y doivent le second titre de Non réconciliés : « Seule la violence aide où la violence règne. »

Source: Wikipedia