En ce début de ramadan, des femmes musulmanes militent pour un islam éclairé

— Par Pauline Rouquette —
Le ramadan commence ce dimanche 5 mai  en Martinique et le lundi 6 mai dans l’hexagone. À l’aube de ce mois de jeûne, les Voix d’un Islam Éclairé, mouvement pour un islam spirituel et progressiste, promeut une pratique libre, exercée en conscience plutôt que sous la contrainte.

La lune en a décidé ainsi, le ramadan débutera lundi 6 mai en France. Au cours de ce mois de jeûne, l’un des cinq piliers de l’islam, les fidèles sont invités à s’abstenir de boire, de manger et d’avoir des relations sexuelles, de l’aube au coucher du soleil – dès que l’on peut « distinguer un fil blanc d’un fil noir », dit le Coran.

Si le texte sacré de l’islam fait explicitement mention du jeûne, il existe autant de pratiques du ramadan que de croyants et d’interprétations des textes. Créé à l’initiative de deux femmes ayant embrassé la religion musulmane après l’étude solitaire des textes sacrés, le mouvement Voix d’un islam éclairé » (VIE), pour un islam spirituel et progressiste, invite à envisager le ramadan comme une union spirituelle, davantage que comme une contrainte.

Traductions et subtilités

« Le problème est que la jurisprudence islamique a érigé le jeûne du ramadan en pilier obligatoire, même si cela s’oppose à la subtilité du texte », estime ainsi Anne-Sophie Monsinay, cofondatrice du mouvement VIE avec Éva Janadin.

Pour étayer ce point de vue, les deux femmes, âgées de 29 ans toutes les deux, s’appuient sur la sourate 2, versets 183-187, qui aborde la pratique du ramadan, et plus précisément sur le verset 184, qui mentionne les exemptions possibles au jeûne. « Des jours comptés, mais qui de vous est malade ou en voyage, alors détermination de jours autres. Et, quant à ceux qui l’auraient pu, leur incombe un rachat : la nourriture d’un pauvre. Et, qui de plein gré accomplit un bien, c’est un bien pour lui, mais jeûner est meilleur pour vous, si vous le saviez ! »

C’est sur la fin du verset qu’insiste Éva Janadin, qui a adhéré à l’islam il y a une dizaine d’années.

« Le verset est très clair : ceux qui peuvent jeûner car ils sont en bonne santé, mais décident de ne pas le faire, ont le droit, d’après le Coran, de ne pas jeûner », explique-t-elle en référence au passage du verset évoquant le rachat de la nourriture à un pauvre qui incombe à tout fidèle n’ayant pas pu se soumettre au jeûne.

« Le verbe arabe utilisé ici [atâqa] signifie ‘être en mesure de, être capable de, pouvoir faire' », ajoute celle qui, ayant découvert l’islam lors de ses études supérieures, a également étudié l’arabe.

Selon elle, ce sont les traductions standards qui donnent un sens différent au segment, laissant ainsi penser que seules les personnes malades auraient la possibilité de ne pas jeûner. « Les traductions ne font que suivre la déformation des exégètes [personnes qualifiées pour l’étude approfondie d’un texte sacré, NDLR] qui a été de multiplier les règles pour obliger à jeûner. »

Une déformation liée à l’interprétation des exégètes, mais aussi à celle des juristes.

Les deux jeunes femmes, très pratiquantes, mettent en avant la contradiction entre « la question de l’obéissance à ce que l’on considère comme une obligation juridique en islam » et l’élan spirituel profond que suppose la pratique du jeûne dans le but de se rapprocher du divin. Ainsi, avance Éva Janadin, « il faut distinguer ce que dit l’islam et ce que dit le Coran. »…

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