Tanbouyé martiniquais et figure du bèlè
Paul Rastocle, musicien martiniquais et tanbouyé reconnu, est décédé le mardi 20 mai 2025 à l’âge de 93 ans. Né en janvier 1932 dans le quartier de Lassalle à Sainte-Marie, il a marqué de son empreinte la tradition du bèlè, à laquelle il a consacré la majeure partie de sa vie.
Issu d’une fratrie dans laquelle plusieurs membres se sont investis dans la culture martiniquaise — notamment son frère Benoît Rastocle — Paul découvre le tambour bèlè dès l’adolescence, aux alentours de 13 ans. Ce n’est pas dans le cadre familial qu’il apprend cet art, mais auprès d’un modèle extérieur : Anasthase « Féfé » Marolany, tanbouyé reconnu, dont il observe minutieusement la technique et adapte le jeu à sa propre main dominante.
Charpentier de formation, il travaille plusieurs années comme ouvrier, d’abord dans les champs de canne de l’habitation Union, puis dans une entreprise samaritaine, avant de terminer sa carrière professionnelle comme employé municipal à la mairie de Sainte-Marie. En parallèle, il continue à pratiquer le tambour bèlè dans divers contextes, notamment dans les Kay Bèlè de sa jeunesse.
Sa trajectoire musicale est ponctuée d’interruptions. Un incident au début des années 1960 l’éloigne de la pratique pendant près de dix ans. Il reprend le tambour en 1972 à la demande du chanteur Pierre Chonquet, et rejoint le groupe folklorique de Mme Renard à la MJC du Marigot. C’est là qu’il rencontre Eugène Mona, qui l’intègre à son orchestre en 1976. Paul Rastocle en devient le tanbouyé attitré jusqu’à la mort de Mona en 1991.
Par la suite, il continue à jouer, souvent aux côtés de son frère Benoît, dans un esprit indépendant, parfois en collaboration avec des groupes tels que Flanm Difé et Kazinel. Il participe à de nombreux enregistrements, notamment sous le nom « Les Frères Rastocle » et dans les productions de la Maison du Bèlè. Il est également l’auteur d’un album personnel de 17 titres, dont un morceau dédié à son épouse Marie-Anne, disparue en 2017.
À partir de 2004, Paul Rastocle s’implique activement au sein de la Maison du Bèlè, contribuant à de nombreuses manifestations et échanges culturels avec d’autres régions du monde, comme le Brésil, La Réunion, le Sénégal ou Haïti. Son action vise à transmettre les savoirs liés au bèlè, non seulement en tant que pratique musicale mais comme expression vivante du patrimoine culturel martiniquais.
Respecté par ses pairs et reconnu pour son style de jeu distinctif, Paul Rastocle a été un témoin et un acteur majeur de l’évolution du bèlè au cours du XXe et du début du XXIe siècle. Plusieurs jeunes tanbouyés s’inspirent encore aujourd’hui de sa technique.
La veillée mortuaire se tiendra le jeudi 22 mai à partir de 18h à la Maison du Bèlè à Reculée.