Frantz Fanon, l’héritage d’un penseur de la décolonisation

France Culture jusqu’au vendredi 21 –  9 h 05 Série documentaire

— Par Mouna El Mokhtari —

Dans les « Grandes traversées », Anaïs Kien se penche avec rigueur sur l’oeuvre très actuelle du psychiatre martiniquais Lorsque Frantz Fanon meurt, victime d’une leucémie, à l’âge de 36 ans en 1961, sa courte existence est une suite de grandes traversées. Né à Fort-de-France en 1925, Frantz Fanon quitte à 18 ans sa Martinique natale. Engagé volontaire lors de la seconde guerre mondiale, blessé au combat dans les Vosges, puis étudiant en médecine à Lyon, il prend, en 1953, un poste de psychiatre à l’hôpital de Blida, en Algérie, qu’il quittera quelques années plus tard pour rejoindre le Front de libération national algérien (FLN). , écrit dans (Seuil, 1952) celui qui expérimente douloureusement le racisme et la société coloniale. Fanon y pourfend les théories raciales et décrit les mécanismes et la violence du colonialisme : l’aliénation, l’humiliation et l’exploitation des peuples et des cultures indigènes. Analysant les blessures et les stigmates psychologiques de la colonisation, il théorise le renversement radical de ce régime et la désaliénation des colonisés dans (Maspero, 1961). Le livre, préfacé par Sartre, sort quelques jours avant sa mort et  quelques mois avant l’indépendance de l’Algérie, mais est d’abord interdit en France.

«Le Noir n’est pas un homme » Peau noire, masques blancs, Les Damnés de la terre. Compris par beaucoup comme un appel à la violence, l’ouvrage et la pensée subversive de Frantz Fanon sont loin de faire consensus. Pourtant, , affirme Anaïs Kien. En explorant sensiblement ses textes, lus par le romancier et chanteur Gaël Faye, elle retrace brillamment la complexité de la pensée de Fanon et dresse le panorama des combats intellectuels qu’il a inspirés, , jusqu’à devenir une référence majeure des études postcoloniales. « ses écrits font toujours écho de manière incendiaire aux relations raciales du XXe siècle » « des Black Panthers aux Palestiniens, en passant par les militants anti-apartheid d’Afrique du Sud » Il ne fallait pas moins de cinq épisodes de près de deux heures avec une trentaine d’intervenants, parmi lesquels des témoins de la vie incandescente du psychiatre et écrivain mais aussi des historiens et experts en littérature, pour offrir les clés de lecture essentielles de l’oeuvre galvanisante de Frantz Fanon.

Frantz Fanon : l’indocile, écrit par Anaïs Kien, réalisé par Séverine Cassar (Fr., 2020, 5 × 109 min), dans les « Grandes traversées ». Disponible en podcast.

Source : LeMonde.fr