L’Afrique au cœur de l’Unesco : Progrès, défis et nouvelles inscriptions

Biens africains : 9% des inscrits au Patrimoine mondial mais 25% de ceux « déclarés en péril »

L’Afrique, avec ses paysages variés et sa richesse culturelle incomparable, continue de se faire une place de plus en plus grande sur la scène du patrimoine mondial de l’Unesco. Pourtant, bien que le continent représente environ 9 % des sites inscrits, il demeure sous-représenté par rapport à la richesse de son héritage. Le récent ajout de deux nouveaux sites africains, le paysage culturel Did-Gid-Biy des Monts Mandara au Cameroun et le Mont Mulanje au Malawi, marque un tournant dans la reconnaissance de ce patrimoine unique.

Des progrès notables pour l’Afrique

La directrice générale de l’Unesco, Audrey Azoulay, a mis un accent particulier sur l’Afrique, soulignant la nécessité de renforcer la place du continent au sein du patrimoine mondial. Depuis 2018, plusieurs initiatives ont été mises en place pour pallier les inégalités. L’Unesco consacre aujourd’hui plus d’un quart de son budget total (27 %) à la préservation des sites africains, un engagement qui commence à porter ses fruits. La liste des sites africains inscrits a récemment atteint 108, un progrès certes notable, mais encore insuffisant face aux défis auxquels sont confrontés les pays du continent.

Des sites exceptionnels en péril

L’Unesco, tout en célébrant les nouvelles inscriptions, n’ignore pas la réalité difficile à laquelle sont confrontés de nombreux sites africains. En effet, près d’un quart des sites déclarés en péril se trouvent en Afrique. Les conflits armés, le réchauffement climatique, l’exploitation des ressources naturelles, et même les pratiques de braconnage, constituent des menaces réelles pour ce patrimoine.

Des sites tels que le parc des Virunga en République Démocratique du Congo, menacé par des conflits armés incessants, ou encore la ville historique de Tombouctou au Mali, largement détruite par les groupes armés jihadistes, en témoignent. En réponse, l’Unesco a mis en place des stratégies de sauvegarde, y compris des formations pour les experts locaux, l’utilisation de technologies de surveillance par satellite, et des partenariats avec les communautés locales pour une gestion durable du patrimoine.

Les nouvelles candidatures africaines : vers une plus grande diversité

Cette année, quatre nouvelles candidatures africaines sont en lice pour l’inscription sur la liste du patrimoine mondial. L’archipel des Bijagos en Guinée-Bissau, un sanctuaire pour les tortues marines et les oiseaux migrateurs, représente un modèle de conservation avec l’implication des communautés locales. De même, les forêts de Gola Tiwai en Sierra Leone, abritant des espèces rares telles que l’éléphant forestier et l’hippopotame pygmée, incarnent l’importance de préserver les écosystèmes uniques de l’Afrique de l’Ouest.

En outre, le paysage culturel des Monts Mandara au Cameroun et le Mont Mulanje au Malawi, récemment inscrits, rejoignent les rangs des sites africains d’exception. Le premier regroupe des vestiges archéologiques datant des XIIe à XVIIe siècles, tandis que le second, considéré comme une terre sacrée par les populations locales, demeure un lieu d’importance spirituelle, sociale et culturelle.

Un défi pour l’avenir

Cependant, malgré ces avancées, l’Afrique reste confrontée à de nombreux défis. Le manque de ressources, d’expertise technique, ainsi que les conditions politiques et environnementales difficiles sont des obstacles majeurs à la sauvegarde du patrimoine. En particulier, le réchauffement climatique exacerbe les risques, avec des phénomènes tels que les incendies de forêts, les sécheresses et les inondations, qui mettent en péril des sites naturels et culturels.

Pour remédier à cela, l’Unesco mise sur l’implication active des communautés locales et la formation d’experts africains. Des programmes de mentorat, comme celui lancé en 2021, forment des professionnels du patrimoine dans 46 pays africains, incluant même des pays jusqu’alors absents de la liste, pour renforcer les capacités locales et garantir une gestion pérenne des sites.

L’avenir du patrimoine africain au cœur des priorités mondiales

L’Unesco œuvre activement pour que le patrimoine africain soit mieux reconnu et préservé. Audrey Azoulay et ses équipes font de l’inclusion des sites africains une priorité absolue, non seulement pour préserver la diversité culturelle de l’humanité, mais aussi pour contribuer au développement durable du continent. La reconnaissance du patrimoine africain est désormais vue comme un levier important pour le développement économique, culturel et touristique de nombreuses nations.

Le chemin reste semé d’embûches, mais des initiatives prometteuses sont en cours. Si les efforts pour protéger les sites en péril se poursuivent, l’avenir du patrimoine africain semble un peu plus assuré, avec une meilleure visibilité et une plus grande prise en compte de ses spécificités uniques.

L’Unesco en chiffres :

  • Sites africains inscrits : 108 (en 2023)
  • Sites africains en péril : près de 25 % des sites mondiaux
  • Budget pour l’Afrique (2025) : 27 % du budget total de l’Unesco
  • Candidatures africaines actuelles : 4 sites dont 2 provenant de pays sans inscription préalable

Le processus de sauvegarde des sites africains est en marche, mais il faudra encore de la persévérance et des ressources pour garantir que cette richesse incroyable soit préservée pour les générations futures.

Jean Samblé