Tout juste chroniqueur…

— Par Yves-Léopold Monthieux 

Ainsi donc, d’après certaines réactions à sa dernière tribune écrite sur Alfred Marie-Jeanne, votre serviteur serait devenu marie-jeanniste, ce qu’il n’aurait pas été jusque-là. Ces imputations viennent de censeurs qui visiblement n’ont pas lu ses tribunes et l’ouvrage qu’il a écrit sur le leader indépendantiste, Alfred Marie-Jeanne a bouclé sa révolution, la fin d’une époque. Un essai qui ne donne ni dans la critique bête et méchante ni dans la flagornerie. Il est vrai que le seul fait de tenir à l’égard d’un homme politique un propos qui ne soit pas louangeur constitue un crime de lèse-majesté de la part de ses fans, toujours prêts à allumer le bûcher.
Lorsqu’en 2007, à Paris, le Président avait promis à celui qui écrit ces lignes de lui accorder une interview à son retour en Martinique, ce dernier n’était pas devenu pour autant l’un de ses partisans ; et lorsque, au vu du questionnaire que son auteur n’avait pas voulu modifier, Chaben a refusé de donner suite à sa promesse, ils ne sont pas pour autant devenus des ennemis. De même, lorsqu’il écrit que l’indépendantiste de Rivière-Pilote n’a pas œuvré pour l’indépendance de la Martinique, alors qu’il a occupé toutes les fonctions de responsabilité de l’île pendant plus d’un demi-siècle et qu’il a ignoré le drapeau nationaliste rouge – vert – noir, Monthieux ne s’est pas interdit de rappeler, à l’inverse, que le patron du MIM est à l’origine des deux modifications de la constitution française et des deux consultations populaires qui ont conduit à la création de la Collectivité territoriale de Martinique (CTM) ; que malgré ses protestations de foi fanonienne et sa distance à l’égard de la négritude, Alfred Marie-Jeanne est celui qui a vraiment mis fin au moratoire de Césaire ; que derrière sa barbe et ses coups de colère, parfois simulés, il y avait un bon bougre ; qu’enfin il n’a jamais été un homme de doctrine ou d’idéologie mais, en réalité, un homme de pouvoir, un réel autocrate qui prend le pouvoir tel qu’il se présente à lui. Peu importe que ce soit dans le cadre départemental, de l’autonomie ou de l’indépendance, il veut être le premier.
Ce mode de fonctionnement intellectuel de votre chroniqueur a valu pour tous les hommes politiques qu’il a croqués pendant 25 ans. Ainsi, ses grandes réserves à l’égard du fonctionnement de la CTM, machine à fabriquer du totalitarisme et des présidents autocrates, peuvent parfaitement s’entendre de la part de celui qui, par ailleurs, a reconnu en l’actuel président le seul qui, dans l’action et malgré l’impopularité, soit resté fidèle à ses convictions. Trop de nationalistes proclamés partagent an ba fey les vues des adversaires de l’évolution statutaire et auraient aimé lui poser la question suivante : “La rupture, quelle rupture … ?”
Ni partisan ni adversaire des uns ou des autres, votre serviteur a autant que possible essayé d’être objectif et respectueux des hommes. A ce propos, à l’exception d’un seul d’entre eux qui garde son estime, il n’a jamais été interpellé par des élus qui ont pu se sentir écorchés, à un moment ou à un autre de ce quart de siècle, par les centaines de “contrechroniques” parues dans la presse écrite, la seule libre finalement.
Fort-de-France, le 30 avril 2025
Yves-Léopold Monthieux