Remaniement ministériel, le retour de l’Outre-Mer à l’Élysée

— Contrechroniques d’Yves-Léopold Monthieux —

Fort-de-France, le 14 octobre 2025

Par leur nature, les territoires d’Outre-Mer relèvent du domaine régalien. Malgré leur intégration dans l’organisation administrative del’Etat, leurs spécificités qui varient d’un territoire à l’autre appellent une administration différenciée. Leur diversité géographique, ethnique et culturelle ainsi que leur éloignement de la métropole interrogent sur leur mode d’ancrage à la France et à l’Europe.

Ouverts aux vents du grand large, ils sont perméables à toutes les idées qui traversent le monde. Il y a lieu de distinguer ces territoires entre eux et de les regrouper dans le concept dit “Outre-Mer”, dénomination qui tombe sous le sens, vu de la métropole, mais qui est aujourd’hui controversé par un chatouilleux rappel du passé colonial. On en est aux balbutiements d’une nouvelle expression, “France des océans”, qui voudrait faire disparaître la tonalité coloniale du vocable “Outre-Mer”, tout en en renforçant de manière paradoxale le sentiment d’appartenance.

Éparpillés sur autant d’océans que de continents, ils occupent des lieux stratégiques qui constituent des éléments majeurs de géopolitique, à la lisière de la politique étrangère. Depuis le renforcement des revendications statutaires, dans les années 1980, le caractère régalien de la politique de l’Outre-Mer s’est renforcé. Nonobstant la présence au “petit Matignon” de l’Outre-Mer d’un ancien Premier ministre, le président de la République n’a jamais vraiment lâché le morceau et on peut dater la véritable reprise du dossier à la veille du congrès des élus du 8 octobre dernier. Cependant, en ces temps de turbulences de tous ordres venant de tous les azimuts, les initiatives du ministre, ministre d’État de surcroît et se piquant de géopolitique, ne pouvaient qu’irriter l’actuel locataire de l’Élysée.

Sous Jacques Chirac le Premier ministre et la ministre des DOM avaient fait les frais de l’engagement présidentiel. Jean-Pierre Raffarin avait été squeezé, et Brigitte Girardin priée d’apporter la parole du chef. Leurs successeurs François Fillon et Marie-Luce Penchard seront à leur tour écartés par Nicolas Sarkozy. On observera que les deux présidents de la République qui ont fait bouger les statuts des anciens départements d’Outre-Mer étaient de droite. Ils se sont personnellement mouillé la chemise, le premier en faisant notamment modifier la constitution, le second en obtenant la création de la collectivité territoriale de Martinique (CTM).

Avec la nomination de Mme Naïma Moutchou, le recours à une ministre des DOM peu au fait des problèmes de l’Outre-Mer peut être regardé comme un retour à la norme et la soumission du règlement des problèmes de l’Outre-Mer à des méthodes dites jupitériennes. On sait que celles-ci n’ont pas toujours été heureuses.

Fort-de-France, le 14 octobre 2025

Yves-Léopold Monthieux