« Wopso! », de Marius Gottin, m.e.s. José Exélis, avec Émile Pelti & Charly Lérandy

Samedi 29 Octobre – 19h30 / Salle Frantz Fanon
Texte : Marius Gottin
Mise en scène : José Exélis
Avec : Émile Pelti, Charly Lérandy
Dans le hall de l’aérogare, Fulbert et Auguste attendent l’heure de départ de leur avion. La salle d’embarquement devient alors un espace de paroles.

Extrait d’un article du 22 avril 2007 (Madinin’Art) :
Wopso!
Au programme Wopso ! de Marius Gottin mis en scène donc par José Exélis. Wopso est une interjection, qui ne veut rien dire, donc polysémique à souhait et qui ponctue les discours manifestes de deux vieux messieurs, dans un improbable hall d’aérogare de Fort-de-France dans l’attente d’un départ incertain pour Sainte-Lucie. Deux vieux clowns comme une vie en transit, pris dans l’impasse du temps qui passe et qui bientôt seront jetés sur les rivages de la mort. Que faire quand il n’y a plus rien à faire? Dire ce qui n’a jamais été dit et qui a toujours été su dans l’émotion, la colère et l’amour. L’amour de ces deux là, pour sûr qu’ils s’aiment Fulbert et Auguste, sinon la détestation ne serait pas si grande, mais aussi l’amour pour les femmes, ces fantômes qui les hantent de n’avoir jamais su les toucher du mot juste. Alors reste la parole, française-créole, créole-française, la jonglerie des mots pour dire, Paulette, Thérèse, Atisousoune, la jalousie, la tendresse et la mort. Les vies s’envolent ne restent que les paroles appuyées sur les notes d’un harmonica essoufflé pour qu’enfin se murmurent dans l’entre deux des langues, dans l’entre deux des mots l’esquisse d’une ébauche de vérité. Il y a du Beckett chez Marius Gottin, ce qui n’est pas peu dire, dans cette écriture du dérisoire qui nous cerne et de l’insensé qui nous gouverne. Marius Gottin est un gai pessimiste dénué de tout cynisme qui semble croire que l’humanité n’est qu’un passage, un transit.
José Exélis a su lire ce beau texte. Sa mise en scène empreinte d’une légère élision du côté sombre de la farce est rigoureuse, réglée et enlacée au plus près du verbe gottinien. Il est aidé en cela par deux magnifiques comédiens, Emile Pelty et Charly Lerandy, visiblement complices et ravis d’être en scène s’en donnent à cœur joie, un peu trop par moment, le premier soir de la reprise. Ils cédaient en cela à l’invite du public, ravi lui aussi et qui anticipait les répliques des deux protagonistes. Par ailleurs jouer en plein air incite à forcer le trait, la voix, à l’excès. Les lumières travaillées par l’astre lunaire un peu fantasque, méritaient un autre traitement. Reste l’essentiel à savoir Wopso! est un spectacle entre rires et larmes, entre ici et là-bas, qui puise aux sources des identités caribéennes, martiniquaises une pièce inscrite au répertoire d’ici, bien servie par une mise en scène millimétrée, qui serait mieux mise en valeur dans un espace clos. Mais la soirée était belle.

R.S.