La fin d’un age pour la Martinique

— Par Roland Tell —

Domenico Ghirlandaio, Portrait d’un vieillard et de son petit-fils

L’épidémie de résignation sénile, qui sévit à la Collectivité Territoriale de la Martinique, est plus que jamais en péril, même si elle continue encore de tuer les consciences de la droite, dite moderne. Après les élections législatives de Juin 2017, la Martinique vivra un moment de création, de recréation, du fait de l’échec électoral des partis alliés dans le marchandage du pouvoir régional.
Car le peuple martiniquais, tournant le dos aux gouvernants actuels, a compris qu’une Martinique nouvelle prend son envol vers le vouloir d’égalité réelle, pour élever son destin, parce que de dépassement elle a besoin ! N’en a-t-elle pas assez de ce dégoût, qui l’étreint peu à peu, de cette nausée de doctrines politiciennes, se détournant sans relâche de l’histoire qui se fait, de son mouvement ascensionnel à un niveau plus élevé, soit disant pour des lointains sans fondement, qui ne les concernent aucunement. N’en a-t-elle pas assez de voir partir, d’année en année, la fleur de la jeunesse martiniquaise, vers la France et le Canada ! Et que dire des aînés, une fois la retraite acquise, souffrant du délire de la politique martiniquaise, regardent avec désir vers Paris, Bordeaux, Lyon, Toulouse, Marseille, pour se décider à tout quitter, pour aller y vivre et mourir, loin de nos maladies d’opinions publiques et de cancans politiciens ! Car, de plus en plus, à la Martinique, il n’y a rien à chercher (surtout pas le travail !), et beaucoup à perdre, par exemple, le temps dans les embouteillages, et même le bienfait du repos nocturne, par l’explosion des vols, des cambriolages, et autres délits ! Sans plan d’envergure, les gouvernants de la Collectivité ne savent pas où aller. Leur débit de gestion à Plateau Roy écoule des subventions et des dons à longueur d’assemblées, avec des humeurs de glace, puisque l’argent vient de France et d’Europe. Collectivité de boutiquiers, où rien ne s’améliore, car, pour l’idéaliste, la doctrine partisane reste la meilleure de ses forces ! Voilà pourquoi, presque tout le Conseil Exécutif, aimant par-dessus tout l’arrivisme, se voulut d’humeur bonne pour la députation, pour, un an après, tendre à la vie électorale et à la communion élective. Oublieux du bien commun, du bien du corps social martiniquais, fondement de leur autorité de Conseillers Exécutifs, ces Conseillers se pressent vers le scrutin, portant déjà en eux la charge de l’échec. Quel triste intérim, ils s’apprêtent à vivre, sans voir le retour des suffrages de décembre 2015 ! Depuis, les électeurs se sont faits nouveaux, – nouveaux accordés chaque jour à la pesanteur sans but, en perdition, de la Collectivité, en sorte qu’ils se feront vengeurs et bourreaux, pour voir le retour de l’espoir, bienvenu. Désormais, leur temps précieux et leurs votes iront à l’accomplissement parfait de leur citoyenneté, jusqu’à la limite supérieure de l’égalité, et de l’amitié civique, au sein de la communauté historique.
Une fois les élections législatives terminées, rendant, plus forts et légitimes, les inspirateurs et créateurs de l’égalité réelle, vers des voies plus hautes, il faudra avancer. D’ici s’offre à eux l’image prospective d’une Martinique nouvelle, se rapportant, non à des possibilités lointaines, mais à des applications prochaines, à l’avenir même de notre temps, selon des processus de redistribution nécessaires, s’agissant du monde du travail, donc du maintien de nos forces vives à la Martinique. La recherche essentielle de l’usage commun dans l’économie devrait garantir contre les abus des privilèges, et donc promouvoir, à la Martinique, des formes plus sociétaires, en transformant intérieurement l’intérêt privé, en l’intégrant dans les structures sociales martiniquaises, ordonnées au bien commun. D’où l’orientation vers la réalisation et le développement d’un patrimoine commun à la Collectivité, garantissant des moyens de formation et des titres de travail, donc une garantie sociale à tout jeune au chômage. Certes, dans notre petite île, il faut aller vers une organisation communautaire de la production et du travail, selon le principe de la démocratie personnaliste. Le futur député devra produire cette loi de l’usage commun, nécessaire ici, comme en Outre-Mer, où se mettent en place des Collectivités plus ou moins autonomes. Les dites Collectivités sont donc appelées à intégrer l’intérêt privé dans de nouvelles structures sociales, ordonnées au bien commun, selon une vaste organisation communautaire de production et de travail. Tout cela suppose un vrai député au Palais Bourbon, donc habitué à légiférer, avec en plus le courage d’avancer vers l’inexploré. Il ne devra pas seulement se faire élire ou réélire, mais se dépasser, pour créer à neuf une Martinique, à laquelle le travail soit normal, nécessaire, utile.
Toute mutation exige que l’on se détourne du présent, tel que le vit la Martinique de Juin 2017, à travers une Collectivité Territoriale, qui se couche de plus en plus dans la fatigue, et dont les Martiniquais désespèrent, s’agissant du bien commun et du bien-vivre. Le problème, qui se pose devant notre député, est de conduire, par la dite loi, à des changements profonds dans le régime de la vie humaine à la Martinique, intéressant à la fois le domaine social et le monde économique, pour maintenir le sens de la dignité du travail, et les droits qui y sont liés. Pour cela, il faut établir une véritable communauté, conforme à cette dignité et à ces droits, servant les intérêts du citoyen martiniquais, jusqu’à un degré de vie matérielle convenable, et non dans un climat de tension et de chomâge. Il s’ensuit que la Martinique soit organisée de telle sorte qu’à chacun soit reconnu son droit au travail et à son progrès personnel, au sein de son île. C’est pourquoi il importe, Collectivité Territoriale oblige, et par la loi de l’usage commun, d’intégrer au bien commun des Martiniquais, sous forme sociétaire, les avantages de la sphère industrielle et commerciale, non par pure générosité, mais selon des modalités légales de responsabilité opératrice, de formation professionnelle, d’incitation à l’emploi, selon des formes contractuelles nouvelles, que la loi devra préciser. Certes, il ne s’agit pas de porter atteinte à l’intérêt privé, mais de l’intéresser davantage au bien du corps social martiniquais, de le rendre plus correct et plus coopératif, voire de l’appréhender dans les structures sociales, ordonnées à l’emploi et à la vie humaine. La convergence des moyens de travail et d’évolution doit être la base de notre organisation communautaire. N’est-ce pas que le patrimoine commun de la Martinique apporte bien des avantages climatiques, stratégiques, opérationnels, pour la bonne marche et le profit des entreprises ? Mais qu’apportent celles-ci en retour à la vie humaine des Martiniquais ? C’est tout à fait la raison d’être et l’objet de la loi de l’usage commun ! De tout chômage délivré, de tout départ préservé. Quel avenir !
ROLAND TELL