La loi Duplomb : Quels sont les dangers de ce texte pour la santé et la biodiversité ?

— Par Sabrina Solar —

Le 8 juillet 2025, l’Assemblée nationale a adopté la proposition de loi Duplomb, qui a suscité de vives inquiétudes parmi les défenseurs de l’environnement et les syndicats agricoles. Ce texte, légèrement modifié lors de la commission mixte paritaire (CMP), introduit plusieurs reculs environnementaux majeurs, notamment en ce qui concerne les pesticides, l’élevage industriel et les méga-bassines. Retour sur les principales dispositions de cette loi controversée.

Une réintroduction inquiétante des néonicotinoïdes

L’une des mesures les plus alarmantes concerne l’acétamipride, un pesticide de la famille des néonicotinoïdes, interdit depuis 2020 en raison de sa dangerosité pour les pollinisateurs. La loi Duplomb autorise désormais sa réintroduction par décret, en cas de « menace grave compromettant la production agricole », à condition qu’aucune alternative viable ne soit disponible. Cette décision, sans garantie de contrôle à long terme, a été fortement critiquée par les associations écologistes, qui soulignent le risque pour la biodiversité et la santé publique. Le texte prévoit seulement une réévaluation de la situation après trois ans, ce qui n’est pas suffisant pour apaiser les craintes.

Thomas Gibert, porte-parole de la Confédération Paysanne, a réagi en affirmant que cette loi constitue une véritable « écocidée », et que des mesures aussi destructrices risquent de dégrader encore davantage l’environnement, la santé des citoyens et les conditions de travail des agriculteurs.

Les méga-bassines facilitées

La loi Duplomb prévoit également la facilitation de la construction de méga-bassines, ces vastes réservoirs d’eau destinés à l’irrigation des cultures. Ces installations sont désormais considérées comme étant d’« intérêt général majeur », ce qui réduit les démarches administratives pour leur autorisation. Un argument qui a été vivement contesté par les défenseurs d’une agriculture durable. Ces bassines sont jugées particulièrement avantageuses pour les grandes exploitations de maïs destinées à l’exportation, mais au détriment des cultures vivrières locales.

Fanny Métrat, porte-parole de la Confédération Paysanne, a souligné que les méga-bassines ne profitent qu’aux grandes exploitations et qu’elles nuisent aux petites cultures locales essentielles à la sécurité alimentaire. Cependant, une légère victoire est à noter : la possibilité de créer ces installations dans des zones humides dégradées, prévue dans la version initiale, a été rejetée.

Les élevages industriels : un contrôle allégé

La loi Duplomb permet également des assouplissements concernant le contrôle des émissions des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), notamment les élevages industriels. Les seuils de contrôle des émissions polluantes pour les élevages ont été relevés. D’ici 2026, les fermes de plus de 85 000 volailles ou 3 000 porcins pourront échapper aux contrôles environnementaux. Cette mesure inquiète particulièrement les défenseurs de l’environnement, car elle pourrait aggraver les problèmes de pollution et de bien-être animal dans ces exploitations massives. Toutefois, les élevages bovins, initialement concernés par cette disposition, ont été exclus du texte final.

Un revers pour l’indépendance de l’ANSES

Malgré ces nombreux reculs écologiques, une victoire a été obtenue concernant l’indépendance de l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail). Dans sa version initiale, le texte prévoyait de permettre au gouvernement de contourner les recommandations de l’ANSES pour la mise sur le marché des pesticides. Cette mesure a été abandonnée, préservant ainsi l’autonomie de l’agence. En revanche, l’Office français de la biodiversité (OFB), souvent critiqué par les syndicats agricoles, se trouve sous l’autorité du préfet, ce qui limite son efficacité.

Une loi qui divise

La ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, a qualifié la loi Duplomb de « cruciale » et « équilibrée », mais de nombreuses organisations, dont Greenpeace, dénoncent un texte qui menace gravement la biodiversité et la santé publique. En amont du vote, des manifestations ont eu lieu devant l’Assemblée nationale pour appeler à son rejet. Malgré les alertes des scientifiques et des associations, la loi a été adoptée sans véritable opposition.

En somme, la loi Duplomb constitue un tournant dangereux pour la politique environnementale en France, avec des risques accrus pour la biodiversité, la santé publique et les conditions agricoles durables. Les débats autour de ce texte ne sont pas terminés, et de nombreuses voix continuent de s’élever pour dénoncer ses effets dévastateurs.

Pour signer la pétiton contre la Loi Duplomb =>