Vendredi 17 et Samedi 18 octobre à 19h 30 au T.A.C. ( Théâtre Aimé Césaire)
— Dossier de presse —
Chorégraphe :Christiane Emmanuel
Collaborateur artistique : Ricardo Miranda
Danseurs interprètes : Patricia Ortega (Saint Domingue), Julie Dossavi (France-Bénin) , Murielle Bedot (Martinique) ,Yaël Réunif (Martinique)
Musique : Jeff Baillard
Régisseur général et lumière : Dominique Guesdon
Note d’intention
Près de 80 années après la prise de conscience et les débuts de l’émancipation féminine, nous femmes, nous qui avons été biberonnées aux contes de fées et à la figure du prince charmant, nous qui avons été éduqué la plupart du temps à travers ces stéréotypes sexistes nous indiquant la place que nous devions tenir dans la société, la maison, la famille, quelles seraient nos perspectives ? Qu’avons-nous à nous dire collectivement ? Comment pouvons-nous nous inscrire dans la mouvance ?
Ces pistes et questionnements forment le terreau de ma réflexion autour de cette écriture chorégraphique.
Dans la plupart des sociétés et en Occident, les femmes jouent un rôle primordial dans l’initiation des enfants et leur accompagnement vers la vie adulte. Dans l’espace familial, les contes de fées racontent le merveilleux, le rêve, l’intime, donnent un sens à l’inconnu. L’émergence des religions monothéistes, l’établissement de sociétés patriarcales qui en découlent vont progressivement parer les contes d’habits de la moralité.
C’est au XIXème siècle avec la révolution industrielle que s’installe de façon définitive une pensée puritaine et calviniste, héritée de théories écrites au XVIème siècle. Les contes de fées comme la Belle au Bois Dormant ou le Petit Chaperon Rouge ne sont plus initiatiques, mais deviennent un instrument d’endoctrinement patriarcal et vont contribuer à profondément marquer l’inconscient. Perrault et les frères Grimm, les moralistes les plus connus, vont œuvrer en ce sens et contribuer par la réécriture de ces contes à la moralisation et à un ordre de genre tel que voulu par le système politico-religieux en Europe.
Même si les femmes ne se sont pas tues, même si elles ont depuis toujours lutté et existé, l’ordre établi, la hiérarchie des sexes, la chosification des femmes ont pu prospérer au fil des décennies et atteindre l’apothéose dans notre société de consommation.
Disney, et d’autres, avec un discours profondément patriarcal, politiquement correct et mercantile profitent aujourd’hui de ce conditionnement présent dans l’éducation des petites filles et des petits garçons cherchant à opposer le féminin au masculin.
Aujourd’hui nous nageons en pleine confusion. Le travail entamé par les frères Grimm et les moralistes des XVII et XVIIIème siècle,
pérennisé par Disney et actuellement avec les réseaux sociaux avec la surinformation, la désinformation, la déformation de l’information crée cette confusion en mutilant le caractère symbolique de ces contes.
Pendant des siècles les femmes ont été des corps à disposition c’est pour cela qu’il faut lutter ensemble, homme, femme, pour se débarrasser des injonctions patriarcales en créant un projet de coïncidence à soi, que les femmes aient le choix des représentations d’elles-mêmes.
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À propos de « Signes particuliers »
« Chaque femme porte en elle une force naturelle riche de dons créateurs, de bons instincts et d’un savoir immémorial. Chaque femme a en elle la Femme Sauvage. Mais la Femme Sauvage, comme la nature sauvage, comme, l’animal sauvage, est victime de la civilisation. La société, la culture la traquent, la musellent, afin qu’elle entre dans le moule réducteur des rôles qui lui sont assignés ».
Clarissa Pinkola Estès – « Les femmes qui courent avec les loups »
“« Signes Particuliers » est une oeuvre de femme pour les femmes, engagée, mettant en scène une
conversation de femmes autour de la place qui leur est réservée dans une société patriarcale,
postcoloniale : leurs préoccupations, leurs questionnements, leurs doutes…
À travers cette chorégraphie, j’ai mis en lumière trois générations de femmes, de styles et de pratiques de
danses différentes.
Je dénonce ainsi l’objectification des femmes, celles-ci sont trop souvent présentées comme objets de désir et
de consommation dans notre société de surconsommation.
Je dénonce aussi l’invisibilité et l’invisibilisation des femmes par les stéréotypes, les violences sexistes et
sexuelles du quotidien.
Sur scène, quatre femmes, quatre personnalités, quatre styles différents de danses, qui « égrainent » ce
qu’elles vivent au quotidien à travers une danse sauvage, bestiale, qui nous emportent dans un tourbillon de
sentiments contradictoires : la colère, la frustration, le désir, la rage, la joie, le chagrin, le bonheur, l’envie, la
mélancolie, le refus…
Sur scène, un totem, unique décor, objet central sur lequel sont suspendus des couvercles de casseroles et
une soupière. C’est une représentation symbolique de la cuisine souvent rappelée aux femmes comme lieu
de prédilection.
Ce bruit de casseroles, incessant, bruyant, voire dérangeant, fait écho au malaise de ces femmes face à
l’inaction encore trop flagrante de la société au sujet des inégalités femmes/hommes aujourd’hui.
Cet échange sur scène que j’ai voulu intense, pesant, est tenu par quatre femmes, d’origines différentes
(Caraïbes/France-Afrique). Murielle Bedot, Yaël Réunif (Martinique), Julie Dossavi (France-Bénin), Patricia
Ortega (République Dominicaine).
Entre rêves et espoirs, ces femmes se réapproprient leurs corps et font valser ces représentations erronées,
injustes, des femmes dans la sphère privée et publique…”
Christiane Emmanuel