Contester le monde des assis : Fromanger au Centre Pompidou

— Par Dominique Daeschler —

gerard_fromangerUne rétrospective orchestrée avec maestria au Centre Pompidou : l’accrochage est ramassé, les commentaires limités. L’exposition donne plus d’importance aux vibrations de l’artiste avec l’air du temps qu’à une chronologie. La définition donnée par Michel Foucault de la peinture de Fromanger « comme fronde à image » est un guide précieux.

Appartenant à « la figuration narrative »avec Monory, Aillaud, Cueco, Rancillac, Télémaque pour un temps, il capte le réel en utilisant la photographie et l’épiscope qui permet de reproduire les images sur les toiles et de les détourer au crayon. Triomphe du talent graphique et des aplats.

Critique du pop américain, Fromanger affirme un militantisme politique et social qui aborde les foules, mai 68. L’album rouge composé de vingt et une affiches sérigraphiées est à la fois d’une brûlante actualité et une critique violente d’une absence de « tout monde ». Les « souffles » sortes d’immenses phares couleur sang, plantés ça et là dans l’exposition, comme naguère dans les grandes avenues de Paris, conjuguent contestation et humour, ce qui n’avait pas échappé aux forces de l’ordre.

Et aujourd’hui ? Une des dernières toiles « Peinture –monde, Carbon black »(2015) continue à nous parler, avec les migrants, du monde contemporain comme une surface plane. Mais la couleur reste très prégnante, indispensable comme les pulsations d’un cœur, dénonçant, derrière une vie telle quelle, la nécessité du droit à la violence poétique, à l’interprétation et à la représentation.

Ses amis Deleuze, Prévert, Guattari, Foucault ne s’y sont pas trompés.

(Jusqu’ au 16 mai).

Dominique Daeschler