Incestes, viols, agressions sexuelles : parler pour se libérer et protéger les autres !

— Communiqué  de l’UFM —

L’Union des Femmes de Martinique salue à nouveau le courage qu’il a fallu à Barbara Glissant, Karine Mousseau et Valérie Fallourd pour révéler publiquement leur histoire douloureuse d’agressions sexuelles incestueuses qu’elles accusent Marc Pulvar d’avoir perpétrées dans leur enfance. Alors que cette dénonciation d’inceste secoue la société martiniquaise – puisqu’elles dénoncent un homme public respecté et reconnu dans le milieu anticolonialiste et syndical – , l’UFM n’est pas étonnée que de telles révélations surviennent des décennies plus tard : elles font partie du processus de guérison. Nous appelons au respect de la parole des victimes, à l’empathie et à la solidarité.

Pourquoi les faits d’agressions sexuelles sont-ils dénoncés des décennies plus tard ?

Nous recevons régulièrement des victimes ayant fait un déni de viol. Leurs souvenirs leur remontent plusieurs décennies après ! Ces femmes peuvent mettre enfin des mots sur leur parcours de souffrance…

Les psychologues et psychiatres parlent de mémoire traumatique chez les victimes de violences et de viols. Ce phénomène psychique explique pourquoi les victimes oublient l’évènement traumatique et que les souvenirs ressurgissent à l’âge adulte à la faveur d’un évènement déclencheur. Au lieu d’être mémorisé sous la forme d’un souvenir autobiographique, que l’on peut raconter au moment où on le décide, l’agression est mémorisée dans une mémoire traumatique et se retrouve isolée des autres souvenirs. Elle est dissociée de la mémoire autobiographique, de la mémoire habituelle. La mémoire traumatique peut contenir seulement certains composants de l’évènement traumatique (images, sons, sensations corporelles, pensées…) qui reviennent comme des flash back.

D’autres facteurs expliquent le long silence des victimes de violences sexuelles : la honte, le sentiment de culpabilité de faire exploser la famille, le sentiment d’isolement (chacune croit être la seule), la peur de s’attaquer à quelqu’un de connu et respecté par la société, l’urgence de survivre et de faire face aux conséquences psychologiques et physiques…

Oui, les violences sexuelles envers les petites filles et les femmes existent dans toutes les sociétés, mais en particulier dans notre société construite sur le droit de vie et de mort sur les esclavisé·es, et le droit de cuissage sur les esclavisées, nous savons combien cette pratique d’alors s’est perpétuée dans le temps par de trop nombreux hommes, ayant profité de leur position sociale privilégiée, ou du terrible adage familial « ou pa ka élivé chouval pou ofisié montey » …

Parler fait partie du processus de guérison

Dépressions, tentatives de suicide, addictions, maladies, relations sociales perturbées, cauchemars… tel est le calvaire que vivent les victimes. Parler, dénoncer les faits, c’est le début d’une reconstruction possible à partir de la reconnaissance de leur statut de victime, avec les accompagnements nécessaires existants.

Pour les victimes, c’est aussi l’espoir de sortir de cette vulnérabilité qui peut attirer d’autres prédateurs. En effet, de nombreuses personnes victimes dans le cadre conjugal ou professionnel ont vécu des violences dans l’enfance. On parle de continuum de violences.

Dénoncer : c’est protéger et sensibiliser les autres

Cette parole libère d’autres personnes victimes de leur peur, de leur honte, de leur silence, et créée l’espoir d’être à leur tour crues, quels que soient le milieu social et la position de leur bourreau et d’espérer pouvoir enfin vivre normalement.

Parler, c’est aussi protéger d’autres victimes potentielles de ces prédateurs, et donc sauver des vies. C’est envoyer un signal fort à tous les potentiels criminels pour qu’ils soient débusqués et punis, et à notre société pour se libérer de cette gangrène.

C’est peser encore plus pour que la lutte pour l’élimination des violences sexistes et sexuelles soit une priorité qui se traduise par des moyens financiers encore plus conséquents.

L’UFM soutient les personnes victimes d’agressions sexuelles Nous féministes de l’UFM soutenons toutes les victimes et avec elles, ensemble, disons avec force ce message que l’UFM scande depuis des années : « Nou ni asé ! Nou lé an lot sosiété éti fanm épi nonm ka viv ansanm, en parfaite égalité !»

Rappelons aux personnes qui ont besoin d’aide que nous sommes joignables par e-mail à accueilfemme@uniondesfemmes-mq.fr et au 0596 71 26 26 (tapez 1) les :

• lundis, mercredis, jeudis et vendredis de 8 h à 18 h ;

• mardis de 8 h à 14 h ;

• samedis de 8 h à 12 h.

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Complices —Communiqué du Collectif du 8 mars —

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Marc Pulvar, figure du syndicalisme martiniquais, accusé de pédocriminalité