Un bâtisseur de Fort-de-France, un militant de la conscience martiniquaise
Renaud Jouye de Grandmaison s’est éteint le 1er mai 2025 à l’âge de 88 ans. Son décès marque la disparition d’une figure emblématique de la vie politique, sociale et culturelle de la Martinique. Fidèle compagnon d’Aimé Césaire et de Pierre Aliker, il fut l’un des piliers du Parti progressiste martiniquais (PPM), mais aussi un artisan discret et rigoureux du développement de Fort-de-France.
Né le 18 mai 1936, il s’engage très jeune dans la vie militante. Pendant ses années d’études à Bordeaux, il adhère à l’Association générale des étudiants martiniquais (AGEM), puis participe en 1963 à la création de l’OJAM (Organisation de la Jeunesse Anticolonialiste Martiniquaise), deux mouvements qui nourriront sa pensée humaniste et décoloniale. En 1958, il participe à la fondation du PPM, dont il deviendra secrétaire général à l’organisation et à la propagande en 1967.
Titulaire d’une maîtrise en droit public, il débute sa carrière à l’hôpital du Lamentin avant d’être nommé secrétaire général de la mairie de Fort-de-France. À ce poste-clé, qu’il occupera jusqu’en 2000, il sera le bras droit d’Aimé Césaire, incarnant un sens profond du devoir et de l’efficacité administrative.
Son empreinte est visible à travers les grands projets structurants de la ville : la mise hors d’eau de la ville basse, la rénovation de la cathédrale, la création du quartier de l’Étang Z’Abricots, mais aussi la naissance d’équipements culturels majeurs tels que le SERMAC, les centres culturels de quartier ou encore l’Association Martiniquaise de l’Éducation Populaire (AMEP).
De 1988 à 2004, il est également conseiller général aux côtés de Claude Lise, poursuivant son engagement pour un développement équitable et progressiste de l’île. Homme de rigueur et de conviction, il était reconnu pour son autorité naturelle, son humilité et sa fidélité inébranlable aux idéaux de Césaire.
Pour ses proches et collaborateurs, il fut un guide, un conseiller précieux, un organisateur brillant. Le maire actuel de Fort-de-France, Didier Laguerre, se souvient d’un homme « profondément engagé, inlassablement travailleur », porteur d’« une pensée politique toujours tournée vers le progrès ». Serge Letchimy, président du Conseil exécutif, salue « une figure majeure de l’histoire martiniquaise », un homme de « fidélité, de conviction et d’action ».
Renaud Jouye de Grandmaison laisse derrière lui le souvenir d’un homme dont l’engagement et l’intelligence ont contribué à éveiller des générations de consciences martiniquaises. Son œuvre continue de façonner le visage de Fort-de-France et l’esprit du PPM. Il restera dans la mémoire collective comme un bâtisseur d’avenir et un serviteur du peuple.