Voilà où nous sommes rendus

Par Marie-Laurence Delor —

Constat 1

« Nous n’accepterons pas que de gens vivent leur vie alors que nous sommes en train de souffrir ». Cette phrase prononcée par une leader syndicale du monde agricole est la pus terrible que nous ayons entendue. Terrible parce qu’elle exprime une frustration et une haine incandescentes et aveugles portées par cette alliance tacite entre syndicat et voyous ; terrible parce qu’elle dit l’intention de ces gens : établir la terreur, faire payer à tous ce qu’on a subi. Une terreur dont personne ne sait jusqu’à quelle extrémité elle ira et jusqu’où elle sera acceptée par ceux qui en sont victimes. Une terreur dont se félicite un généralissime de pacotille en Guadeloupe et dont un petit chef martiniquais affirme l’utilité pour faire céder l’ennemi.

Constat 2

Un Président en campagne qui pour ne pas faire de vagues ne pose pas les limites, biaise et louvoie. Le problème est que l’interprétation qu’en fait le bric-à-brac protestataire guadeloupéen et martiniquais est que le pouvoir hésite, il a peur. On a vu ainsi s’installer une situation surréaliste où la Martinique comme la Guadeloupe sont quasi sous contrôle d’individus improbables qui en plein délire de toute puissance décident selon leur bon plaisir sur des barrages de ceux qui passeront ou pas tandis que d’autre brûle et pillent la nuit tombée.« La banalité du mal » dirait Hannah ARENDT…

Constat 3

Une société civile et politique qui ne s’est jamais vraiment souciée de ce bien commun essentiel que constitue le système de santé et qui en faisant crédit aux « idiots utiles » de la chlordécone – l’arbre qui cache la forêt – n’a pas réussi à se hausser à une vision globale. Voilà ce que j’écrivais dans un texte paru le 03/02/2020 sur Madinin’art :

« Nous sommes en risque sanitaire systémique. Il serait temps que les politiques et les collectivités martiniquaises le comprennent. Il serait temps que la société civile (associations, syndicats et autres groupes d’influence) s’en préoccupent. Il serait temps que les médias et les intellectuels s’y intéressent. Le risque sanitaire systémique peut s’entendre, dans le cas martiniquais, comme un effet cumulé de pollutions délétères (chlordécone, sargasse, brume de sable…) dans un contexte de faillite des structures de traitement des déchets de toutes sortes et de crise des politiques publiques de santé. La question de la chlordécone s’inscrit dans cette configuration globale d’urgence sanitaire. »

Les soignants y compris les médecins et les chefs de service se sont battus seuls pendant des années, dans l’indifférence générale pour tenter d’infléchir une politique de santé qui mettait à mal l’accès à tous à des soins de qualité. Et, on peut penser que bon nombre de ces soignants en souffrance ont vu dans l’opposition au passe sanitaire et à l’obligation vaccinale un exutoire, que la concurrence entre syndicats a sur-renchéri.

Nous sommes en conclusion dans une impasse dont le gouvernement par ses atermoiements porte en grande partie la responsabilité et où la notre est aussi engagée depuis le début. L’urgence absolue aujourd’hui c’est la 5ème vague et comme aucun de ceux qui prétendent défendre le peuple, alors qu’ils se vengent en réalité sur le peuple, ne veulent pas l’entendre j’ai bien peur qu’un engagement frontal soit inéluctable entre ces gens avec la population et avec la police. Car il faudra percer l’abcès… Un des enseignements à tirer est que les revendications sociales si elles ont servies bien souvent un mieux être du plus grand nombre se révèle être de plus en plus aujourd’hui un oubli, une aliénation du « bien commun ».

Le 25/11/2021

Marie-Laurence DELOR