Mick Jagger révolutionne le monde depuis Cuba

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Illustration par DANKO

— Par Michel Hernández —
Traduit par Alain de Cullant.
La présence de Mick à La Havane transcende la simple note de couleur et se convertit en fait culturel qui ouvre un nouveau chapitre dans l’héritage émotionnel des Cubains leur permettant de rêver à un grand concert des Rolling Stones dans l’Île.

Mick Jagger a volé les titres dans les journaux et les chaînes de télévision de la moitié du monde. Le leader et chanteur des Rolling Stones a été nouvellement à la une, non pas pour un de ses concerts avec les mythiques Rolling, ni pour ses shows explosifs dans lesquels, à 72 ans, il bouge comme un jeune de 15 ans tandis qu’il semble qu’on lui parle à l’oreille de l’esprit de James Brown ou d’Elvis Presley.

Mick Jagger a été nouvelle ni plus ni moins que pour sa première visite à La Havane, qui a été publiée dans l’édition numérique du journal Granma, faisant le tour du monde et pour les milliers de fans cubains des Stones qui, depuis des décennies, se couchent en rêvant d’un concert dans l’Île de la bande commandée depuis 50 ans par Mick et le guitariste Keith Richards.

Les Cubains attendaient une telle visite depuis très longtemps, depuis trop longtemps. Car, pour beaucoup, Mick Jagger est plus que le chanteur de la bande de rock ayant le plus grand symbolisme, étant toujours sur les scènes et offrant des concerts devant des milliers de personnes sur les principales place du monde, avec toute la dose de la polémique que comporte être une bande qui a été en principe de tout, qui a tout vu, qui a tout fait, qui a influé d’une manière décisive sur l’histoire du rock and roll et qui a survécu à elle-même pour continuer à défendre sa légende : offrant ses classiques au public qui fait des vagues dans chaque concert sans lui importer que ces quatre musiciens ont déjà cessé d’être les garçons terribles qui sortaient manger le monde et pour décharger son adrénaline sauvage au rythme de Satisfaction, Sympathy for the Devil, Brown Sugar, Gimme Shelter, Paint It Black ou Wild Horses.

Pour les fans cubains des « pierres roulantes » (Mick, Keith Richards, Ron Wood et Charlie Watts), Jagger est le mythe vivant d’une époque complètement liée à la jeunesse, dont la bande sonore leur a servi comme refuge, comme arme, comme retraite spirituelle et qui, aujourd’hui, s’en rappellent comme on peut seulement se rappeler des premières années des fêtes, des excès et des désirs furtifs.

C’est pour cela que la présence de Mick transcende la simple note de couleur et se convertit en fait culturel de grande résonance, qui ouvre un nouveau chapitre dans l’héritage émotionnel des Cubains (et pas seulement de ceux qui ont la soixantaine), leur permettant de rêver à un grand concert des Rolling Stones dans l’Île, qui sans aucun doute réunirait des milliers de personnes de tout le pays.

Cette possibilité n’est pas très lointaine car, il y a quelques semaines, on a appris les déclarations de Keith Richards dans lesquelles il révèle que les Rolling Stones dialoguaient avec les autorités culturelles cubaines quant à un concert à La Havane au mois de mars de l’année prochaine. Quoi qu’il en soit, il faut dire que ni les représentants des Stones ni les autorités cubaines ont confirmé la nouvelle du concert du groupe à La Havane.

Mick est arrivé à Cuba lors d’une visite privée et il a exploré le terrain culturel de la capitale. Après avoir vécu la nuit havanaise dans quelques bars, il a fait un saut à la Fábrica de Arte Cubano où il a vu un concert de la bande Polaroid et il s’est intéressé au répertoire de ces jeunes musiciens qui viennent de présenter leur premier disque ayant un discours très original et distinctif ; il a partagé avec les rumberos dans la Peña del Ambia, de l’Union des Ecrivains et des Artistes de Cuba (UNEAC) ; il a écouté un concert de l’orchestre Bamboleo ; il a parcouru certains sites du Centre Historique de La Havane.

Depuis des années on a jeté de l’huile sur le bûcher de la polémique en relation avec la proéminence des Rolling Stones en face des Beatles ou vice versa (il est vrai que les Stones et les Beatles n’ont pas eu telle rivalité quand ils ont commencé à conquérir le monde et qu’ils ont partagé plus d’une fois amicalement entre eux). Mais il ne doit pas y avoir une place pour le débat : la bande dirigée par Lennon – qui aurait eu 75 ans le 9 octobre – a changé les concepts de la pop-music et du rock, il a été une icône du mouvement et de la philosophie hippie, a bu jusqu’à s’enivrer de la musique psychédélique, il a annoncé le rock progressif et il a embrassé des postures politiques qui ont été prises comme étendards.

Aujourd’hui, les Beatles vivants ont plus de 70 ans. Le même âge que Mick Jagger, qui conserve une vitalité qui ne paraît pas de ce monde.

Il est vrai que la musique des Stones a une connexion intense avec les Cubains et nous espérons que les vétérans rockeurs britanniques pourront le vérifier le plus vite possible. Car si finalement ils réussissent à donner un concert à Cuba, le public aura la possibilité de solder certains comptes avec le passé alors qu’il profitera en direct d’une légende du rock and roll. Si le concert se concrétise, il n’y aura pas seulement les Stones, mais aussi Lennon, Paul, Ringo et Harrison, au côté de centaines de milliers de Cubains, qui bien que certains ne les aient pas vécus, sentiront dans les entrailles tous les rêves d’une génération, celle des années 60 et 70 et du son d’une époque qui a toujours une forte présence, surtout quand elle est appuyée par le rythme sauvage des Rolling Stones.

Lettres de Cuba