Appel du CNCP à la mobilisation générale

Oui ! Nous sommes bien en guerre !

Le Président de la République Française a déclaré que « Nous sommes en guerre » et il a désigné l’ennemi : le coronavirus ! Chacun aura constaté que l’essentiel de la stratégie de celui qui se pose en chef des armées consiste à naviguer à vue et à colmater superficiellement les brèches. Quelques uns lui trouvent des excuses en arguant que la pandémie était totalement imprévisible, qu’il fait de son mieux et qu’on devrait accepter ses décisions sans rechigner, la gravité de la situation appelant tous et toutes à réaliser « l’unité nationale » ! Eh bien non ! Emmanuel MACRON est coupable de mise en danger de la population et ne doit bénéficier d’aucune circonstance atténuante. Les pandémies de ce type étaient non seulement prévisibles mais, plus encore, elles étaient annoncées. Il est de ceux qui ont organisé le sabotage des services publics de santé, faisant matraquer et gazer le personnel qui tirait la sonnette d’alarme quant aux catastrophes qui en découleraient. Sa principale préoccupation n’est pas de combattre la pandémie mais plutôt d’empêcher le système capitaliste de sombrer.
De façon particulièrement cynique, Il croit pouvoir instrumentaliser la catastrophe sanitaire que nous subissons pour faire oublier sa responsabilité dans la débâcle. Il agite le chiffon de la bataille contre le Covid 19 pour continuer à organiser la vraie guerre qu’il mène contre les peuples et remplir ainsi la mission qui lui a été confiée par les multinationales et les maitres de la finance. Cette guerre là, c’est contre les classes populaires, contre notre camp, qu’il la mène. C’est lui et les profiteurs qu’il représente que nous devons combattre.
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Une armée ne peut remporter la victoire sans connaitre les forces et la stratégie de l’ennemi. A cet égard, il faut être pleinement conscient que les gouvernements impérialistes occidentaux se cachent derrière la pandémie du coronavirus pour intensifier leur prédation ultralibérale et renforcer leur offensive contre les peuples dominés.
Comme chaque fois que les profits des exploiteurs sont menacés et afin de remettre leur système à flot, un vaste hold-up est mené contre les finances publiques, les revenus des classes populaires et l’argent des contribuables. Comme chaque fois, ils profitent de « la crise » pour saccager tous les droits des travailleurs et leur imposer une plus grande austérité.
Prenant le prétexte de la nécessité de combattre la catastrophe sanitaire, tout comme ils avaient pris le prétexte de lutter contre le terrorisme, ils multiplient les lois liberticides : traçage des portables, censure des réseaux sociaux, remise en cause du pouvoir des élus locaux, instrumentalisation du confinement ont surtout pour objectif de préparer l’écrasement des luttes populaires dont la montée en puissance se manifestait avant la pandémie sur tous les continents.
Pendant que leurs médias déversent un flot d’informations anxiogènes, relaient leurs campagnes de désinformation tout en restant muets sur leurs préparatifs de guerre, les impérialistes positionnent leurs armées et continuent les agressions contre les pays qui contrecarrent leur hégémonie.
La guerre qui fait rage actuellement n’est autre que la guerre de classes qui n’a jamais cessé mais qui, aujourd’hui, a franchi une étape décisive. Soit les classes dominantes la gagneront, alors les catastrophes et la régression s’aggraveront. Soit les peuples remporteront la victoire et l’humanité empruntera le chemin du renouveau.
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Dans un tel contexte, serait-il concevable que nous suspendions notre combat pour l’émancipation au prétexte que le gouvernement de la France colonialiste nous aurait confinés ? Certainement pas !
Nous refusons absolument que tout notre peuple soit pris en otage par un gouvernement illégitime. Car, le régime de Macron est illégitime. Il a été propulsé aux commandes par le monde de la finance et des multinationales. Il a remporté les élections par la manipulation des médias et des sondages, à la faveur d’un honteux chantage. Il s’agissait soi-disant d’empêcher l’arrivée de l’extrême-droite au pouvoir, mais, depuis qu’il est aux commandes de l’Etat, c’est une politique d’extrême-droite qu’il développe. Emmanuel Macron est, pour nous, d’autant plus illégitime qu’il est le dirigeant de la puissance coloniale qui domine notre pays.
Peut-on sérieusement croire que le gouvernement colonialiste français se soucierait de porter des solutions pérennes favorables à notre peuple quand on constate les lamentables marchandages auxquels se livrent les membres de l’Union Européenne et leur incapacité à organiser une riposte commune face à la pandémie ?
Devrions-nous confier notre sort aux cadres français qui méconnaissent nos réalités profondes  mais qui trônent au sommet de toutes les administrations sévissant dans notre pays, et qui sont nommés pour appliquer les directives venues de la France dont ils défendent les intérêts?
La gravité de la situation actuelle nous commande d’entrer en dissidence pour reprendre le pouvoir sur notre vie. Les contraintes imposées par les autorités coloniales ne sauraient nous en empêcher. Nos ancêtres ont su briser le carcan esclavagiste dans des conditions de domination incomparablement pires. Notre peuple a pu mettre fin à la dictature imposée par l’Amiral Robert et à la misère qu’elle provoquait par ses propres forces. Le Comité Martiniquais de Libération Nationale, la mutinerie de la garnison commandée par Henry TOURTET et les mobilisations populaires libéraient alors la Martinique du régime vichyste pendant que la France y était encore soumise.
Aujourd’hui, notre devoir est d’organiser la résistance contre les diktats des autorités coloniales.
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Les solutions permettant de surmonter la crise sanitaire qui nous frappe ne peuvent venir principalement que de nous-mêmes.
L’une de nos premières préoccupations doit être de traverser avec succès la période de confinement. Il est certain que celui-ci se déroule dans des conditions très dures  parce que nous n’y étions pas préparés, parce que le gouvernement l’impose sans concertation et l’accompagne de pratiques douteuses, parce qu’il vient aggraver la situation de larges fractions de notre peuple psychologiquement fragiles.
De plus, au fur et à mesure que le confinement se prolonge, les tensions s’exacerbent entre la population et les gendarmes. Cela est inévitable car, dans l’inconscient collectif, les gendarmes sont associés à la répression sanglante des luttes populaires et que beaucoup d’entre eux ont toujours des comportements racistes et arrogants. La dimension de protection sanitaire du confinement est obscurcie par le réflexe de défier l’autorité rejetée, d’autant plus que les amendes abusives distribuées attisent l’exaspération de ceux qui, pour la majorité, sont dans des situations financières inextricables.
Cependant, en dépit de toutes ces difficultés, nous pouvons nous organiser pour traverser avec profit cette période difficile.
Commençons par préciser que nous devons respecter scrupuleusement le confinement, ainsi que les mesures barrières, non pas parce que le gouvernement nous les impose, mais parce que cela relève de notre propre responsabilité de défendre la vie de notre famille et de notre peuple, parce qu’il s’agit de contribuer à la lutte de l’humanité contre la pandémie. Nous ne devons sortir que pour des raisons valables et en prenant toutes les mesures de protection nécessaires. On peut se résoudre à remplir les attestations exigées, aussi mal conçues soient-elles. Pour autant, nous devons refuser de nous laisser paralyser par la stratégie de l’ennemi et il n’est pas questions de sacrifier, à cause du confinement, les tâches importantes que nous avons à remplir.
Autrement, cette période peut nous être extrêmement utile afin de préparer les coups d’après. Car, sans céder au catastrophisme, nous devons être bien conscients que nous entrons dans un cycle au cours duquel les catastrophes sanitaires, climatiques, économiques et autres, se multiplieront. Nous avons l’occasion de nous documenter, de nous informer, de nous former, de réfléchir et d’organiser les pratiques alternatives qui nous permettront de résister à tous les aléas.
D’ores et déjà, nous devons envisager la préparation de puissantes mobilisations populaires pour combattre les mesures liberticides et le saccage accéléré de nos droits sociaux dont le gouvernement français est à l’initiative.
Le Peuple Français a déjà largement exprimé son exigence que Macron et ses sbires rendent des comptes. De nombreuses procédures judiciaires ont été entamées en ce sens et les Renseignement Généraux font état des risques d’un embrasement social après le confinement.
Nous aussi devrons être au front pour que la lutte pour les Réparations s’élargisse aux conséquences de la défaillance des autorités françaises quant à la gestion de la catastrophe sanitaire et du confinement. Mais, plus fondamentalement, nous devons amplifier la lutte pour le droit à l’autodétermination qui nous permettra d’organiser un développement endogène et autocentré.
La crise actuelle, par son ampleur et ses effets, a clairement prouvé les limites du cadre institutionnel qui nous est imposé, la grave irresponsabilité des partisans de la dépendance et la nature nocive du modèle de « développement » dans lequel on nous enferme.
Notre salut ne viendra que de nous-mêmes.
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Nous avons l’occasion de reprendre notre vie en mains et nous en sommes capables. D’ailleurs, une fois de plus, notre peuple est déjà en train de prouver ses hautes valeurs de créativité, de générosité et de solidarité à l’occasion de la crise actuelle. Nous devons en être fiers.
Aujourd’hui, nous voulons lancer un appel solennel à la mobilisation, car l’avenir de notre peuple est en jeu.
Oui, nous sommes en guerre contre une minorité de prédateurs qui met la vie même des peuples en danger.
Il est incontestable qu’un consensus existe déjà chez nous sur la nécessité d’un développement autocentré visant notamment à organiser l’autosuffisance alimentaire. Nombreux sont ceux qui appellent à une convergence des résistances et des multiples initiatives qui existent sur les fronts économiques, éducatifs, culturels, etc.
Alors, combattons les divisions stériles ! Unissons-nous ! Impulsons l’organisation de notre peuple à la base ! Rassemblons-nous autour d’un projet alternatif consensuel ! Accordons-nous sur une stratégie intelligente et nous gagnerons cette guerre !

Martinique le 15 Avril 2020

Conseil National des Comités Populaires