« Rebuilding » : Des cendres, mais peu d’étincelles

— Par Hélène Lemoine —

Sur le papier, Rebuilding a tout pour toucher : un Ouest américain ravagé par les incendies, un homme qui a tout perdu, une tentative de reconstruction intime et collective. À l’écran, le film séduit d’abord par la beauté de ses paysages et par une atmosphère mélancolique soigneusement travaillée. Les personnages sont globalement attachants, et l’on sent un vrai respect pour ces figures marginales, incarnées avec justesse par des comédiens professionnels comme amateurs. Pourtant, cette délicatesse formelle finit par devenir un piège.

Le film s’enferme dans une tristesse constante, presque écrasante, sans jamais offrir de véritable respiration. La relation père-fille, pourtant porteuse d’émotion, peine à dépasser un registre attendu. Josh O’Connor, très présent dans le cinéma récent et souvent célébré, se contente ici d’un jeu minimaliste : regard mélancolique, épaules voûtées, mutisme poli. Cela fonctionne, mais sans surprise ni profondeur supplémentaire. À force de rester aussi figé que son personnage, le film donne l’impression d’attendre un événement ou un basculement qui n’arrive jamais, ce qui devient frustrant pour le spectateur.

On peut deviner en filigrane une critique sociale – de l’abandon des plus précaires, du réchauffement climatique, d’une Amérique incapable de protéger les siens – mais Rebuilding reste trop lisse politiquement pour que ces thèmes prennent une réelle ampleur. La communauté de survivants, filmée sous des couchers de soleil presque trop beaux, évoque inévitablement Nomadland, sans jamais atteindre la même justesse ni la même force. Le récit de résilience proposé ici paraît souvent mièvre : rien n’est vraiment grave, tout semble trop propre, trop esthétisé pour être pleinement crédible.

Pire encore, le film finit par retomber dans les clichés qu’il semblait vouloir éviter, avec un retournement final qui transforme son anti-héros en sauveur providentiel. Ce choix affaiblit considérablement le propos et rend l’ensemble plus conservateur qu’il n’y paraît. Rebuilding se regarde sans difficulté, mais laisse un goût d’inachevé : trop triste pour être réconfortant, trop proche du documentaire pour être réellement romanesque, il échoue à offrir autre chose qu’un constat morose déjà largement visible ailleurs.

 

« Reebuilding », un film de Max Walker-Silverman
Par Max Walker-Silverman , Avec Josh O’Connor, Meghann Fahy, Kali Reis | 17 décembre 2025 en salle | 1h 35min | Drame