« Mortel Rafting! & « Résistance ! »

— Par Patrick Mathelié-Guinlet —

Mortel Rafting!

On ne remonte pas le cours du fleuve du temps…
Ce n’est pas un long fleuve tranquille
avec de hauts-fonds et des îles,
il s’écoule avec l’impétuosité du torrent :
on ne peut qu’en suivre le courant
en déjouant ses rapides, ses mortels tourbillons
mais on finira dans la mer de toute façon,
celle que les Bretons nomment “mor” avec une certaine justesse…
La vie est un frêle esquif qu’il faut écoper sans cesse,
manœuvrer pour éviter de sombrer dans l’oubli profond.
Les gens, les lieux et les années
défilent à vive allure sur les côtés,
laissant à peine le temps de les graver
dans la mémoire, trop vite effacés…
En un instant, le présent se fait passé,
dévoré par un futur trop pressé de se “présenter”!
Alors, on ne peut que se laisser flotter
à la surface, par le courant dérivé inéluctablement
vers la dissolution de l’océan…

Résistance !

Dans la tempête du temps,
faisant eau de toute part,
le bateau sombre lentement…
C’est trop tard
pour un sauvetage :
la vieillesse est un naufrage
au “bénéfice” de l’âge !
Tandis que la tête se vide,
le visage se ride,
le corps s’use et se flétrit,
s’érode aussi l’esprit…
L’oubli, prédateur insatiable
tapi dans l’ombre, est à l’affût,
prêt à dévorer le moindre souvenir
d’une mémoire de plus en plus confuse.
D’une vie devenue vague ne subsiste plus
que l’écume jonchant le sable
déserté de la plage…
Rien de glorieux dans le fait de vieillir.
Le temps est un maître
auquel on ne peut que se soumettre
comme l’ont fait avant nous nos ancêtres…
Alors mieux vaut en rire
comme un ultime défi
à l’atroce entropie
et, tant qu’on le peut, écrire…
Rien ne sert de verser des larmes
car notre meilleure arme
pour tromper l’ennui,
la mort et l’oubli
reste encore la poésie !

Patrick MATHELIÉ-GUINLET