Henri TAULIAUT investit la galerie Arsenec

—Extraits du texte de Scarlett JESUS, critique d’art. —

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« Ce qui fait événement se situe du côté de la visite et non de la représentation : l’événement est interne à la réception et non à la forme même de la production ». Jean DUVALLON, L’Exposition à l’oeuvre, l’Harmattan, 1999.
Ceci n’est pas vraiment une exposition.
Henri TAULIAUT décide d’aménager l’espace, de le reconstruire pour rendre compte de son univers intérieur, mais aussi de son époque. D’emblée s’impose, avec le nécessaire déplacement du public, la notion de mouvement. Dans un espace théâtralisé le public va se voir mis en scène. Il devra effectuer un parcours le conduisant à la Parade amoureuse. Une Carte du Tendre contemporaine en quelque sorte, c’est-à-dire un parcours initiatique conduisant à l’accouplement, selon une scénographie qui se confond avec un rituel d’approche. La dramaturgie plastique ne peut alors échapper à un déroulement en trois actes, correspondant aux trois étapes successives de la conquête amoureuse : l’approche, la rencontre et la jouissance dans laquelle plaisir sensuel et esthétique se confondent.
Le post-modernisme.
Un siècle avant Henri TAULIAUT, PICABIA avait déjà intitulé une de ses toiles « Parade amoureuse ». Afin de rejeter l’idéalisme entourant alors la relation amoureuse, il avait conçu une oeuvre représentant le fonctionnement mécaniste de pièces et rouages empruntés au monde industriel. Le désir sexuel était assimilé à un assemblage absurde de bielles et de pistons. Nous étions en 1917.
Ce qu’en Henri TAULIAUT nous en dit en 2012 est fort différent. S’il n’est toujours pas question d’un retour à l’idéalisme, les connaissances du psychisme humain ont montré que le comportement de l’homme n’est pas aussi éloigné de celui l’animal auquel l’expression de « parade amoureuse » est empruntée. Mais ce qui fait la différence entre l’homme et l’animal c’est que ce dernier n’a aucune connaissance de l’art ni de l’érotisme. L’érotisme, comme l’art, ne relèvent pas de ce qui est naturel mais, au contraire de l’artifice. Baudelaire, en son temps, faisait l’éloge du maquillage, des bijoux et des parfums. Ce que montre Henri TAULIAUT, c’est comment l’informatique aujourd’hui et, avec elle, internet ont envahi notre intimité jusqu’à intervenir dans la relation amoureuse. Ce qu’il montre également c’est que sa pratique d’artiste caribéen contemporain s’inscrit dans une démarche, à la fois réflexive et conceptuelle, faite de filiations et de ruptures. Elle n’a de cesse de faire reculer les limites assignées à l’art.
L’accrochage d’objets du quotidien hissés au statut d’œuvre d’art souligne ce que les artistes contemporains doivent à Marcel DUCHAMPS. Enfin, sa Parade amoureuse est une œuvre transgressive, sans tabous. Elle brouille les frontières entre érotisme et pornographie, et, de ce fait, elle est l’exact reflet de notre monde contemporain.