« Macbeth » de William Shakespeare,

— Par Michèle Bigot —

macbeth_cartoucherie
Jusqu’au 13 juillet puis de nouveau à partir du 8 octobre 2014, mise en scène Ariane Mnouchkine, musique de Jean-Jacques Lemêtre, Théâtre du soleil, Cartoucherie de Vincennes

Le texte de Macbeth est joué dans la traduction d’Ariane Mnouchkine, coédité avec les Éditions théâtrales. Il s’agit donc non seulement d’une nouvelle traduction, mais d’une véritable relecture. ,Et pour fêter le cinquantenaire de la troupe du soleil, auront lieu, les 26, 27 et 28 septembre 2014 : trois représentations exceptionnelles du King Lear de Shakespeare, joué – seul en scène – par Wu-Hsing Kuo, acteur de Taïwan⋅
La tradition littéraire fait de Macbeth un drame où se mêlent les accents métaphysiques et la note poétique⋅
Certes la note tragique n’est pas perdue ; voici comment Hélène Cixous appréhende Macbeth (Ayaï ! Le cri de la littérature)) « Done, en anglais, le participe passé du verbe to do, faire, c’est fait⋅ C’est : c’est fait, c’est fini⋅ I am done, je suis fait⋅ Je suis cuit⋅ Foutu⋅J’en ai terminé⋅Done c’est le coup de glas, le tocsin mental de Macbeth⋅ What is done is done⋅ It cannot be undone⋅ Peut-on défaire ce qui est fait, peut-on dé-mourir, « désachever », dé-défaire ⋅ Non⋅Mais si⋅ La littérature peut refaire de la vie avec des cendres⋅ De la vie autre⋅ De la vie suivie, poursuivie⋅
L’inéluctable , inscrit dans la vie nourrit la veine de la tragédie, non moins que le deuil et toutes les pertes ; et pourtant, le tumulte de la vie, avec sa part de pragmatisme, d’ambitions, de désirs, sages ou débridés réclame ses droits dans cette lecture.
L’ambiance magique, si shakespearienne et si propice aux mises en scènes de théâtre, portée par le retour périodique des trois sorcières ou de la forêt en marche donnent à Ariane Mnouchkine l’occasion de déployer sa palette de matières, de couleurs et de lumières. On sait combien elle excelle dans la chorégraphie et les évolutions chorales. Avec le support d’une bande son et d’un accompagnement musical dont la présence en bord de scène confère à la musique sa force de présence vivante, la pièce s’enrichit d’une dimension supplémentaire. Et c’est bien une pâte spécifique que travaille la mise en scène d’A. Mnouchkine. Elle se nourrit d’un imaginaire contemporain, qui prend sa source dans Harry Potter. La représentation des sorcières s’en trouve influencée. Si on peut parfois regretter que le carton-pâte alourdisse la vision et empiète sur la dimension poétique, le succès populaire est au rendez-vous et cette forme d’enchantement parle au public d’aujourd’hui.
Il n’empêche que la pure poésie de la vision reprend ses droits lorsque s’ouvre l’abîme du destin. Alors, à la faveur du jeu d’ombre et de lumière, de la profondeur des plans soulignée par la musique resurgit toute la force tragique de la pièce.