Derrière le symptôme Darmanin, un pouvoir colonial mis en cause

— Le n° 285 de « Révolution Socialiste », journal du G.R.S. —

Les propos du sieur Darmanin, ministre en chef de la police et des colonies (tout un symbole !), provoquent une levée de boucliers. Ce qui, en ce qui nous concerne nous étonne, c’est…l’étonnement devant ces eux.

Vous prenez un ministre, dont la carrière politique a commencé dans l’extrêmedroite. Vous le mettez dans un gouvernement, le chef réel est un président « jupitérien », dont la religion sur les colonies est incertaine : fautil s’en tenir au colonialisme classique, bête et méchant, ou fautil tenter l’aventure néocoloniale ?. Ajoutez une incapacité criante, aussi bien de régler les problèmes quotidiens de la population, que de gérer les crises colossales comme celle du chlordécone. Pour compléter le tout, observez à quel point le sol politique se dérobe sous les pieds du pouvoir dans les dernières colonies de l’Empire. Mélangez tout ça, et vous obtiendrez des déclarations incongrues, où la provocation le dispute à la balourdise et l’inculture, sur un fond suintant le mépris de la « civilisation supérieure ».

L’important est en réalité, de s’arrêter sur ce sol politique nouveau dont nous parlons, et de voir les tâches qui en découlent.

Première nouveauté : même sils ont été élus par des minorités de votant-e-s, les 4 députés de Martinique expriment une orientation globalement plus à gauche, et plus ouverte, à une coopération active avec la gauche des colonies et la gauche française, ainsi qu’avec le mouvement social.

 Deuxième nouveauté : cela coïncide fort heureusement avec une radicalisation (dans le bon sens du terme) de la représentation politique guyanaise, développant une orientation autonomiste ouverte et élaborée en concertation avec le mouvement social.

 Troisième nouveauté : il se dessine une possibilité concrète de réaliser sur des sujets donnés comme celui du chlordécone, un front social et politique susceptible de faire évoluer la situation.

 L’accord déjà exprimé par les 4 députés de Martinique, par la présidence de la CTM, par la sénatrice et le sénateur, à l’initiative de Lyannaj Pou Dépolyé Matinik (LPDM), est une excellente chose qui mérite d’être partagée avec les autres composantes du mouvement social, vérifié et approfondi par la discussion avec les élu-e-s concerné-e-s et mis en action.

 Il arrive qu’un événement modeste résume l’essence d’une situation. C’est peut-être le cas d’une réunion tenue en marge du congrès de Peyi-a, et à son initiative. Des députés de trois tendances de la NUPES (LFI, PCF, Verts) et le député Guyanais Davy Rimane, ont rencontré une délégation de planteurs de petites surfaces en butte aux Profiteurs des « 10 familles Békées », des délégations du collectif des ouvriers et ouvrières victimes du chlordécone, et de LPDM. Le système de l’économie bananière et ses implications sociales a été décortiqué, le crime chlordécone expliqué. La gauche française a été clairement interpellée par notre camarade Philippe Pierre-Charles, parlant au nom de LPDM. L’atmosphère générale était à l’engagement sur tous les dossiers évoqués. Le coordonnateur de la LFI en personne, Manuel Bompard l’a souligné : les batailles parlementaires sont importantes (sur le chlordécone comme sur la retraite), mais rien de conséquent ne sera arraché sans mobilisation de masse, sans construction d’un rapport de force.

Voilà un langage qui nous plaît, mais qui est aussi à prendre en compte pour comprendre les pertes de sang froid des Darmanin et autres sicaires de la bourgeoisie.

RETRAITES : « LYCÉENS, SYNDICATS : MÊME COMBAT ! »

Le 7 février, on continue !

Ce slogan, surgi dans le feu de l’action du mercredi 1er février, souligne bien l’élément nouveau de la situation : Des centaines de lycéennes et lycéens de Martinique sont entrés dans l’action, organisant eux-mêmes des blocages, bousculant des administrations souvent hostiles, pour montrer leur opposition consciente à une contre-réforme qui les concerne au premier chef.

Cinglant désaveu pour un gouvernement qui prétend allonger la durée de vie au travail « pour le bien des générations futures »… qui vont en réalité subir cet allongement, ou plus certainement, cet appauvrissement lié à l’impossibilité d’aller jusqu’au bout des 67 ans ou davantage, qui seraient souvent nécessaires pour partir à la retraite avec une pension à taux plein.

La première jonction des syndicats et des lycéens, s’est faite avec les syndicats qui n’ont pas voulu se contenter de la grève du 31 janvier, mais au contraire, mener des actions dans le sens de la reconduction.

Contrairement aux espoirs macroniens, les manifestations du 31 n’ont pas montré un épuisement du mouvement, mais un élargissement. En France, ce renforcement est reconnu. En Martinique, certains observateurs n’ont pas vu ce qui pourtant crevait les yeux : près de 4000 personnes se retrouvèrent dans la rue, à Fort-de-France, ce 31 janvier.

C’est ce qui conduit l’intersyndicale en reconstruction, à appeler à deux nouvelles journées de mobilisation en se calant sur les dates des 7 et 11 février décidées par l’intersyndicale de France, qui maintient sa stratégie unitaire, et dans les faits, imprime le rythme.

Les comités lycéens mobilisés, et de plus en plus coordonnés, appellent aussi à l’action, mardi 7 février. Qu’il y ait jonction dans la rue, ce jour, importe moins que de réussir une puissante mobilisation partout, car tout le monde est concerné, et c’est la population debout qui imposera le retrait d’une loi scélérate au profit exclusif des exploiteurs.

Le Groupe Révolution Socialiste soutient évidemment cette mobilisation dans laquelle ses militantes et militants sont pleinement engagé.e.s.