Le philosophe Guillaume Pigeard de Gurber craint que la crise actuelle de la culture limite encore davantage la capacité des éditeurs, producteurs ou diffuseurs à faire exister le romancier inconnu, la cinéaste en herbe ou les comédiens en germe.
— Par Guillaume Pigeard de Gurbert, professeur de philosophie —
Tribune. Mise sous perfusion par le confinement, la culture est en train d’être achevée sous nos yeux par le reconfinement. Dans l’espoir de sauver ce qui peut encore l’être, les acteurs de la culture se recroquevillent par instinct de survie sur l’existant. Le tragique de cette situation est que la culture qui existe encore tue dans l’œuf celle qui n’existe pas encore.
Quel éditeur, quel producteur, quel diffuseur, quel média, dans l’arène du tout-marchand, aura encore, sinon l’idée, ne serait-ce que les moyens de ménager le droit à l’existence du romancier inconnu, du cinéaste en herbe, du comédien en germe, du poète éclaireur, du philosophe pionnier ? C’est bel et bien à cet assassinat tragique de la culture par la culture que nous assistons.
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Quand on parle du « monde de la culture », on parle de la culture au mieux comme s’il s’agissait d’un monde parmi d’autres, mais au pire et le plus souvent comme d’un département secondaire du monde réel : le monde économique, aux lois duquel celui de la culture doit se plier.

Guillaume Pigeard de Gurbert , professeur agrégé, docteur en philosophie, enseigne en khâgne .Membre du jury du Capes de philosophie. A enseigné la philosophie de l’art à l’institut Régional des Arts Visuels de la Martinique entre 2005 et 2010.
En élargissant l’extension du concept de temps, Kant en révolutionne la compréhension : le temps a en effet été restreint à la succession, alors que « les trois modes du temps sont la permanence, la succession, la simultanéité ». Kant révèle que le temps n’est pas seulement ce qui fait que les choses passent, mais aussi ce qui fait qu’elles arrivent en même temps et, plus fondamentalement encore, ce qui fait qu’elles durent. Cette extension du domaine du temps déclenche bel et bien une révolution qui va révéler la présence du temps là où il semblait absent : deux points ne pouvant se trouver à côté dans l’espace sans y être en même temps, la géométrie baigne dans le temps. De même, la substance des choses que les philosophes ont prise pour leur être éternel ou métaphysique n’était que leur permanence dans le temps, c’est-à-dire leur durée ! Kant met ainsi au jour un inconscient de la raison pure (c’est Kant qui parle d’inconscience) qui la montre influencée à son insu par le temps qu’elle croyait avoir dépassé.