— Par Robert Lodimus —
Chapitre XI
LES DÉCÈS
Pauline et Francesca avaient repris leur périple en sens inverse pour retourner à La Roche. À pas mesurés, avec la lenteur d’une tortue ou d’un escargot – on aurait dit des chevaux qui avaient perdu leurs fers dans la montagne – elles foulaient le sentier sinueux et étroit, qui, vu d’en haut, s’apparentait à une corde de sisal déployée dans la forêt clairsemée, partiellement dégarnie de sa faune et de sa flore. Malgré tout, on pouvait entendre les bruits des battements d’ailes d’une petite colonie d’oiseaux effrayés par le rapprochement des voyageuses. Le handicap de Pauline ralentissait l’allure de la marche. Un soleil presque éteint, recouvert d’un voile transparent de pâleur, fouettait avec ses rayons tièdes la terre farineuse, étampée par les traces de pas presque effacées des caravanes rurales qui se déplaçaient quotidiennement de la paysannerie à la ville, de la ville à la paysannerie. Les aiguilles de l’horloge de la nature indiquaient les morceaux de temps qui s’évanouissaient les uns après les autres comme les vagues de la mer. Le message amphigourique du « bokor » troublait leurs mémoires comme les eaux d’une rivière agitées par un troupeau d’éléphants.