Argent sale et politique en Martinique

Décryptage des récents événements de notre actualité

— ParYvon Joseph-Henri, président de l’A3C —

I. Le prétexte des békés

L’Argent sale, gangrène de la Martinique

Président de L’Association des Consommateurs et des Citoyens de la Caraïbe, je me souviens de ce commissaire de police ami qui m’expliquait que, contrairement à la rumeur qui courait en Martinique, les prostituées ont toujours eu des souteneurs. Je serais tenté d’ajouter qu’on n’a jamais vu d’argent sale sans drogue et sans quelques politiques en arrière-plan.

Les récents événements relatés par les médias locaux semblent confirmer ces propos, de manière plus inquiétante. La possible implication d’un gardien de prison nous renvoie à ces porosités qui peuvent se créer entre malfrats et policiers, et qu’on pouvait croire naïvement réservées aux films policiers. Qu’on le découvre en Martinique témoigne qu’une marche est peut-être franchie, sans doute d’ailleurs depuis plus longtemps qu’on ne le pense.

La récente quantité de drogue arraisonnée par la Marine Nationale, renforce la conviction que la drogue qui circule de plus en plus intensément en Martinique est le signe que nous ne sommes plus une plaque tournante, mais un « establishment » de la drogue comme en attestent les règlements de compte, l’enlèvement d’un blessé par balle au CHU qu’on emmène dans le coffre d’une voiture pour achever ce qu’on n’avait pu terminer.

Des événements d’activistes manipulés qu’on se garde de dénoncer en politique

Depuis un an ou deux, nous avons vu apparaître des « déboulonneurs » de statues de Victor Schoelcher, accusé de n’avoir non seulement pas libéré les esclaves mais, de les avoir remis dans les fers et d’avoir indemnisé leurs maîtres. Curieusement, les égéries de ces actes revendiqués comme révolutionnaires, sont apparues sur des vidéos et diverses photos comme des symboles d’une société riche, consommatrice, fondée sur le sexe et le plaisir. Exit donc !

Sur fond de contestation des politiques sanitaires menées par le gouvernement et le préfet face à cette pandémie de covid-19, on a vu apparaître peu à peu, des dégradations de monuments sur la Savane de Fort-de-France et au Diamant à la mairie.

Parallèlement, et sous la poussée de syndicats et autres associations, on a vu dénoncer la chlordécone et mettre les békés au pilori comme les empoisonneurs de la Martinique. Certes un béké s’est emparé des droits de fabrication de la chlordécone et d’autres ont poursuivi l’utilisation de ce pesticide, grâce aux injonctions d’hommes politiques martiniquais, qui n’étaient pas des békés et qui obtenaient de l’Etat un moratoire pour continuer à utiliser la chlordécone ; mais mettre tout le monde d’aujourd’hui dans le même sac, c’est vouloir s’opposer à la réconciliation vécue par Aimé Césaire et Bernard Hayot à l’habitation Clément par la plantation commune d’un courbaril. Comme si certains ne voulaient pas avancer, cherchant à gratter les bobos, l’esclavage et l’empoisonnement devenant des fonds de commerce. De là sans doute les manifestations qui suivent.

Ont commencé les agressions de plantations de bananes visant tantôt les outils, tantôt les plantations ; mettant au chômage des ouvriers agricoles dont nos soi-disant-apprentis-révolutionnaires-aspirants-capitalistes se moquent évidemment pas mal en fait ; bloquant une caravane de recrutement de personnels pour ce secteur ; agressant sauvagement le magasin de la distillerie JM dans le Nord, pour une contestation d’image qui reproduirait un drapeau esclavagiste et des esclaves roulant des tonneaux.

Enfin, et plus récemment, des manifestations au Cap Est, avec des incendies et un blocage des pompiers, ainsi qu’une agression de journaliste ont eu lieu.

Evidemment, c’est « le lobby béké » qu’on désigne et cherche à atteindre, maîtres des esclaves, indemnisés lors de la libération de ces derniers et dont le mode de vie en caste est dénoncé. C’est lui le responsable de tous nos maux, le KKK martiniquais ayant changé de couleur. Néanmoins, et si on se réfère à Castro – fils illégitime certes d’une mulâtresse et d’un propriétaire terrien qui ne le reconnaîtra qu’à 17 ans – ou au Che, ou encore à Fanon, les « révolutionnaires » sont des intellectuels issus de familles souvent bourgeoises. Or, toute la société bourgeoise (au sens du niveau social) de Martinique s’est émue de l’absence abyssale de connaissances de nos pseudos révolutionnaires. Ils se contentaient de répéter des phrases vides pour simplement établir un tribunal aveugle, brutal et haineux. Hommes de main, donc et non véritables révolutionnaires. Curieusement, un ancien maire évincé d’un long pouvoir, se revendique ouvertement comme l’agitateur de ces bandes, s’attribuant un pouvoir qu’il n’a vraisemblablement pas ou, pas tout seul en tout cas.

Un jour ou l’autres, la vérité éclate.

L’arrestation récente de celui qui est soupçonné être l’incendiaire principal de ces évènements ci-dessus évoqués, souligne l’appartenance de ces apprentis agitateurs au milieu interlope.
Or, en ne dénonçant quasiment jamais ces actes de vandalisme imbécile parce qu’on ne réécrit pas l’histoire, on se l’approprie, nos hommes et femmes politiques ont commis trois fautes :

• Ils ont qu’ils le veuillent ou non, donné un feu vert à ce type d’actions qui détruit un secteur qui exporte et dont le personnel vit mieux que nulle part ailleurs, près ou loin de nous.
• Ils témoignent qu’ils le veuillent ou non, d’une complicité avec ces acteurs interlopes, suggérant, non pas simplement un manque de courage, ou de respect à l’égard des lois qu’ils seraient censés faire appliquer une fois élus, mais un rapport bien plus étroit avec l’interlope, les malfrats.
• Enfin, en ne portant pas plainte contre ces agressions de biens publics, ces hommes politiques, dès lors qu’ils sont maires ne respectent pas l’engagement qui est le leur de faire appliquer la loi.
Et puis, regarder dans le rétroviseur pour se faire élire, n’a jamais été un moyen de faire avancer un pays. Battons-nous plutôt pour faire avancer la Martinique au lieu de la pousser en arrière.

Faut-il en conclure que ce glissement insidieux dans société mafieuse irriguée de drogue et faisant émerger des seigneurs de la drogue comme en Colombie et ailleurs dans un silence stupéfiant arrange certains plus préoccupés de leurs revenus que du sort de la population ?

Le pas sera sans doute vite franchi.