Le défi de la mort invisible du modèle social de la départementalisation en Guadeloupe 

— Par Jean-Marie Nol, économiste —

L’Intelligence Artificielle va bouleverser le socle du financement du modèle social de la départementalisation en Guadeloupe, mais personne n’ose encore parler. C’est le modèle économique et social de la Guadeloupe qui est menacé dans ses fondements. L’intelligence artificielle est en train de s’imposer en Guadeloupe dans beaucoup d’activités en modifiant profondément l’organisation du travail, mais l’IA va aussi nous obliger à changer profondément la fiscalité, ce dont personne ne parle. L’arrivée très rapide de l’intelligence artificielle dans les entreprises, les services de l’administration et la vie quotidienne a déjà alimenté une multitude de débats sur les mutations que cette technologie va entraîner dans l’organisation du travail notamment. Les activités très répétitives sont déjà impactées parce que les robots et les logiciels d’IA peuvent très bien faire une grande partie du travail. C’est vrai dans l’industrie et les commerces. Ce sera très rapidement le cas dans les services : la banque, l’assurance, la comptabilité, le travail juridique… un secteur tertiaire notamment très développé en Guadeloupe depuis la départementalisation de l’île en 1946. Chaque jour nous apporte l’état de cette invasion technologique. Les syndicats  en France hexagonale sont les premiers à réagir parce que c’est l’emploi qui est touché. Les syndicats  sont partagés entre le besoin de protéger des emplois existants et la nécessité d’assumer les effets de cette modernité technologique qui apporte aussi beaucoup de productivité.Cette transition vers l’IA va évidemment mobiliser autant d’attention que la transition digitale, écologique ou climatique. La destruction créatrice chère à l’économiste Schumpeter va inéluctablement fonctionner. Ce que l’on ne sait pas en général, c’est comment gérer la transition des hommes et des femmes concernés. Beaucoup de professions sont déjà très inquiètes pour leur avenir. Les usines sont déjà très robotisées, mais les médecins s’interrogent sur leur métier le jour, très proche, où les diagnostics comme les prescriptions sortiront de l’ordinateur. Les avocats, les comptables, les scénaristes, les écrivains, les correcteurs, les traducteurs, et les interprètes, et même les acteurs, se voient disparaître et remplacés par la fougue et la rapidité des logiciels dopés à l’intelligence artificielle.

En termes d’emplois, la productivité se traduira évidemment par des pertes d’emplois. Et le raccourcissement de la durée du travail. Le seul moyen de limiter les dégâts sociaux sera d’activer les leviers de la formation, la mobilité, la flexibilité et la découverte de nouveaux jobs.

L’essor de l’intelligence artificielle en Guadeloupe ne se limitera pas à une simple évolution technologique ; il ébranlera les fondations mêmes du modèle social de l’île. Bien que largement discutées sur le plan national et international, les répercussions de l’IA sur la fiscalité et le financement du modèle social guadeloupéen demeurent largement méconnues et sous-débattues.La transformation économique impulsée par l’IA est indéniable. De nombreux secteurs, notamment le tertiaire, voient leur organisation du travail profondément altérée. Les robots et les logiciels d’IA accomplissent désormais des tâches auparavant réservées aux travailleurs humains, menaçant ainsi un grand nombre d’emplois traditionnels.Face à cette révolution technologique, les syndicats sont partagés entre la protection des emplois existants et l’acceptation des bienfaits de la productivité accrue. Cependant, l’incertitude persiste quant à la capacité de l’IA à compenser les emplois perdus par la création de nouveaux postes. La révolution de l’IA soulève également des questions essentielles concernant la transition des travailleurs vers de nouveaux métiers. De nombreuses professions, de l’industrie aux services, craignent pour leur avenir face à l’automatisation croissante des tâches.

Pourtant, un défi encore plus pressant reste largement ignoré : celui de la révolution fiscale. En éliminant des pans entiers du travail humain, l’IA réduit également la base fiscale sur laquelle repose le modèle social de la Guadeloupe. Les impôts sur le revenu et les charges sociales, principaux contributeurs au financement de la sphère sociale, ainsi que l’octroi de mer sont menacés par la montée en puissance de l’IA.Cette rupture imminente dans les ressources du modèle social guadeloupéen exige des choix politiques audacieux. La nécessité de réduire le coût du modèle social ou de trouver de nouvelles sources de financement devient impérative. Des propositions telles que la taxation des robots ou des gains de productivité liés à l’IA émergent, mais la route vers une réforme fiscale équitable et efficace reste sinueuse.En parallèle, la transition vers l’IA soulève la question cruciale du revenu universel de base. Avec la disparition prévue de nombreux emplois, en Guadeloupe comme en France, la nécessité de garantir un filet de sécurité économique pour tous devient pressante.Face à ces défis complexes et interconnectés, une approche proactive et inclusive est essentielle. La Guadeloupe doit s’engager dans un dialogue ouvert et transparent, impliquant toutes les parties prenantes, des travailleurs et des entrepreneurs aux décideurs politiques et aux experts en technologie. Seule une réflexion collective et novatrice sur un nouveau modèle économique et social permettra de naviguer avec succès dans les eaux agitées de la révolution de l’IA tout en préservant les fondements du modèle social guadeloupéen à travers le maintien de la Guadeloupe dans le droit commun de l’article 73 de la constitution française avec le maintien en l’état des deux assemblées existantes. Prudence est mère de sûreté et c’est à ma connaissance la seule parade aux dégâts potentiels et inévitables de l’intelligence artificielle sur le tissu économique et social de la Guadeloupe 

« Sa ki fèt, fèt. »

– traduction littérale :  Ce qui est fait est fait.

– moralité : On ne peut pas revenir en arrière, il faut accepter les choses telles qu’elles sont et promouvoir la réflexion prospective.