Tribune – “Agir pour la situation avant qu’il ne soit trop tard”

Nous sommes français, laïcs, républicains, de toutes opinions. Certains d’entre nous ont l’habitude de s’exprimer à titre collectif. D’autres non. Mais si nous le faisons aujourd’hui ensemble, c’est parce que les circonstances sont particulièrement graves, et qu’il est encore temps d’agir. Nous sommes profondément attachés à l’existence de l’État d’Israël dans des frontières sûres et reconnues, à la création d’un État palestinien démocratique, à la paix et à la coopération entre ces deux entités. Nous avons été horrifiés par les crimes sanglants du Hamas le 7 octobre 2023, et les prises d’otages qui les ont accompagnés. Nous avons considéré que l’État d’Israël était alors en situation de légitime défense.

Nous avons été stupéfaits par la complaisance de certains mouvements politiques et de certains médias, en France même, envers les crimes et l’idéologie totalitaire du Hamas. Et écœurés par l’instrumentalisation chez nous de cette situation tragique, l’antisionisme étant le plus souvent le masque transparent de l’antisémitisme.

Toutefois, nous avons considéré que la réponse de l’État d’Israël devait être proportionnée, et s’exercer dans le strict respect du droit de la guerre et des conventions internationales, en visant à préserver les civils. Chaque fois que cela n’a pas été le cas nous le condamnons comme nous condamnons aussi les crimes de guerre du Hamas.

« Révoltés par le sort fait aux Palestiniens, inquiets pour l’âme d’Israël »

Nous avons observé que la trêve, bien que beaucoup trop tardive et incomplète, avait permis la libération de 135 otages et d’épargner des vies palestiniennes à Gaza. Aujourd’hui, une étape supplémentaire de l’engrenage infernal ouvert par le 7 octobre est franchie : le gouvernement Netanyahou et ses ministres, la plupart d’extrême droite, attaquent la démocratie israélienne et son État de droit, sacrifient froidement les otages, multiplient les colonies en Cisjordanie, couvrent les exactions des colons et préparent clairement l’annexion des territoires occupés. Ils reprennent l’offensive à Gaza et annoncent un plan d’occupation de ce territoire et de déplacement de masse de ses populations, en contradiction flagrante avec le droit international.

Nous sommes révoltés par le sort fait aux Palestiniens, inquiets pour l’âme d’Israël, pays que nous aimons, et solidaires de la société civile israélienne qui se mobilise contre son gouvernement. Solidaires aussi des populations palestiniennes qui osent braver le Hamas à Gaza.

Nous restons les héritiers – et les orphelins ! – du processus d’Oslo. Nous gardons en mémoire la poignée de main Rabin-Arafat, rendue possible par le président Clinton et les États-Unis d’Amérique. Ce sont souvent les ennemis d’hier qui ensemble construisent le monde de demain.

Nous demandons à la France et à l’Europe, nous demandons au Royaume-Uni, nous demandons à toutes les grandes démocraties de réagir avec force et d’empêcher cela  : la paix maintenant  ! Elles en ont les moyens. Elles doivent trouver les mots et les actions pour y parvenir.

Signataires

Sylviane Agacinski, philosophe
Frédéric Attal, historien
François Berléand, comédien
Charles Berling, comédien
Régis Bismuth, juriste
Pascal Bruckner, écrivain
Éric Chaney, économiste
Juliette Claviere, fonctionnaire
André Comte-Sponville, philosophe
Fabrice D’Almeida, historien
Kamel Daoud, écrivain
Gilles Finchelstein, dirigeant d’une fondation
Gérard Grunberg, politologue
Michel Hazanavicius, cinéaste
Eva Illouz, sociologue
Pierre Jacob, philosophe
Christophe Jaffrelot, politologue
Laurent Joly, historien
Laurent Joffrin, journaliste
Hakim El Karaoui, consultant
Julie Klein, juriste
Zaki Laïdi, politologue
Bernard Lachaise, historien
Marc Lazar, historien
Didier Leschi, haut fonctionnaire
Christian Lequesne, politologue
Judith Lyon-Caen, historienne
Marc Levy, écrivain
Marie-Anne Matard-Bonucci, historienne
Nonna Mayer, politologue
Denis Olivennes, chef d’entreprise
Erik Orsenna de l’Académie française
Pascal Ory de l’Académie française
Denis Peschanski, historien
Pascal Perrineau, politologue
Christophe Prochasson, historien
Jean François Rial, chef d’entreprise
Jacques Rupnik, politologue
Julie Saada, philosophe
Dominique Schnapper, sociologue
Fabienne Servan Shreiber, productrice
Marie Laure Sauty de Chalon, chef d’entreprise
Bruno Solo, comédien et réalisateur
Mario Stasi, président de la LICRA
Annette Wieworka, historienne

Tribune publiée sur le site de La Tribune Dimanche : https://www.latribune.fr/la-tribune-dimanche/opinions/opinion-agir-pour-la-situation-a-gaza-avant-qu-il-ne-soit-trop-tard-par-michel-hazanavicius-erik-orsenna-et-43-personnalites-1024624.html