Oui à l’augmentation des salaires, non à l’aumône

— Par Max Dorléans (GRS) —

On a vu ces dernières années, aussi bien aux Etats-Unis d’abord qu’en Europe ensuite, en France notamment, quelques multimilliardaires et grands patrons faire part, face à la dégradation sociale et aux moyens limités des budgets sociaux en raison des politiques favorables au patronat, de leur disposition à payer davantage d’impôts. Une proposition sous forme d’aumône, pour répondre un peu mieux aux besoins sociaux grandissants, et qu’ils consentent en écorchant légèrement l’actuelle répartition des richesses très largement favorable à leurs intérêts.

Aujourd’hui, en pleine crise, on entend une chansonnette de même nature de la part de quelques patrons, enclins eux aussi, à intervenir dans la période actuelle, toujours dans la répartition entre salaires et profit, par une augmentation un peu « significative » des salaires. Un geste apparemment généreux qui ne se comprend que par rapport à différents éléments. D’abord, avec la crise sanitaire, de nombreux secteurs ont vu une hémorragie de leurs effectifs, et font donc face à un manque réel de main d’œuvre, d’où une offre de meilleurs salaires à l’embauche. Ensuite, augmenter les salaires, avec la faible inflation, c’est donner un peu d’oxygène au système en gonflant la demande solvable aujourd’hui tendanciellement en berne. Et enfin, c’est chercher, face à la colère grandissante qui s’exprime contre leur système capitaliste et les profits faramineux du patronat et des milliardaires (57 milliards de bénéfices pour les entreprises du CAC 40 au premier trimestre 2021), à désamorcer celle-ci, et faire en sorte préventivement qu’elle ne soit pas le prélude à une remise en cause globale du capitalisme.

Alors, refusons l’aumône et la charité que certains, pour leurs intérêts bien compris, sont prêts à consentir, et arrachons aux capitalistes le pouvoir qu’ils ont sur l’économie ! Les fins de mois de plus en plus difficiles et qui arrivent de plus en plus tôt ne sont pas une fatalité. Et l’enrichissement des nantis n’est que la contrepartie de l’accroissement de l’appauvrissement et de la misère croissante du plus grand nombre.

Parce que d’autres choix sont possibles, faisons en sorte que notre quotidien change radicalement. Ce qui passe par de toutes autres conditions de vie et de travail, de bien meilleurs salaires, davantage de temps libre pour nous-mêmes, une consommation revue et corrigée, un rapport différent et une protection de la planète. Mais cela n’est possible que si nous repensons l’actuelle répartition des richesses, que si nous prenons sur les profits, et donc que nous refusons l’aumône que certains sont prêts à nous donner !

Max Dorléans (GRS)

Pour un service public du grand âge, financé par la Sécurité sociale.

La récente publication du livre « Les fossoyeurs » de V. Castanet vient remettre dans l’actualité l’information sur les conditions inadmissibles de vie en EHPAD, notamment au sein du groupe Orpéa côté en bourse.

Une information sur une situation qui n’a rien de nouveau (que nous évoquions il y a plus de 5 ans dans notre brochure « Pour une Sécu et une santé digne du 21 ème siècle), et qui montre la cupidité des capitalistes dans ce secteur et ce marché de « l’or gris.

Une cupidité d’autant plus outrageuse que ces groupes sont financés par de l’argent public, qu’ils s’en fouttent des plus âgé/es, puisque ce qui leur importe, c’est leur profit obtenu grâce à des économies en tous genres. D’abord, réduction du nombre de personnel formé, ensuite diminution de la quantité et qualité des repas fournis, enfin rationnement des moyens matériels divers (protections, gants, masques…) mis à disposition pour les soins. Un livre qui révèle que cette recherche du profit et de la rétribution des actionnaires ne pouvait qu’engendrer une colère grandissante des personnels qui ne supportent plus cette maltraitance institutionnelle mettant en danger la santé des plus âgé/es, et qui s’est traduite ces dernières années par d’importantes mobilisations soutenues par les résident/es eux-mêmes, leurs familles, leurs proches et quelquefois par des directeurs d’EHPAD. Une situation pourtant connue des différents gouvernements depuis des années, de Sarkozy notamment avec la loi « Grand Âge et de l’autonomie » qui n’a fondamentalement rien changé à celle-ci. Bien au contraire, puisque celles et ceux qui parmi les salarié/es qui ont dénoncé cette situation se sont vu sanctionner, tout comme les résidents priés de partir lorsque leurs familles ont dénoncé les mauvais traitements.

Néanmoins, si les révélations du livre pointent Orpéa et plus généralement le secteur privé, les EHPAD du secteur public et du secteur associatif non lucratif, calquent leur gestion sur le privé, puisque là aussi, c’est la recherche d’économie qui est visée bien plus que l’amélioration de la prise en charge des personnes âgées.

Aujourd’hui, surtout chez nous où les plus de 60 ans devraient représenter en 2030 plus de 40% de la population, prendre en charge correctement et dignement nos ainé/es passe à la fois par l’expropriation des grands groupes capitalistes (Orpéa,Korian…) et par la mise en place d’un véritable service public du 4 ème âge. Pour cela il faut, qu’il s’agisse d’EHpad ou de prise en charge à domicile, du personnel formé, en nombre suffisant, avec les moyens suffisants pour permettre à nos ainé/es de garder leur autonomie et de vivre leur dernier instant de vie le plus dignement possible. Car loin d’être un fardeau, nos ainé/es sont une composante de la société, et une richesse pour elle avec leur expérience pour la collectivité.

Max Dorléans (GRS)