Migrations

Ma poésie est comme une porte qui claque

— Par Michel Lercoulois —

Sais-tu pourquoi la borne sur laquelle tu es assise est racinée sept fois
Le sais-tu
Devant toi tes enfants
Et les enfants de tes enfants
Ton troupeau
Orgueilleux déterminés
Affamés assoiffés
Viandes grasses libations enivrantes
Sauront-ils se tenir
Sauras-tu les retenir
Ou te précipiteras-tu avec eux dans le gouffre

Entends-tu au loin l’aboiement des chacals
Au loin, pas si loin
Qui ont eu vent de tes festins

Tes gardiens sont fatigués
Certains même ont pitié

Car
Les chacals efflanqués jamais ne connurent l’encens ni la mire
N’est point pour eux la poussière d’or dans leurs tamis
Non plus que les ternes cailloux qu’ils ramènent du fond de la mine
Avec leurs doigts griffus
Diamants étincelant sur la gorge de tes filles
Leurs doigts effilés qui  jamais ne griffèrent la terre

Dans la cure le cul manucuré du curé brûle de désirs
Pénètrent les chacals dans les églises
On a planqué le saint-sacrement
Tes chiens aboient

Arrive le général Hiver
Grelottent les tortues
Dans leur carapace Décathlon
Dérisoire protection

Tes enfants voyagent
Business ou classe éco
Qu’importe
Temples ou pyramides
Mer ou montagne
Qu’importe
Le monde est grand
Faut voyager

Les jets font des gribouillis dans le ciel
Les fumées de kérosène c’est bon pour l’éco

Et clic un selfie devant Ground Zero
Et clic un selfie devant la frontière barricadée
Un touriste blanc de peau reluque les seins de la belle négresse sur la plage
Dans le camp un réfugié basané reluque les seins de la blonde humanitaire
Contre quelques dollars le touriste décati aura la belle négresse
Quelques dollars
Contre quelques milliers de dollars le réfugié basané n’atteindra pas la terre promise
Quelques milliers

Parce que tes chiens
Tes chiens infatigables
Tes chiens qui mordent