Épreuves et rapports de force se succèdent en Haiti pour dénoncer un retour de la dictature

Des leaders de l’opposition et plusieurs milliers de personnes ont manifesté hier, dimanche 14 février 2021, à Port-au-Prince. Ils  dénoncent les velléités de nouvelle dictature qu’a selon eux le pouvoir en place en Haïti et l’appui de la communauté internationale au président Jovenel Moïse.

Dans les jours à venir, tout sera épreuve de force et rapport de force en Haïti. Les accusations de « tentative de coup d’Etat » portées il y a une semaine par les autorités ont été accueillies avec scepticisme par l’opposition et la société civile, qui dénoncent des arrestations politiques et illégales.

Dimanche 14 février, plusieurs milliers de manifestants, des élus de l’opposition et d’anciens parlementaires ont autant contesté la légitimité du maintien au pouvoir de Jovenel Moïse que le soutien que lui apportent les pays étrangers.

« Malgré tous les enlèvements, les massacres dans les quartiers populaires, les Etats-Unis continuent de le soutenir. L’argent du fonds Petrocaribe a été dilapidé, on n’a pas de bons hôpitaux, et les Etats-Unis continuent à soutenir ce gouvernement corrompu », s’indignait Sheila Pelicier, une manifestante.

La manifestation était pacifique bien que des altercations ont eu lieu entre quelques manifestants et les forces de l’ordre qui ont fait usage de gaz lacrymogène et de projectiles en caoutchouc.

Des policiers ont également tiré en l’air à balles réelles à Pétionville, commune aisée de l’aire métropolitaine où une voiture a été incendiée.

Le président Jovenel Moïse soutient que son mandat à la tête du pays caribéen court jusqu’au 7 février 2022. Mais cette date est dénoncée par une partie de la classe politique haïtienne, selon qui le mandat de cinq ans de Jovenel Moïse est arrivé à terme le 7 février dernier. Ce désaccord de date tient au fait que M. Moïse avait été élu lors d’un scrutin annulé pour fraudes, puis réélu un an plus tard.

Le dirigeant intérimaire choisi par l’opposition politique haïtienne Joseph Mécene Jean-Louis, âgé de 72 ans, est sorti de son silence samedi dernier, six jours après sa nomination, et appelle ses compatriotes à lutter contre « la dictature », une attaque à destination du président contesté Jovenel Moïse.

Dans sa déclaration écrite de deux pages, M. Jean-Louis considère que la situation dans laquelle se trouve Haïti « exige des sacrifices patriotiques » et évoque la violence qui sévit dans le pays.

Haïti vit sous tension avec une multiplication de mobilisations citoyennes dénonçant une dérive autoritaire du pouvoir de Jovenel Moïse.

Aucune institution haïtienne ne peut aujourd’hui légalement départager ces deux camps qui refusent tout dialogue. Haïti ne dispose plus d’un parlement fonctionnel depuis janvier 2020. Isolé, le président Moïse gouverne depuis par décrets, alimentant une défiance croissante au sein de la population, minée par la pauvreté et subissant la violence quotidienne des gangs. 

Jean-claude SAMYDE avec AFP