Le maire de Pointe-à-Pitre sous le coup d’une procédure de révocation

Pointe-à-Pitre – Le maire de Pointe-à-Pitre, Jacques Bangou, s’est vu notifier une procédure de révocation lundi pour mauvaise gestion de sa commune, a-t-on appris de sources concordantes.

Cette procédure, rare à l’encontre d’un édile, a été lancée par le préfet Philippe Gustin à la suite d’un rapport de la Chambre régionale des comptes (CRC) publié fin mars qui pointait un budget primitif 2018 en déficit de 78 millions d’euros.

M. Bangou dispose d’un mois pour présenter une réponse contradictoire.

Le rapport de la CRC évoquait un déficit structurel grave et une situation financière risquant « à brève échéance de ne plus pouvoir être redressée », ainsi que nombre « d’insincérités budgétaires ».

La Chambre déplorait également l’absence de réaction de la commune, sous-préfecture de Guadeloupe, à ses précédentes recommandations: « Depuis 2015, la chambre propose des mesures de redressement dont la commune ne tient aucun compte. (…) La volonté de ne pas gérer ses ressources et ses dépenses se confirme année après année ».

Dans une lettre ouverte, Jacques Bangou s’interroge sur « la faute grave » qu’il aurait pu commettre « pour donner au pouvoir le prétexte d’écarter le maire de la ville de Pointe-à-Pitre, vice-président de Cap Excellence (communauté d’agglomération du sud-Grande-Terre, ndlr) et président du PPDG (Parti progressiste et démocratique guadeloupéen, ndlr) ».

La procédure de révocation s’appuie sur le code général des collectivités territoriales, qui prévoit que le maire et les adjoints peuvent être soit suspendus par un arrêté ministériel motivé – pour une durée qui ne peut excéder un mois -, soit révoqués par décret pris en Conseil des ministres.

Si l’édile devait être révoqué, il serait remplacé par sa première adjointe, Josiane Gatibelza, et une nouvelle élection devrait être organisée sous quinze jours. M. Bangou pourrait toutefois déposer un recours devant le Conseil d’Etat.

En Guadeloupe, comme aux Antilles, la CRC épingle régulièrement les communes et les organismes publics pour leur mauvaise gestion.

Près de deux communes guadeloupéennes sur trois sont situées dans la zone d’alerte du réseau des finances locales, selon un document révélé par le quotidien FA Guadeloupe début mai.

Ces difficultés financières s’expliquent notamment par une masse salariale des communes importante et en croissance constante. « Les dépenses de personnel représentent 65 % de leurs charges et elles ont augmenté de 10% en trois ans », selon un document de la Direction générale des finances publiques de Guadeloupe, que l’AFP s’est procuré. « La prime de vie chère (+ 40%) explique aussi la dépense supplémentaire ».

Dans un communiqué commun, le sénateur PS de Guadeloupe et ancien ministre des Outre-mer Victorin Lurel et les députées socialistes de Guadeloupe Victoire Jasmin et Hélène Christophe-Vainqueur ont dénoncé mardi une « procédure infamante » qui, selon eux, « s’apparente à une manoeuvre politique visant à punir un maire d’opposition ».

La présidente socialiste du département, Josette Borel-Lincertin a également fustigé « le caractère politicien de cette procédure de révocation rarissime dans toute l’histoire de la Ve République ».