Les Villes des Musiques du Monde célèbrent l’esprit de tolérance de l’Al-Andalus

— Par Fara C. —

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Aziz Sahmaoui Photo : ManuelLagosCid

Fiesta sévillane, superbes concerts et créations, ateliers de cuisine, spectacles pour enfants… Le festival du 9-3 invite à la rencontre, sous un seul étendard : celui de notre humanité partagée.

Au son joyeux des guitares flamencas et gitanes, le public a inauguré, le 10 octobre, le 16e festival Villes des Musiques du Monde, lors de la Canal’cade. Cette croisière musicale sur le canal de l’Ourq, du quai de la Loire au débarcadère à la Porte d’Aubervilliers, vise à relier Paris et la périphérie.

Cette édition, sous-titrée « Les Andalouses », souhaite raviver l’esprit de tolérance de l’Al-Andalus, qui rassembla les terres de la péninsule Ibérique sous autorité musulmane de 711 à 1492, et où les savants et artistes musulmans, juifs et chrétiens, grâce à leurs échanges, firent d’Al-Andalus un foyer culturel européen.

La parade andalouse a amené le public au Magic Mirror d’Aubervilliers, où plus de six cents spectateurs ont découvert la création « Les Andalousies – du Bosphore à Gibraltar ». Le festival s’attache à faire découvrir le quartier de Saint-Denis, surnommé « la petite Espagne », bâtie au gré des vagues d’immigration espagnole. Le 25 octobre, précisément à la petite Espagne (5 et 10 euros) et, la veille, à Mon treuil (18h30, Halle de la Croix-de-Chavaux, accès libre), se déroulera une exceptionnelle fiesta sévillane, avec dégustation de paella et initiation à la danse, avant le concert de Giraldillo.

21 villes partenaires, une riche affiche, des tarifs modiques

Voix saisissante de Rosario La Tremendita (le 23, à Pierrefitte) ou d’Esperanza Fernández (le 30, à Aubervilliers), tablaos flamenco (les 24 et 25, à Paris, au Flamenco en France), battle hip hop sur rythmes andalous (le 30, la Courneuve), guitare se brûlant à la buleria sous les doigts agiles de Juan Carmona (le 4 novembre, Cabaret sauvage), appel à la transe d’Aziz Sahmaoui et son envoutante University Of Gnawa (le 5, Aubervilliers)… Impossible de détailler la plantureuse programmation aux tarifs modiques. A travers le riche réseau des vingt-et-une villes partenaires, nombreuses sont les invitations à se rencontrer, sous un seul étendard : celui de notre humanité partagée.

Avec la création « Bab Cantilènes », que présentera par Jean-Marc Padovani (le 5, Espace Renaudie), c’est à un âtre de conscience et d’inventivité que nous réchaufferons nos âmes malmenées par l’actualité. Jazz, flamenco, rythmes du Maghreb, arabesques orientales s’embrasseront sur des partitions du leader, saxophoniste et compositeur, au sein desquelles surgiront des flambées d’improvisation.

A ses côtés, les complices de longue date Frédéric Monino et Alain Bruel, la chanteuse de flamenco Paloma Pradal, la flûtiste franco-syrienne Naïssam Jalal et Dawoud Bounabi, d’origine algérienne. « Il ne s’agit pas de fusion, mais de rencontre, dans le sens profond du terme », souligne Jean-Marc Padovani. Sort, aujourd’hui, son splendide album en hommage au regretté batteur et compositeur Paul Motian (« Motian In Motion »). Le saxophoniste l’a forgé selon la même philosophie : la primauté du chant intérieur, chassant tout étalage de virtuosité.

Visas refusés, insurgeons-nous et venons soutenir le festival

Nouveauté du festival, la scène jeune public accueille des événements de haute qualité. Hélas!, suite au refus des visas par l’Ambassade de France, la résidence artistique et les spectacles de la troupe Awa Guinean Drums ont été annulés, et remplacés au pied levé par « Les aventures du Prince Ahmed » (le 28). Kamel Dafri et André Falcucci, chevilles ouvrières du festival, s’insurgent : « A l’heure de la mondialisation, les biens, les services et les flux de capitaux circulent librement. Il n’en va pas de même pour les artistes, provenant en particulier du Maghreb et de l’Afrique Subsaharienne ».

Jusqu’au 8 novembre, http://www.villesdesmusiquesdumonde.com/.
L’Humanité