Avignon 2015 (20) : Épilogue ( et récapitulatif)

— Par Selim Lander —

affiche IN 15Le festival s’est achevé le 25 juillet. Après trois semaines très intenses, la ville va retrouver un calme relatif, la fréquentation estivale des touristes, quoique non négligeable – la Cité des Papes recèle tant de trésors ! – n’ayant rien à voir avec celle des festivaliers. Le 69ème festival IN a programmé 58 spectacles pour 280 représentations avec un taux de fréquentation supérieur à 93%. Avec les manifestations gratuites, 156000 entrées ont été comptabilisées. On ne dispose pas de ce dernier chiffre pour le OFF (qui fêtait cette année son 50ème anniversaire), chaque compagnie se chargeant de la vente des billets pour son ou ses spectacles, mais les chiffres disponibles sont encore plus impressionnants : 1071 compagnies (dont 128 étrangères) ont présenté 1336 spectacles. Plus de 50000 cartes du OFF (donnant droit à des réductions sur les spectacles) ont été vendues, soit 50000 spectateurs qui ont vu chacun au minimum quatre ou cinq pièces, sans compter les autres, non-encartés. Et puisque le OFF est aussi le grand marché du théâtre (comme Cannes l’est pour le cinéma), on peut ajouter ici que 3587 professionnels ont été accrédités dont 1328 programmateurs et 591 journalistes. IN et OFF confondus, Avignon est bien « le plus grand théâtre du monde ».

affiche-off15Pour autant qu’il se démène, un seul critique ne peut voir et rendre compte que d’un petit nombre de pièces. Un festival aussi riche apporte nécessairement autant de frustration que de satisfaction. Dans nos 18 billets précédents (le 19ème étant consacré à l’exposition Chéreau), nous avons rendu compte de 36 des 52 pièces auxquelles nous avons pu assister (dont 13 dans le IN). En dehors des pièces laissées volontairement sous silence, qui n’ont pas besoin de contre-publicité, il en est d’autres qui valent d’être signalées. Pour mémoire et dans le désordre :

Page en construction de Fabrice Melquiot mis en scène par Kheireddine Lardjam qui tient également le rôle principal. Entre l’Algérie et la France, en jouant sur le mythe des super-héros (« Arabman », « Captain Maghreb »). Des scènes touchantes de vérité. Superbe accompagnement de musique Gnaoui.

Kokdu par une troupe coréenne. Le rituel des morts fictionnisé. Avec costumes, chants et danses typiques. Ambiance prenante.

Kiwi du Québécois Daniel Danis par deux jeunes comédiens qui sautent d’un micro à l’autre. Des enfants errants. Atmosphère suburbaine, lumières tamisées, la musique qu’affectionne la jeunesse d’aujourd’hui.

Parce que c’était lui – Montaigne et La Boétie de Jean-Claude Idée. Trois personnages en fait : Montaigne vieillissant, La Boétie qui lui rend visite d’outre-tombe et enfin Marie de Gournay, toute jeunette, qui deviendra l’éditrice de la troisième édition des Essais. Net et sans bavure. Intéressant de bout en bout et bien joué par les trois comédiens.

Les Oiseaux d’après Aristophane adapté et mis en scène par Carlo Boso avec seize élèves de L’Académie internationale des arts du spectacle (Versailles). Présenté en plein-air avec tréteaux, masques, chants et danses, un vrai spectacle de rue, sympathique et bien réglé qui réconcilie avec Aristophane souvent bien ennuyeux sur les scènes plus prestigieuses.

Pierre et Loulou. Un spectacle pour enfants à partir de 3 ans. Sur la musique de Prokofiev (Pierre et le Loup) avec de drôles de personnages dont un chien à ressort et un chat confectionné à partir d’un vieil étui à jumelles. Les marionnettes passent du décor (projeté sur un écran) au castelet. Pas de texte mais un « gromelot » éloquent. À découvrir avec ou sans enfant.

Pour finir, trois spectacles que nous n’avons pas aimés, à évoquer néanmoins pour une raison ou pour une autre.

Un obus dans le cœur de Wajdi Mouawad. Un seul en scène avec Gregori Baquet. Est-ce le texte – soliloque d’un fils au moment où sa mère va mourir, qui n’est pas du meilleur Mouawad – ou la mise en scène sobrissime de Catherine Cohen, toujours est-il que Gregori Baquet, malgré des efforts méritoires, ne nous a pas atteint au cœur.

La mort de Danton de Georg Büchner revisitée par Antoine Caubet, spécialiste des mises en scène « pauvres » avec un effectif de comédien réduit. Il s’est fait connaître par son Roi Lear présenté dans les mêmes conditions. Pour découvrir Caubet bien que le résultat s’avère décevant et même ennuyeux.

Meursaults adapté et mis en scène par Philippe Berling. Dans le IN. Cette tentative de faire passer à la scène le roman à succès de Kamel Daoud (Meursault, contre-enquête) a fait long feu. Le comédien, Ahmed Benaïssa, se perd dans un monologue sans couleur qui, très rapidement, lasse. La présence intermittente sur le plateau d’une chanteuse dans le rôle de la mère ne suffit pas à faire diversion.

Et finalement, le « Footsbarn ». Cette troupe créée en 1971 en Cornouailles (Grande-Bretagne), totalement itinérante entre 1984 et 1991, basée en France depuis, fait partie de l’histoire du théâtre. Elle a planté son chapiteau pour plusieurs mois au cœur d’un quartier populaire à la périphérie d’Avignon. Outre un programme d’animation culturelle spécialement dirigé vers les habitants du quartier, elle présente deux pièces de son répertoire : Nid de Coucou et Œuvres incomplètes (de William Shakespeare). On se rend au Footsbarn comme on va en pèlerinage ; le miracle n’est donc pas garanti. Nous avons assisté à une représentation des Œuvres incomplètes en fin d’après-midi sous un chapiteau à peu près désert. Toute la fantaisie, toute l’originalité de la troupe semblaient avoir disparu. Ce qui faisait son succès jadis est-il devenu désuet ? Les comédiens ont vieilli, sont-ils fatigués ?  L’absence de public les a-t-elle découragés ? Quoi qu’il en soit, on était triste pour eux.

 

 

Récapitulatif des spectacles vus par Selim Lander


affiche IN 15

Avignon 2015 (20) : Épilogue

— Par Selim Lander —

Le festival s’est achevé le 25 juillet. Après trois semaines
très intenses, la ville va retrouver un calme relatif, la
fréquentation estivale des touristes, quoique non négligeable – la Cité des Papes recèle tant de trésors ! – n’ayant rien à voir avec celle des festivaliers. Le 69ème festival IN a programmé 58 spectacles pour280 représentations avec un taux de
fréquentation supérieur à 93%. Avec les manifestations
gratuites, 156000 entrées ont été comptabilisées. On ne dispose
pas de ce dernier chiffre pour le OFF (qui fêtait cette année
son 50ème anniversaire), chaque compagnie se chargeant de la vente des billets pour son ou ses spectacles, mais les chiffres disponibles sont encore plus impressionnants : 1071 compagnies (dont 128 étrangères) ont présenté 1336
spectacles. Plus de 50000 cartes du OFF (donnant droit à des réductions sur les spectacles) ont été vendues, soit 50000 spectateurs qui ont vu chacun au minimum quatre ou cinq pièces, sans compter les autres, non-encartés.…

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Chéreau affiche

Avignon 2015 (19) : Patrice Chéreau – Un musée imaginaire

Par Selim Lander

Ouvert en 2000 dans l’Hôtel de Caumont, en Avignon, la
Fondation Lambert d’art contemporain se prolonge depuis cette année dans l’Hôtel mitoyen de Montfaucon. Les deux bâtiments entièrement rénovés pour la circonstance (agence Berger&Berger) sont voués pour l’un au fonds permanent (qui a fait l’objet
d’une dation à l’Etat), pour l’autre aux expositions
temporaires. C’est donc là où se tient en ce moment, et jusqu’au
11 octobre 2015, une exposition qui présente à la fois des
documents tirés des archives que Chéreau a léguées à l’IMEC
(Institut Mémoires de l’édition contemporaine) et des œuvres de plasticiens ayant nourri son imaginaire ou qui, du moins, sont censées entretenir avec lui un certain rapport « sensible ».

Patrice Chéreau (1944-2013) est tombé très tôt dans le
théâtre. C’est en effet au lycée Louis-Le-Grand, à Paris, qu’il
tiendra ses premiers rôles et assurera ses premières mises en scène (en compagnie de Jean-Pierre Vincent).…


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Cuando3

Avignon 2015 (18) : Qui sommes-nous ? – Mariano Pensotti

— Par Selim Lander —

Cuando vuelva a casa
voy a ser otro – Quand je rentrerai à la maison je serai un autre

Au cinéma, au théâtre aussi, on
reconnaît les œuvres d’Amérique du Sud. Il est difficile de dire à quoi cela tient exactement, peut-être avant tout à une certaine manière de considérer l’humain qui combine l’empathie avec une certaine dérision, également à une certaine manière de traiter des sujets graves sans se prendre au sérieux. Mariano Pensotti est argentin (né en 1973). Sa renommée a largement
dépassé les frontières et Cuando est une coproduction
internationale à laquelle le festival d’Avignon s’est
pertinemment associé. On aime en effet ce spectacle (en espagnol sous-titré) astucieusement construit et bien mis en scène et qui pose adroitement une question essentielle – c’est le cas de le
dire – à savoir la grande question existentialiste : y a-t-il
une « essence » de l’individu donnée une fois pour toutes, ou
l’existence précède-t-elle l’essence ?…

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DomaineMurmures_r

Avignon 2015 (17) : La religion – Carole Martinez, Diderot

Par Selim Lander

« Le premier pas vers la
philosophie, c’est l’incrédulité » (Denis Diderot). En nos temps troublés par des adeptes d’une certaine religion, cette vérité est bonne à entendre. Deux pièces qui n’abordent pas cette religion-là mais le christianisme nous amènent à réfléchir sur les conséquences de cette bizarrerie intellectuelle qu’est la foi en un dieu invisible et muet.
La première saisit une femme au plus intime d’elle-même. La
seconde emprunte la forme du débat socratique, version XVIIIe siècle.

Du domaine des murmures

Carole Martinez a obtenu le
« Goncourt des lycéens » en 2011 pour ce roman qui se passe dans un Moyen-Âge de légende, de mystère et de foi.…

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Trilogie

Avignon 2015 (16) : Qu’est-ce que l’art ? Botho Strauss, Jacques
Mougenot

— Par Selim Lander —

Trilogie du revoir

La Trilogie de la Villégiature de Goldoni (1761), Les Estivants de Gorki (1904), La Trilogie du revoir de Botho Strauss (Trilogie
des Wiedersehens
, 1977) : trois textes dans un intervalle de deux siècles pour décrire de riches personnes en vacances.
Des trois, le Goldoni est sûrement le meilleur. Celui de Gorki, malgré des qualités, ne laisse pas un souvenir impérissable, en tout cas dans la version présentée cette année à la Comédie Française[i].
La Trilogie de Botho Strauss créée cet été en Avignon a partagé le public. On a vu quelques personnes déserter précocement le théâtre mais peut-être était-ce dû pour une part à l’acoustique défaillante de la salle dans une configuration telle que le décor, n’occupant pas toute la largeur de la scène, laissait les spectateurs des côtés en fort mauvaise posture pour entendre. Or les déserteurs étaient des vieilles personnes, lesquelles, comme l’on sait, ont souvent des difficultés d’audition.…

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on-ne-lattendait-pas

Avignon 2015 (15) : Stig Larsson monté par Lavelli, Ahmed El Attar

Par Selim Lander

Deux pièces sur l’incommunicabilité, l’une dans le OFF montée par Lavelli, l’autre dans le IN du metteur en scène égyptien Ahmed El Attar.

On ne l’attendait pas

Dans un précédent article consacré à Crises de Lars Noren, nous écrivions de cet auteur qu’il se rattachait à une tradition psychologique typiquement suédoise depuis
Strindberg et Bergman. On peut dire la même chose de Stig
Larsson, né en 1955 (qu’on ne confondra pas avec Stieg Larsson, l’auteur de Millenium). Sur une grande scène de
Présence Pasteur, un lieu du OFF installé dans un lycée privé, un plancher rond en bois clair délimite l’espace de jeu. A la périphérie du cercle, quelques rares meubles également en bois clair : au fond un banc, à jardin deux fauteuils, à cour un autre fauteuil sur lequel se trouve assise, de dos, une femme, la mère. Debout de l’autre côté, la fille.…

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Forbidden1

Avignon 2015 (14) : Pierre Meunier et Samuel Achache

— Par Selim Lander —

Drôle de journée, dans le IN,
avec deux spectacles aux intentions graves qui se traduisent en gags.

Forbidden di  Sporgersi d’après Algorithme éponyme de Babouillec

Pierre Meunier interprète ou plutôt évoque, enfin s’efforce d’évoquer avec deux autres comédiens (dont l’un, J.-F. Pauvros, surtout chargé de la musique) et une comédienne un texte produit par une jeune autiste appelée Babouillec. Un texte empli de fulgurances.

« Quelqu’un t’interpelle,
Otage de ton Silence, tu perds la Raison de ton Acte.…

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DES PRECIEUSES

Avignon 2015 (13) : Revisiter les classiques – Molière, Hugo

Par Selim Lander

Des Précieuses pas si ridicules

Depuis Molière on garde des précieux et précieuses l’image de personnages ridicules utilisant des métaphores absurdes pour exprimer les choses les plus simples (comme « commodité de la conversation » en lieu et place de « fauteuil »). Molière, néanmoins, avait pris soin de laisser planer un doute en présentant les ennemis des précieuses comme passablement rétrograde. On se souvient, à cet égard, de ce qu’il fait dire à Chrysale, le « bon bourgeois » des Femmes Savantes, le frère en esprit du Gorgius des Précieuses, père de Magdelon et oncle de Cathos :…

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Monument 01

Avignon 2015 (12) : Danser la guerre – Eszter Salamon, Angelin Preljocaj

Par Selim Lander

Retour au IN avec deux
chorégraphies sur le thème de la guerre.

Monument 0 : Hanté
par la guerre (1913-2013)

Ezter Salamon est hongroise ;
elle a créé ses premières pièces en 2001. Elle est aujourd’hui
artiste associée au Centre National de la Danse. Monument : 0 est le premier opus d’une série « explorant à la fois la notion de monument et la pratique d’une réécriture de l’histoire » (le dossier de presse). Pour l’heure, il s’agit de revisiter les danses de guerre de certaines tribus primitives.
Les revisiter, pas les imiter servilement. Quoi qu’il en soit, le résultat semble assez proche des modèles, les mouvements des danseurs demeurant fort rudimentaires, pour ne pas dire… primitifs. Il en va d’une certaine danse contemporaine comme de la peinture qui a connu une courbe ascendante depuis les primitifs du Moyen Âge jusqu’aux grands maîtres de l’époque classique et baroque avant d’amorcer une descente qui l’a conduite sinon en enfer du moins au minimalisme du monochrome.…

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w-perec

Avignon 2015 (11) : Perec, Ionesco

— Par Selim Lander —

Deux grands auteurs « comiques » du XXème siècle qui, chacun à sa manière, ont dénoncé le totalitarisme.

W ou le souvenir d’enfance

Marie Guyonnet, la directrice du
théâtre La Boderie, a déjà adapté il y a quelques années L’Art et la manière d’aborder son chef de service pour lui demander une augmentation de Georges Perec. Elle revient à cet auteur avec l’adaptation, cette fois, de W ou le souvenir d’enfance, un texte qui mêle autobiographie et fiction. Elle utilise à nouveau quatre comédiens (dont deux figuraient déjà dans l’Augmentation). Le décor est constitué au départ par des colonnes de bambou, qui pourront être déplacées, recomposées en fonction des besoins pour construire un bateau, un portique, dessiner une étoile jaune, etc.…

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love_and_money_avignon_off_2015

Avignon 2015 (10) : Dennis Kelly – « Love and Money »

— Par Selim Lander —

Dennis Kelly est un dramaturge
anglais né en 1970. Sa pièce Love and Money (2006) est sans doute la plus connue à ce jour. Créée en France au Rond-Point par Blandine Savatier, elle fait l’objet d’une nouvelle production par une compagnie de Mulhouse dans une mise en scène d’Illia Delaigle avec sept comédiens. Le titre est trompeur : il est beaucoup plus question de dépenses compulsives, de surendettement, de course à l’argent que d’amour, même si ce dernier, naturellement, n’est pas totalement absent dans cette pièce qui, en dépit de ses apparences un peu folles, se veut une peinture à peine caricaturale de la condition de l’homme (et de la femme) moderne.…

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Les Vibrants

Avignon 2015 (9) : Corps meurtris, esprits troublés – Aïda Asgharzadeh,
Côme de Bellescize, Lars Noren, Lacan

—Par Selim Lander —

Quatre pièces sur les corps et
les esprits souffrants, que ce soit par suite des ravages de la
guerre, d’un accident de la route ou d’une maladie mentale.

Les Vibrants

Cette pièce justement ovationnée par la presse et le public l’année dernière, de retour en Avignon pour une deuxième saison, est celle que nous classons en premier parmi toutes celles que nous avons vues jusqu’ici. On y trouve tous les ingrédients nécessaires, à notre sens, pour réussir dans un certain théâtre, de moins en moins présent de nos jours, il faut le dire, bien que toujours très prisé des spectateurs : un propos pertinent et prenant, une
langue qui n’est ni celle de l’écrit, ni celle de l’oral mais bien celle du théâtre, une histoire bien tournée qui ménage des surprises, des comédiens affutés qui respirent le bonheur de jouer, même dans le malheur, un décor capable de créer l’illusion que nous sommes bien là où dit le texte, sans qu’il ait besoin pour autant d’être réaliste, enfin une musique et des lumières intervenant à bon escient sans nécessairement se faire remarquer.…

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A-Petites-Pierres_c Ronan Lietard

Avignon 2015 (8) : Akapo, Brecht, Carbunariu, Dickens, Kermann

— Par Selim Lander —

Sélection cosmopolite et aléatoire de cinq pièces du OFF dues à des auteurs de cinq pays différents, soit dans l’ordre : le Togo, L’Allemagne, la Roumanie, L’Angleterre et enfin la France.

A petites pierres

Gustave Akopo est né en 1974 au Togo. Sa pièce, A petites pierres a reçu le prix d’écriture théâtrale de Guérande en 2006. Elle est montée par Ewelyne Guillaume avec de jeunes comédiens issus de Kokolampoe, le théâtre école plurilingue installé à Saint-Laurent du Maroni, en Guyane. L’histoire est édifiante. Dans un village africain aux mœurs très austères, une jeune fille fiancée à un jeune homme du village est séduite par un émigré de retour au village, auréolé du prestige du « Parisien ». Leur « affaire » est découverte. Gros émois au village. L’honneur du père, celui du père du fiancé sont bafoués. La règle doit s’appliquer : lapidation pour la fautive et amende pour le fautif.…

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Koltès

Avignon 2015 (7) : Les fâcheux – Koltès, Molière

« Sous quel astre bon
dieu faut-il que je sois né

Pour être de fâcheux toujours assassiné ? »
(Molière)

Dans la solitude des champs
de Coton

— Par Selim Lander —

Qui ne connaît le titre, au
moins, de cette pièce de Bernard-Marie Koltès montée pour la
première fois en 1987 par Patrice Chéreau (auquel justement la
Fondation Lambert rend hommage par une exposition en Avignon) ? Dans
la solitude des champs de Coton
est jouée aujourd’hui et
pas par n’importe qui, puisque le comédien dans le rôle du
client est celui-là même pour qui Koltès écrivit La Nuit
juste avant les forêts
et qui l’a créée, en 1977. Mais
revenons au Champ de coton. Deux personnages se
rencontrent la nuit, dans un lieu obscur : le « dealer » (mais
le mot n’est pas prononcé ; il se dit simplement prêt à
satisfaire tous les désirs, sans préciser lesquels) et le
« client », lequel prétend aller à ses affaires et n’avoir
besoin de rien.…

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La peau d'Elisa

Avignon 2015 (6) : Du Québec – Carole Frechette, Michel Tremblay et
Nathalie Boisvert

La Peau d’Elisa

— Par Selim Lander —

Après une première série
d’articles consacrée au festival IN, il est temps de présenter
quelques pièces du OFF et, pour commencer, celles de trois
Québécois. Carole Frechette est une auteure reconnue qui écrit
des textes souvent émouvants joués sur des scènes du monde
entier. La Peau d’Elisa, déjà interprétée l’année
dernière en Avignon par une autre comédienne, est jouée cette
année et mise en scène par Mama Prassinos (accompagnée à deux
moments du spectacle par Brice Carayol). Une femme se raconte,
ou plutôt, comme on le découvrira, elle raconte des histoires
qui peuvent ou non être les siennes. Quoi qu’il en soit, elle
n’est pas comme toutes les femmes. Elle est perpétuellement anxieuse ; son corps, sa peau l’inquiètent. Est-ce qu’il n’y en a pas trop, de peau, sur ses joues, son cou, ses coudes, ses genoux ? Elle s’inquiète et interroge les spectateurs : qu’en pensent-ils ?…

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Avignon 2015 (5) : Stéfano Massini / Anna Politkovskaïa

Par Selim Lander

Anna Politkovskaïa est morte en
2006. L’année suivante paraissait Donna non rieducabile, Memorandum teatrale su Anna Politkovskaja (Femme non rééducable) du dramaturge italien Stéfano Massini. Un texte écrit dans l’émotion de l’assassinat sauvage de la journaliste russe. Une pièce ? Non, un « mémorandum », autrefois on aurait dit un « tombeau d’Anna Politkovskaïa ». Un récit parfois pédagogique car il faut bien expliquer la situation, au besoin en utilisant des textes de la journaliste elle-même, souvent dramatique quand elle interagit avec son partenaire chargé de la sale besogne, celle qui consiste à interpréter les salauds auxquels A. Politkovskaïa s’est frottée, pour son malheur.…

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Avignon 2015 (4) : August Strindberg

— Par Selim Lander —

Après des succès initiaux, l’existence du romancier et dramaturge suédois August Strindberg (1849-1912) est devenue compliquée, malheureuse, déprimée, comme
il le raconte dans son récit Inferno (1897). Le Chemin de Damas, qui date de l’année suivante, se situe dans la même ambiance. Le spectacle présenté, toujours dans le IN, par le jeune metteur en scène Jonathan Châtel, est une adaptation de la première partie de « Till Damaskus ».

Il faut d’abord parler du Cloitre des Célestins qui abrite les représentations, le lieu le plus magique du festival.…

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Les idiots

Avignon 2015 (3) : « Les Idiots »

— Par Selim Lander —

Après N° 51 venue d’Estonie, voici, toujours dans le IN, une pièce en russe surtitré. Kirill Serebrennikov, directeur du Gogol Center de Moscou présente une version scénique des Idiots inspirée du film de Lars von Trier (1995). Pour protester contre une société qui ne leur convient pas, quelques individus décident de faire les « idiots », c’est-à-dire de se comporter de manière ridicule et/ou choquante, comme par exemple se faire pousser dans une chaise roulante en imitant un infirme psychomoteur. Ils se réunissent dans l’appartement de la tante de l’un d’entre eux.…

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Avignon 2015 (2) : « N° 51 – Mu naine vihastas »

Après le Richard III d’Ostermeier en allemand surtitré, un spectacle en
estonien.

 — Par Selim Lander —

En 2004, deux Estoniens Ene-Lis Semper, vidéaste et scénographe, et Tiit Ojasoo, metteur en scène ont créé la compagnie « Teater n° 99 ». Ce nom revêt une signification précise. Leur premier spectacle portait le numéro 99 ; les suivants sont numérotés en comptant à rebours et ils préparent actuellement le n° 43. Celui présenté cette année dans
le IN d’Avignon porte le numéro 51. Son titre en français explique l’argument de la pièce (« Ma femme m’a fait une scène
et effacé toutes nos photos de vacances »). Ce dernier, cependant n’apparaît pas immédiatement. Au début, un homme se trouve dans une chambre d’un hôtel moderne, de bon standing. …

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richard3_c_arno_declair

Avignon 2015 (1) : Shakespeare et compagnie

Par Selim Lander

Première journée au festival d’Avignon 2015 avec deux Shakespeare au programme. Le très attendu Richard III de la Schaubühne (Berlin), mis en scène par Thomas Ostermeier, à l’Opéra d’Avignon, et le Roi Lear présenté dans la Cour d’honneur par le directeur du festival, Olivier Py.

Le Richard III de Thomas Ostemeier

Grand succès de Richard III, qui tient essentiellement à l’interprétation de Lars Eidinger dans le rôle titre. Il joue avec un réalisme étonnant l’être contrefait, jaloux du monde entier, dévoré d’ambition et foncièrement maléfique imaginé par Shakespeare. Affublé d’une bosse sur l’épaule gauche et d’un casque de cuir, avec un soulier démesurément allongé qui dissimule une autre malformation congénitale, les jambes torves, vouté, la démarche ondulante, physiquement inquiétant,  il l’est plus encore par son cynisme, ses manipulations constantes, les mensonges grossiers et les clins d’œil destinés à nous rendre complices de ces crimes.

Richard restera toute sa vie avec sa bosse et ses jambes torves[i] mais connaîtra une transformation physique notable au moment de son accession à la royauté, grâce au corset qui fait disparaître son voûtement.…

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