— RS n° 425 lundi 15 décembre 2025 —
L’élément nouveau de la situation des municipalités de Martinique, découle de l’évolution de la configuration politique globale. Cette dernière reste à mettre en rapport avec les évolutions économiques, sociologiques, géographiques lourdes, sur lesquelles il conviendra de revenir. Pour l’heure, disséquons-en l’aspect politico-institutionnel.
Par rapport aux époques d’affrontements idéologiques évoqués dans notre précédente édition (RS n°424), la nouveauté est la succession des recompositions politiques avec leurs conséquences au niveau des luttes municipales. Au grand clivage autonomistes/assimilationnistes (PCM/PPM versus DROITE/PS), a succédé le fort conflit PPM/MIM. Cette querelle a structuré la vie politique de façon très pesante.
Il a signifié la course effrénée aux alliances, menée par chaque camp. Le système électoral antidémocratique régnant encore (barre pour fermer la route aux courants minoritaires, et prime pour transformer le courant arrivé en tête en courant dominant absolu) a aggravé les choses.
Dans les alliances extravagantes conclues de part et d’autre, celle réalisée entre le MIM et la droite de Monplaisir mérite une mention spéciale par l’ampleur de ses effets délétères sur le « mouvement anticolonialiste » au sens large. La dislocation en deux temps de cet attelage (la droite, puis le RDM quittant le navire), est contemporaine d’un affaiblissement de presque tous les partis politiques. Droite, PPM, composantes diverses du « camp patriotique », ont perdu en substance et en crédibilité.
Cette perte de poids et de pouvoir de contrôle sur les initiatives politiques, a ouvert un espace pour des contestations extra-institutionnelles plus ou moins inspirées, quoiqu’elles en disent, du grand mouvement de février 2009. Mais, elle a aussi accentué la floraison des ambitions électorales personnelles dépourvues de contenu idéologique, ou en tout cas, le cachant plus ou moins consciemment.
À la lecture des programmes des nouveaux candidats aux diverses élections, on peut souvent se demander ce qui les différencie quand ce n’est pas le fringant de leurs nœuds papillons (pour la gent masculine) ! La défaite historique de la droite ne s’accompagne-t-elle pas là, d’une victoire idéologique qui est la disparition du débat politique chaque fois que pointe une élection ? La nature ayant horreur du vide, on a vu surgir dans la municipalité foyalaise l’appel à la « culture d’entreprise », et dans les majorités successives de la Région puis de la CTM, les théories du privé comme solution systématique pour le développement économique. C’est de là que vient le désir « d’assoiffer l’âne », c’est-à-dire de baisser les salaires réels comme voie royale contre le « laxisme des salariés » (on peut noter que les cadres qui prônent cette thérapie de choc ne se l’appliquent jamais à eux-mêmes ; bien au contraire !).
Dans un tel contexte, les « citoyen·ne·s » remplacent les classes sociales dans les programmes électoraux, on se veut le porte-parole de « tous les habitants » de la ville (ville capitale ou pas), on ne se distingue plus guère que par son habileté dans la com…, sa promesse de sérieux, d’honnêteté, de modernité créative, sans s’engager à mettre en place le moindre mécanisme de contrôle populaire concernant le respect de ces belles promesses.
Sans vouloir vexer d’excellentes personnes, on doit interpeller celles et ceux qui proclament : rangez-vous derrière mon panache blanc ou multicolore, on prendra toujours les bonnes idées qui viendront ! Ou encore : on aura le temps de poser les questions les plus graves, concentrons-nous sur les choses aussi banales qu’évidentes. Ou encore, la question essentielle c’est « tiré yo la ! », sans trop de précision sur ce qu’on fera à la place de celui (ou celle) qu’on veut « tiré la ». Ou encore : le maire en place fait de bonnes choses, mais je ferai mieux, sans dire en quoi ni comment.
Le problème de tous ces discours c’est l’ignorance, malgré les dires contraires, de la gravité des problèmes se posant aux peuples de nos régions et du monde. Il y a pourtant urgence à mettre en œuvre d’autres modèles, d’autres stratégies centrées sur les intérêts des masses laborieuses. Tout ne dépend pas des élections en général et des élections municipales en particulier. Nou sav sa !
Mais il faut aujourd’hui construire des points d’appui pour la lutte, des perspectives claires dès maintenant pour affronter les forces de la pwofitasyon économique, de la domination politique, de l’égarement culturel, du mépris pour l’écologie. Dès aujourd’hui, nous avons besoin d’autres politiques municipales.
À suivre : 3. Les municipalités dont nous avons besoin pour demain.
Lutte syndicale, droits humains : créer les conditions pour avancer !
La CGT est en Martinique, la seule confédération à avoir appelé à la mobilisation deux fois dans la dernière période contre les budgets de la Sécu et de la France. Ces actions traduisent la compréhension juste que les débats parlementaires ne suffiront pas à arrêter le cours de la politique du grand Capital mené par Macron et ses gouvernements successifs. Il est clair aussi que des journées espacées de lutte ne suffiront pas à bloquer cette politique, et que le poids de la Martinique est évidemment faible dans ce combat.
Pour créer des conditions nettement plus favorables à la lutte, nous proposons :
. -une coordination réelle avec le mouvement ouvrier de France, devant entendre que nous ne sommes pas son simple prolongement automatiquement aligné sur son calendrier.
-un effort de rapprochement avec les syndicats des autres colonies pour agir ensemble.
-une démarche unitaire têtue en Martinique même.
-une tactique visant à associer la lutte pour les revendications générales avec les revendications fortes du terrain
Cette réponse que nous proposons pour les problèmes généraux ne remplace pas, mais complète ce que nous prônons et/ou pratiquons sur les revendications spécifiques à nos pays/territoires. Nous ne cessons de rappeler à cet égard qu’au-delà des démarches unitaires aussi fréquentes que possible, nous soutenons la proposition de congrès ouvrier et populaire, de conférence des mouvements populaires, de Convention anticolonialiste et anticapitaliste, etc …, quel que soit le nom qu’on donnera à la chose.
Récemment, deux manifestations se sont déroulées en appui à la Palestine et pour le respect des droits humains à l’échelle de la planète.
Malgré le nombre de signataires de ces appels, la participation n’a rassemblé que des dizaines au lieu de centaines de militant·e·s.
Ces deux actions positives ont permis la présence dans la rue le 29 novembre, et l’opportunité d’entendre des exposés de qualité le 10 décembre, qu’il s’agisse de la Palestine, de la Kanaky, des droits des femmes et des LGBTQI, de la problématique liée à la police et à la justice coloniale. Un montage pédagogique a retracé les grandes étapes du combat contre le chlordécone. Cette abondance de thèmes a rendu obligatoire le renvoi d’autres essentiels à une date ultérieure.
La nécessité de poursuivre cette bataille politique et idéologique est évidente. Il faut en convaincre toutes les forces progressistes pour hisser l’internationalisme agissant au niveau qu’exige la situation mondiale. Le chemin à parcourir reste important.
Au nom de la paix, Trump sème la guerre !
Quelle sinistre ironie ! Le sieur Donald Trump rêve paraît-il du prix Nobel de la paix ! Il a été doublé par aussi extrémiste que lui en la personne de la cheffe des partisans du coup d’État anti-Maduro. Mais Trump n’a rien à envier à son alliée putschiste.
Il multiplie les actes guerriers. D’un côté main il absout le criminel Poutine, pour la simple raison que leur idéologie est très proche, et que le bloc soviétique n’existe plus. De l’autre, il appuie et arme les fascistes au pouvoir en Israël. Dans le même temps, il nous rappelle le sens de son slogan. « Make Américain Great Again », c’est revivifier la doctrine du dix-neuvième siècle US : faire main basse sur le continent américain, avec la différence qu’aujourd’hui le continent américain n’est pas seul visé.
Il le dit et le fait avec le style fasciste qui est le sien. Il chasse sans ménagement les immigrants mexicains, haïtiens, vénézuéliens ou africains ou asiatiques. Il interdit les entrées. Il étend au monde entier le fichage qu’il pratique sur les citoyens US suspects de non-conformité. Il déclare sans rire, qu’il peut lâcher une bombe sur Mexico. Il débaptise le golfe du Mexique, laisse son ministre traiter Puerto-Rico de « poubelle flottante », injurie les chefs d’États et les pays de son choix. Il fait libérer un trafiquant de drogue, ancien président du Honduras, manipule les élections dans ce pays comme il l’a fait par ses dollars, celles d’Argentine. Il exige des tribunaux brésiliens la libération du putschiste Bolsonaro. Il prétend s’emparer du canal de Panama.
Après avoir déclaré vouloir annexer le Groenland, le voici qui concentre sa rage impérialiste sur le Venezuela. 80 occupants de bateaux venus du sud de la mer Caraïbe ont été exécutés sans jugement, sous prétexte de trafic de drogue réel ou supposé. Aucun n’a été arrêté, comme ce serait le cas si on voulait prouver leur qualité de trafiquants, et remonter les filières. Au contraire, l’armée US est attaquée en justice pour « crimes de guerre » après avoir tué sur ordre des personnes jetées d’un bateau déjà bombardé et détruit. Une armada US comportant le plus grand sous-marin nucléaire au monde, est au large du Venezuela. Plus de 12.000 soldats US sont sur le pied de guerre dans la mer caraïbe. Un pétrolier vénézuélien a été saisi par le va-t’en-guerre de Washington. Cet enragé annonce avoir ordonné à la CIA de renverser Maduro. Les menaces de débarquement sont répétées. Même dans les pires moments de la guerre froide, on n’avait vu une telle accumulation de provocations bellicistes.
Dans le même temps, la croisade de soutien à la fascisation du monde se poursuit. Trump invite l’Europe à chasser ses immigrés, à mener fermement une guerre de « civilisations ». Il soutient tout ce que l’Europe compte comme apprentis nazis. Surfant sur la panoplie des réseaux sociaux tenus par la fachosphère internationale, il entreprend d’embrouiller les cerveaux des classes populaires par un assomoir idéologique dont la puissance atteint des sommets jamais égalés dans le monde dit « libre ». Jusque chez nous, on trouve des victimes de cet endoctrinement y compris chez les exploité·e·s qui devraient en être les adversaires les plus résolu·e·s.
Aujourd’hui les luttes contre l’impérialisme et contre la fascisation du monde ne doivent faire qu’une. « Au bout du capitalisme, il y a Hitler » a dit depuis fort longtemps, Aimé Césaire. Aujourd’hui, où capitalisme et impérialisme agissent comme des brutes blessées, il serait temps de s’en souvenir.
