Contre la vie chère : morceler les oligopoles ou les soumettre au contrôle collectif ?

—RS n° 402 lundi 7 juillet 2025 —

La loi française dispose qu’aucun groupe commercial ne puisse contrôler plus du quart du marché. D’où la proposition de certain·e·s, d’imposer à GBH de céder des parts du sien. Observons au passage, une fois de plus, comment les Dominants, souvent partisans du « Zéro tolérance » pour les délinquants, manquent d’intérêt pour les entorses à la loi, perpétrées par les puissants.

Observons aussi, comment le principe sacro-saint de « la concurrence libre et non faussée », peut être battu en brèche par la loi elle-même ! Limiter la puissance acquise par la concurrence, ce n’est pas respecter un principe pourtant transformé en règle constitutionnelle européenne ! Tant que le capitalisme existera, la concurrence tendra à se transformer en son contraire, le monopole ou, ce qui revient au même, l’entente entre les oligopoles, même si celle-ci est punie par la loi.

En réalité, la loi qui prétend mettre des limites à l’exagération « naturelle » des gros n’a rien d’incontournable. Il suffit d’un tour de passe-passe pour qu’un monopole ou quasi monopole soit déguisé en morcellement vertueux par le jeu des prête-noms à familles, parents et alliés !

Il est clair que sauver les apparences ne résoudra pas le problème de fond des méfaits des positions dominantes !

Or les positions dominantes d’un tout petit nombre sont une source évidente d’abus et de vie chère, même s’il y en a d’autres ! D’ailleurs, la morale officielle du système glorifie, avec médailles à l’appui, ceux qui réussissent et méprise « ceux qui ne sont rien ».

L’intérêt collectif commande qu’on prenne une autre voie. Lorsque le fonctionnement « normal » du capitalisme vient renforcer les héritages du passé (esclavagiste comme on sait), et aboutit à la constitution de forces qui dominent la vie de la collectivité en ce qui concerne les prix, les revenus, les choix de vie, l’influence politique, il est socialement juste, politiquement réaliste, économiquement nécessaire, de les soumettre au contrôle démocratique de la société.

Les formes possibles de ce contrôle, ouvrier, citoyen, populaire peuvent varier. C’est une tâche démocratique de les déterminer collectivement, mais nous attendons sereinement qu’on nous démontre qu’il y a une autre façon de faire si l’on veut que les intérêts de la population priment sur le respect d’un catéchisme néolibéral qui ne protège que les privilèges exorbitants des « nouveaux maîtres ».

*****

Lettre ouverte aux autorités morales, aux élites intellectuelles aux artistes, aux élu.e.s, aux responsables politiques, syndicaux, associatifs de Martinique

Chacun·e sait, ou devrait savoir, que l’action collective des masses est le levier fondamental pour changer le cours des choses, à toutes les échelles. Sans sous-estimer une seule seconde cette leçon de l’histoire, il n’empêche que le rôle de toutes les instances citées plus haut, prend une importance particulière lorsqu’on assiste à un basculement du monde aussi évident qu’aujourd’hui.

Le « capitalisme de fin des temps » qui produit exacerbation des inégalités, guerres en expansion, destruction du climat, suprémacismes haineux, poussée fascisante, aura-t-il raison de l’espérance humaine ? La question est largement posée. Un génocide quotidien, d’une atrocité inouïe, nous bombarde d’images insoutenables malgré l’assassinat des journalistes et l’interdiction par l’État d’Israël de leur présence sur le territoire palestinien. De partout montent des protestations populaires et fleurissent des actions militantes qui sauvent l’honneur de l’Humanité, mais restent insuffisantes pour mettre fin à ce « moment illogique ».

On voit des choses inédites. Le pape Léon XIV exhorte les évêques et les communautés chrétiennes des USA à résister à la rage xénophobe et raciste du chef d’État de la première puissance militaire du monde. Des tribunaux internationaux, jusque-là assimilés à la domination « occidentale » condamnent le génocide en Palestine, ordonnent l’arrestation du criminel de guerre Nétanyaou. L’ONU elle-même prend position contre les guerres illégales aussi bien, en Iran qu’en Ukraine, et implore que cessent les folies armées ou que s’arrêtent les expulsions et les mauvais traitements violents exercés par les Trump et les Abinader.

On voit bien qu’une pression plus forte est nécessaire pour obliger les États qui ont les moyens effectifs de peser sur la situation, dont la France qui prétend agir en notre nom, de passer des paroles occasionnellement potables aux actes concrets indispensables.

Dès lors, pourquoi vous taisez-vous Martiniquais·e·s qui jouissez d’un quelconque crédit ? Où sont vos interpellations des États passifs donc objectivement complices de génocide connu, filmé, documenté jour après jour ? Quand l’humanité est en proie à une faillite morale aussi colossale, où est votre cri ? Croyez-vous que vos (éventuelles) prières suffiront à arrêter le bras des assassins ?

Comment comprendre vos lenteurs, vos attitudes timorées, tragiquement insuffisantes ? Pensez-vous qu’un jour, on n’oubliera votre tiédeur voire parfois votre veulerie d’aujourd’hui ? Bien sûr, toutes les instances citées ne sont pas au même niveau dans les réactions ou les non réactions. Chacun a le pouvoir d’évaluer dans le détail, mais une chose est certaine : l’insuffisance est évidente. Il ne s’agit pas que d’une question de morale (même si la morale ou l’éthique si on préfère les grands mots est importante !). Il s’agit de notre avenir à tous et à toutes.

Il est temps de nous montrer dignes des meilleures traditions de notre peuple, des lumières de nos aîné·e·s les plus vaillant·e·s.

Philippe PIERRE-CHARLES.