Nécrologie – Liliane Chauleau

C’est avec une profonde émotion que nous rendons hommage à Liliane Chauleau, historienne et chercheuse dont l’œuvre a durablement enrichi la connaissance de l’histoire sociale, religieuse et culturelle de la Martinique et des Antilles.

Par ses travaux rigoureux et profondément humains, Liliane Chauleau a donné une voix à celles et ceux que l’histoire a trop longtemps relégués au silence. Son ouvrage majeur, La voix des esclaves. Foi et société aux Antilles (XVIIᵉ–XIXᵉ siècle), publié en 2012 aux Éditions L’Harmattan, demeure une référence essentielle. Elle y analyse avec finesse la condition servile, façonnée par le cadre juridique et la position de l’Église, tout en mettant en lumière la vie intérieure, la force de caractère et la spiritualité des esclaves. Son regard attentif sur la transmission de cette mémoire et de ces formes de foi dans la société antillaise contemporaine témoigne de son engagement intellectuel et moral.

Historienne du quotidien, Liliane Chauleau s’est également attachée à faire revivre la Martinique d’hier dans toute sa complexité et sa vitalité. Dans Pierrotins et Saint-Pierrais : la vie quotidienne dans la ville de Saint-Pierre avant l’éruption de la montagne Pelée de 1902 (2003), elle restitue avec sensibilité l’effervescence d’une cité alors rayonnante, admirée dans toute la Caraïbe, donnant une place particulière aux femmes et à la jeunesse qui animaient la ville jusqu’à sa disparition tragique.

Ses travaux antérieurs, notamment Case-Pilote, le Prêcheur, Basse-Pointe et Dans les îles du Vent : la Martinique (XVIIᵉ–XIXᵉ siècle), publiés en 2000, témoignent de l’ampleur de ses recherches sur l’Ancien Régime, la Révolution française, les périodes de domination britannique et les mutations sociales et économiques du XIXᵉ siècle. Elle y conjugue précision historique et souci constant de comprendre les sociétés antillaises dans leur profondeur humaine.

Liliane Chauleau laisse derrière elle une œuvre exigeante, accessible et précieuse, qui continue d’éclairer chercheurs, étudiants et lecteurs passionnés d’histoire antillaise. Sa disparition est une grande perte pour le monde intellectuel et culturel, mais sa voix demeure, vivante, dans les pages qu’elle nous a léguées et dans la mémoire collective qu’elle a contribué à préserver.