— par Janine Bailly —

Au Portugal, le 42° Festival international de théâtre d’Almada, outre qu’il occupe les diverses salles de spectacle de la ville, prend aussi ses quartiers de l’autre côté du Tage, investissant à Lisbonne le Centre Culturel de Belém et la fondation Culturgest. Dans sa déclaration d’intention, « Ouvir o público / Écouter le public », le Directeur artistique Rodrigo Francisco rappelle la coutume selon laquelle, depuis 1987, le public du festival a voix au chapitre puisqu’il vote pour désigner sa pièce préférée, celle qui reviendra l’année suivante, « o Espectáculo de Honra / le spectacle d’honneur ». Une tradition qui, selon Rodrigo Francisco, dirait les liens du théâtre et de la démocratie, dont le « berceau commun remonte à la Grèce antique ».
Une des expositions organisées pour le festival permet aux spectateurs les plus assidus de se remémorer, par la grâce d’images et de courtes vidéos, toutes les pièces élues ! L’an passé, c’est La Tempesta qui a remporté les suffrages, dans la traduction de la pièce de Shakespeare, en langue napolitaine, qu’en fit Eduardo De Filippo – disparu en 1984 mais dont la voix enregistrée assure la narration et l’essentiel des dialogues.



Au Festival d’Almada, qui n’est pas ennemi de la gravité, le théâtre sait aussi se faire chambre d’écho de l’Histoire, aussi douloureuse soit-elle pour les hommes, et pour leur pays. Comme on le sait, le Portugal qui fut à la tête d’un vaste empire, sur le continent africain notamment, mena au Mozambique, en Angola et en Guinée-Bissau des guerres coloniales longues et meurtrières, et ce furent elles qui conduisirent le 25 avril 1974 à la Révolution des Œillets, aux indépendances effectives des pays colonisés, et à la chute de la dictature salazariste. En effet, ce que l’on nomme en portugais