Aux RCM : à voir ou à revoir, « Miraï, ma petite sœur »

Jeudi 28 mars, 16 heures à Madiana

— par Janine Bailly —

« Miraï, ma petite sœur », du Japonais Mamoru Hosoda, déjà vu cette année dans la séance VO de Madiana, est ciselé comme un petit bijou, chaque dessin si minutieusement réalisé que les personnages acquièrent sur l’écran une véritable profondeur, et qu’on se laisse attendrir par l’histoire de Kun, ce petit garçon dont la vie est troublée par la venue au sein de la famille d’un bébé, la petite sœur, nouvel objet de l’affection et de l’attention parentales. Comment partager ce qui n’était jusqu’alors qu’à soi ? Comment vaincre ce sentiment qui fait mal agir, et qui se nomme jalousie ? Caprices, colères, gestes mauvais envers l’intruse dans son berceau, tout sera bon pour manifester son dépit, pour aussi faire que se porte à nouveau sur soi le regard de Papa et Maman.

Mais l’enfant n’est pas seul responsable de ces débordements, la maladresse des adultes le confortant dans sa révolte : plutôt que de lui expliquer, sereine, la fragilité du bébé, Maman retire vivement Miraï du berceau alors que le garçon croyait pouvoir jouer avec elle, lui montrer ses trains-miniatures ou ses livres de sorcières. Grand-père, lui, filme avec amour Miraï, et Kun tente désespérément, par quelque pirouette, de s’inclure dans l’image… Ainsi le réalisateur met à profit l’histoire pour décrire le fonctionnement d’un couple devenu famille. Maman travaille à l’extérieur, et doit parfois s’absenter, laissant Papa gérer tant bien que mal maison et enfants, en sus de son travail sur l’ordinateur. Peu à peu, lui qui ne savait pas même donner un biberon, qui faisait pleurer Miraï chaque fois qu’il la prenait dans ses bras, entre dans son rôle de père accompli qui, au parc, saura au même temps surveiller le bébé et apprendre la bicyclette à son garçon. Alors l’harmonie pourra renaître au sein de la maison.

L’autre propos est la recherche d’identité : comment savoir qui je suis maintenant, quelle est ma place et comment l’accepter ? Pour cela, Kun entre dans son jardin où l’arbre généalogique incarné le transporte dans le passé et le futur. Là il rencontre « Miraï de l’Avenir » —  avenir, tel est d’ailleurs le sens du prénom Miraï — qui lui donne son nom de grand frère, statut que de bon cœur il finit par accepter. Là il fait connaissance de Maman dans sa jeunesse, ou de son arrière-grand-père jeune et bel héros de guerre qui l’emmène pour une course folle sur sa moto. Monde magique de l’enfance, où le Chien Yukko, lourd d’expérience, se voit doté de paroles et donne de bons conseils ! Ce qui fera dire à une bien petite fille dans la salle : « Maman, c’est un rêve ? ». Un film intelligent et sensible sur la famille, à voir en famille !

Enfin, si l’on voulait parler technique, il serait à remarquer que « le design fut confié à un architecte qui a conçu les plans d’ouvrage comme un véritable projet, livrant une réelle réflexion sur l’espace, la lumière, les volumes et les matériaux. La maison ainsi créée n’est ni dans le pur style japonais, ni de type occidental ; elle représente plus une scène de théâtre avec ses différents paliers en cascades et son absence de cloisons ». Et là n’est pas le moindre intérêt du film, qui offre cette scène au petit garçon, contribuant au fait que l’histoire est subtilement dite à hauteur d’enfant !
Fort-de-France le 28 mars 2019