Quel avenir pour le Festival d’Avignon ?

Toutes les manifestations culturelles étant interdites (au moins jusqu’au 15 juillet ?) le directeur d’Avignon supprime l’édition 2020.  

Contraint à l’annulation

« Je suis en train de vivre la pire soirée de ma vie, celle que je n’aurais jamais voulu vivre. » Au bout du téléphone, la voix d’Olivier Py est blanche. Le directeur d’Avignon, d’ordinaire si bavard, si lyrique, laisse passer de longs silences entre les mots. Le 8 avril dernier, il annonçait fièrement sur le site du festival – avec panache, défi, et peut-être inconscience – sa programmation 2020, et voilà que la déclaration d’Emmanuel Macron, ce lundi soir, ne laisse plus aucun espoir au meilleur festival de théâtre européen.

Le président de la République a en effet annoncé la suppression de toutes les manifestations culturelles au moins jusqu’au 15 juillet. Et « rien n’est sûr après », poursuit Olivier Py, qui avait un temps caressé l’idée d’un festival allégé, qui aurait pu démarrer le 15 juillet.

« Le 20 avril, je vais donc convoquer par Skype un conseil d’administration exceptionnel, à qui je soumettrai mon plan d’annulation. Nous devrons faire les comptes, envisager comment dédommager au maximum les artistes invités et verser les salaires des permanents. Le festival n’étant assuré que pour des catastrophes météorologiques et non pour des épidémies que personne ne pouvait imaginer, c’est un terrible manque à gagner. Pour les artistes du In comme du Off, pour les productions engagées, qui vont devoir s’arrêter. Et pour la ville d’Avignon enfin, dont la survie économique dépend du festival, qui lui rapporte 100 millions d’euros chaque été. Sans compter ce que cette annulation implique pour l’édition 2021, dont 70 % étaient déjà programmés. »…

Source : Télérama en ligne. Fabienne Pascaud. Publié le 13/04/2020

https://www.telerama.fr/scenes/festival-davignon-olivier-py-contraint-a-lannulation,n6626960.php

Envisager l’avenir : la visioconférence du 20 avril 2020 : Paul Rondin : « La 74e édition du festival est morte, nous avons le devoir de nous projeter après ».

Depuis l’annonce de l’annulation, le Conseil d’administration du Festival d’Avignon s’est réuni par visioconférence le 20 avril 2020. Une idée a germé à cette occasion, celle d’une semaine d’art, fidèle aux origines, pour dire que le territoire doit rester en vie. 

Joint par téléphone, Paul Rondin, directeur délégué du Festival affirme que « nous méritons tous mieux que le défaitisme ». Et cela est suivi d’effet. Deux grands axes sont tracés.

— Dans l’urgence : éviter la précarité aux équipes comme aux personnes qui auraient dû travailler pour la 74e édition : salariés permanents, mais aussi intermittents et saisonniers qualifiés réguliers, qui sont des professionnels du spectacle vivant à part entière, indépendamment de leur flexibilité d’emploi ou de leurs nombreux employeurs.

— Dans une second temps, qui se pense dès maintenant : garantir la pérennité de l’outil, la continuité de l’activité et  imaginer la relance. De l’Association de gestion du Festival jusqu’au secteur du spectacle vivant dans son ensemble en passant par l’impact territorial, la réponse ne peut être que collective.

Il s’agit avant tout de faire survivre les compagnies et « elles sont toutes sauvées ». Trois possibilités : Soit elles sont programmées à l’automne dans le cadre de leur tournée, soit lors de la 75e édition en 2021, soit elles sont indemnisées. Il ajoute « La 74 e édition est morte on le sait, et on a le devoir de se projeter après, on a bien le projet de faire une semaine d’art ». 

Concernant l’automne, rien n’est pour le moment figé. L’idée de la semaine d’art remonte aux origines : c’est comme cela que tout a commencé en 1947, par « une modeste semaine en septembre ».  Paul Rondin ajuste « ce ne sera pas septembre ».  Si cela a lieu, ce sera pendant les vacances de Toussaint, car elles sont nationales, et plutôt la deuxième semaine.  Ce temps partagé pourrait permettre au public de venir plus largement. C’est le pari qui est fait. Faire vivre le territoire en le rendant attractif.

Deux temps sont pensés ensemble : l’annulation et la relance. Et cette relance pourrait commencer comme cela, par « 4 ou 5 spectacles » de la 74e qui seraient joués dans les lieux « classiques » du festival : la collection Lambert, la FabricA, les Pénitents Blancs, Benoit XII, car ce sont « des lieux déjà équipés ». A ces spectacles s’ajouteront « quelques invités pour venir parler sur le modèle des ateliers de la  pensée »…

Source : Toute la culture, scène numérique

27 AVRIL 2020 | PAR AMELIE BLAUSTEIN NIDDAM

Position du Toma : Greg Germain propose une programmation virtuelle.

Le Théâtre d’Outre-mer en Avignon est annulé, mais Greg Germain propose une programmation virtuelle.

« Je ne me verrais pas jouer devant une rangée de spectateurs avec des masques », concède Greg Germain, qui a créé il y a vingt-trois ans le Théâtre d’Outre-mer en Avignon au côté de Marie-Pierre Bousquet. Depuis, chaque année la scène du théâtre de la Chapelle du Verbe Incarnée propose des spectacles créés par des artistes ultramarins, dans le cadre du festival d’Avignon. Mais ce mois de juillet le lieu restera fermé, en raison de l’épidémie de coronavirus. L’ensemble du Festival d’Avignon est annulé.

Rebondir

Pas question pour autant de laisser le rideau baissé sur la création en outre-mer : « cyclones, tsunamis, tremblements de terre…  L’outre-mer connait bien les traumatismes. Mais nous sommes résilients. On efface tout et on va de l’avant », explique l’acteur et metteur en scène guadeloupéen Greg Germain, qui a décidé avec son équipe de mettre en place une programmation alternative 100% virtuelle.

Une radio et une télévision TOMA 

Du 3 au 14 juillet prochain, le site du Théâtre d’Outre-mer en Avignon proposera des captations de spectacles présentés lors de précédentes éditions ou dans des théâtres liés avec le TOMA, comme le CDN Rouen ou Les Halles de Schaerbeek à Bruxelles. Il diffusera également des extraits de pièces programmées cette année, et que les compagnies vont lui envoyer depuis la Guyane, la Nouvelle-Calédonie, la Guadeloupe et La Réunion.

Enfin, l’antenne éphémère Radio TOMA, prendra ses quartiers pendant les 12 jours de ce mini festival numérique. L’équipe a deux mois et demi pour mettre tout ce nouveau programme en musique.

« Nous ne pouvions pas dire aux compagnies :  c’est annulé, tant pis pour vous ! »

Quant aux artistes dont les spectacles étaient prévus cet été, ils sont tous invités à reprogrammer leur pièce l’année prochaine. Lolita Monga de La Réunion, Odile Pedro-Leal de la Guyane, et Florence Naprix de la Guadeloupe ont déjà confirmé leur présence pour l’édition 2021 du TOMA.

Tessa Grauman Publié le 24 avril 2020

Source : La1ere.francetvinfo

P.S. : Précision apportée dans le discours d’Édouard Philippe ce 28 avril 2020 : « Je veux préciser que les grandes manifestations sportives, culturelles, notamment les festivals, les grands salons professionnels, tous les événements qui regroupent plus de 5000 participants… ne pourront se tenir avant le mois de septembre… »

Fort-de-France, le 28 avril 2020