— Par Hélène Lemoine —
Un roman de filiation et d’empire
Mercredi 5 novembre, au restaurant La Méditerranée à Paris, Emmanuel Carrère a reçu le prix Médicis 2025 pour son roman Kolkhoze (P.O.L). Un verdict limpide — cinq voix au premier tour — pour un livre déjà consacré par le public, vendu à plus de 140 000 exemplaires depuis sa sortie fin août. Finaliste malheureux du Goncourt, Carrère trouve ici une revanche élégante et un hommage vibrant à celle qui fut sa première figure d’autorité et de fascination : Hélène Carrère d’Encausse, mère aimée, admirée, disputée, première femme secrétaire perpétuel de l’Académie française, disparue en août 2023.
« Kolkhoze », c’est le siècle passé, ses déchirures, notre présent, sa douleur », écrivait le critique Olivier Mony. Et c’est bien à cette articulation entre mémoire familiale et tragédie politique que s’attache Carrère. D’une plume ample, parfois digressive, souvent bouleversante, il tisse quatre générations d’exilés, de la Géorgie des années 1920 à la France des Lumières, en passant par la Russie soviétique, la Seconde Guerre mondiale, l’effondrement du bloc communiste et la guerre d’Ukraine.
