Le nombre de victimes de violences conjugales enregis­trées en 2021 a augmenté de 21 % par rapport à 2020

3 des 5 départements d’Outre-mer parmi les 10 dépar­tements enregistrant le plus de violences conjugales

Une hausse de 21 % des victimes de violences conjugales enregistrées en 2021, mais pour un quart d’entre elles, ces faits sont antérieurs à 2021
Le nombre de victimes de violences conjugales enregis­trées en 2021 a augmenté de 21 % par rapport à 2020. Cette hausse est de la même ampleur que celle obser­vée en 2019 (18 %), après une progression plus limitée en 2020 (+12 %). L’évolution du nombre de victimes enregis­trées par les forces de sécurité ne rend cependant pas compte directement de l’évolution de la délinquance car elle reflète également celle de la propension à porter plainte, qui dépend tout à fois de la nature de l’infrac­tion, du contexte dans lequel elle a été commise, de l’évolution des comportements dans la société pouvant favoriser la libération de la parole des victimes mais aussi des conditions d’accueil réservées aux victimes qui portent plainte et des dispositifs de protection ou de sanction mis en place.
On peut faire l’hypothèse que la sensibilisation de plus en plus forte de la société au phénomène des violences conjugales et les mesures adoptées à l’issue du Grenelle des violences conjugales pour encourager les victimes à porter plainte ont conduit à une libération de la parole qui a profité davantage aux faits anciens qu’aux faits les plus récents. En effet, la part des faits anciens (commis antérieurement à l’année de leur enregistrement) n’a cessé d’augmenter depuis 2016, passant de 18 % à 28 % en 2021. L’évolution du nombre de victimes enregistrées chaque année pour des faits commis au cours de la même année présente cependant une tendance à la hausse, mais atténuée par rapport à l’augmentation du nombre total de victimes enregistrées, +60 % depuis 2016 contre une augmentation de 82 % pour l’ensemble des victimes, et +17 % de 2020 à 2021 contre +21 % pour l’ensemble (figure 2).
Les violences physiques enregistrées, qui restent les plus fréquentes, sont parmi celles qui progressent le moins entre 2019 et 2021 (+13 % par an en moyenne). Au sein de ces violences, les plus graves (ITT supérieure à 8 jours) sont stables. Quant aux violences criminelles, leurs effectifs sont trop faibles pour qu’une tendance se dégage ; c’est en particulier le cas pour les morts vio­lentes au sein du couple, dont le total fluctue autour de 150 depuis 2016, avec un nombre de victimes en 2021 en hausse par rapport à 2020 mais en baisse par rapport à 2019.
Si globalement les violences verbales et psychologiques enregistrées sont celles qui augmentent le plus entre 2020 et 2021 (+35 %), cette forte augmentation est sur­tout due aux atteintes à la vie privée qui augmentent de 143 %. Cependant, cette hausse est difficile à interpréter. Elle peut traduire le fait que ce type d’infraction est cer­tainement mieux repéré dans les données enregistrées par les forces de sécurité depuis la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes conjugales. Cette loi fait du caractère conjugal de l’infraction une circonstance aggravante en matière d’appels téléphoniques malveil­lants, d’usurpation d’identité et d’atteinte au secret des correspondances, aboutissant à la création de nouvelles infractions d’atteintes à la vie privée entre conjoints. Ainsi, ces infractions ne sont spécifiquement repérables comme infractions conjugales qu’à compter d’août 2020, et si dans les faits, elles existaient avant cette date, elles étaient sans doute sous-estimées (encadré 1). Parmi les autres infractions enregistrées, le harcèlement entre conjoints augmente de 27 % entre 2020 et 2021, les menaces de 24 % et les injures et diffamations de 12 %.
Les violences sexuelles conjugales enregistrées croissent de 26 % : alors que les agressions sexuelles stagnent, les viols ou tentatives de viols enregistrés augmentent de 31 %, soit une progression encore plus forte que celle observée en 2020 (+27 %). En deux ans, le nombre de victimes de viol ou tentative de viol conjugal enre­gistrées par la police ou la gendarmerie a ainsi été mul­tiplié par 1,7.

87 % des victimes de violences conjugales sont des femmes et la moitié des victimes ont entre 25 et 39 ans
87 % des victimes de violences conjugales enregistrées sont des femmes, 98 % quand il s’agit de violences sexuelles. Concernant les violences physiques et psy­chologiques ou verbales, la part des femmes décroit légèrement avec l’âge, de 94 % pour les moins de 20 ans jusqu’à 77 % pour les 60 ans et plus.

Au sein des violences psychologiques ou verbales enregistrées, la part des femmes varie également selon la nature de l’infraction : de 91 % pour les menaces, à 88 % et 84 % respectivement pour le harcèlement et les atteintes à la vie privée, et seulement 39 % pour les injures et diffamations. Ce sont les moins fréquentes de ce groupe d’infractions (2 366 victimes enregistrées en 2021) et les seules pour lesquelles les hommes sont majoritaires.
La moitié des victimes a entre 25 et 39 ans, les vio­lences entre conjoints/petits-amis étant très rares chez les moins de 20 ans (5 % des victimes) et à partir de 60 ans (4 % des victimes)
Les victimes de violences conjugales sexuelles enre­gistrées sont nettement plus jeunes que les autres victimes de violences conjugales : 13 % ont moins de 20 ans, contre respectivement 4 et 6 % pour les violences psychologiques et physiques et la moitié a moins de 30 ans contre 20 % pour les violences phy­siques et 15 % pour les autres violences conjugales (figure 3). Les victimes de violences psychologiques et verbales sont légèrement plus âgées que les victimes de violences physiques mais les profils des victimes de ces deux types de violences enregistrées restent très proches, avec une majorité de victimes qui ont entre 30 et 39 ans, 36 % pour les premières et 32 % pour les secondes. Les victimes d’injures et diffama­tions enregistrées se démarquent des autres victimes de violences non physiques ou sexuelles, avec 15 % de victimes âgées de moins de 30 ans contre environ 30 % pour les autres.

Les victimes de violences conjugales enregistrées sont très majoritairement françaises

Globalement, la très grande majorité des victimes de violences conjugales enregistrées en 2021 sont françaises. Cependant la part de victimes étrangères (15 %) est deux fois plus élevée que la part d’étrangers vivant en France (8 %). Elle est identique pour les violences physiques, sexuelles et pour les menaces, mais est plus faible pour le harcèlement (9 %), les injures ou diffamations (9 %) et les atteintes à la vie privée (7 %), du même ordre que la part d’étrangers dans l’ensemble de la population.

Les communes rurales affichent globalement moins de violences conjugales enregistrées

Sur l’ensemble du territoire en 2021, les services de sécu­rité ont enregistré 3,1 victimes de violences conjugales pour 1 000 habitants. Les grandes unités urbaines sont plus concernées que les plus petites ou les zones rurales. En 2021, on recense un peu plus de 3,6 victimes de violences conjugales enregistrées pour 1 000 habitants dans les unités urbaines de plus de 50 000 habitants, 3,3 pour l’unité urbaine de Paris, contre moins de 3 pour les plus petites unités urbaines ou les communes rurales (respectivement 2,6 et 2,1).
En se limitant à la population la plus concernée par ce type de violence, soit les femmes de 15 à 64 ans (85 % des victimes), la relation entre le degré d’urbanisation et le nombre de victimes enregistrées par habitant apparait plus nettement (figure 4). En moyenne sur l’ensemble du territoire, le taux de femmes victimes de violences conju­gales enregistrées pour 1 000 habitantes âgées de 15 à 64 ans est de 8,4 mais seulement de 5,8 pour les com­munes rurales ; il augmente avec la taille des communes pour atteindre un maximum de 10,2 pour les unités urbaines de 100 000 à 200 000 habitants. Le taux des très grandes villes est en revanche un peu plus faible et celui de l’unité urbaine de Paris de seulement 8,2.

La Guyane, la Seine-Saint-Denis, le Nord, la Réunion, le Pas-de-Calais et le Lot-et-Garonne affichent relativement plus de victimes conjugales enregistrées que le reste du territoire

Sur l’ensemble du territoire en 2021, on dénombre 0,7 victime de violences conjugales enregistrée pour les hommes et 4,9 pour les femmes. Cependant, les violences conjugales concernant très majoritairement les femmes âgées de 15 à 64 ans (85 % des victimes enregistrées), les taux départementaux ont été calculés sur cette sous-population (figure 5), afin d’assurer une meilleure comparabilité entre des départements aux structures de population par sexe et âge différentes (notamment au regard de la part des plus de 65 ans).
En 2021 sur l’ensemble du territoire, 8,4 femmes de 15 à 64 ans pour 1 000 habitantes de la même tranche d’âge ont été enregistrées par la police ou la gendarmerie comme victimes de violences conjugales. On retrouve 3 des 5 départements d’Outre-mer parmi les 10 dépar­tements enregistrant un taux supérieur à 10 : 12,7 pour la Guyane, taux le plus élevé de tout le territoire, 11 pour la Réunion et 10,3 pour la Guadeloupe. En métropole, 7 départements ont un taux supérieur à 10 : la Seine Saint-Denis (11,6), le Nord (11,3), le Pas-de-Calais (10,9), Le Lot-et-Garonne (10,8) les Pyrénées-Orientales (10,4), les Alpes-Maritimes (10,3) et les Bouches-du-Rhône (10,2) (figure 5). À l’exception du Lot-et-Garonne, ces départe­ments faisaient tous déjà partie des 10 départements aux taux de victimes enregistrées pour 1 000 habitantes les plus élevés en 2020.
Le département de Mayotte dont le taux figure parmi les plus faibles enregistrés dans toute la France (6,3 pour 1 000) est illustratif du décalage qui peut être constaté entre victimes enregistrées par les forces de sécurité et victimation estimée par les enquêtes en population générale. L’enquête CVS menée en 2020 à Mayotte fait en effet apparaître une fréquence des violences sexuelles et au sein du ménage près de deux fois supérieure à celle observée en métropole (Grangé, 2021).

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